Personnellement, j’ai passé une semaine un peu frustrante. Ça a commencé avec l’histoire de la démolition de la maison du patriote Boileau – est-ce qu’il y a vraiment quelqu’un qui se rappelait de ce gars-là, à part Jean-François Nadeau du Devoir? –, et puis ça s’est poursuivi avec l’histoire du décrochage de l’enseigne lumineuse du magasin Archambault. Toute la gauche montréalaise a crié au scandale! Mais ils étaient où, ces gens-là, lorsque le temps fut venu, en 1996, de dénoncer la transformation du Forum de Montréal en complexe archi laid de divertissement de marde quand Canadien a déménagé au Centre Molson?
En fait, disons les choses clairement : le Forum fut carrément démoli de l’intérieur, et l’extérieur fut conservé selon une technique bien-pensante, le façadisme, et enlaidi au goût du jour par-dessus le marché. Au fait, êtes-vous vous passé par là récemment? Moi, aussi. C’est vrai que j’ai raison, hein?
Évidemment, la maison du patriote et l’enseigne du Archambault relèvent de deux domaines largement financés par nos taxes : l’histoire et la culture. Et on le sait, il ne faudrait jamais, selon le gauchiste moyen, s’attaquer à tout ce qui relève de ce genre de domaine.
Ici, insistons sur deux choses: le sport, dont le hockey de la Ligne nationale est l’incarnation suprême, est un fait social total, selon la définition de l’anthropologue Marcel Mauss. Il s’agit, en somme, d’une activité qui interpelle la totalité de la société et de ses institutions. Or, mettons que ce n’est pas le cas de la culture et de l’histoire. Pourtant, ce sont ces dernières qu’on souhaite préserver dans notre société.
Puis, on a dit que c’était important pour la mémoire collective de faire en sorte que l’enseigne et la maison soit préservées. Mais s’agit-il de mémoire collective réellement? Selon l’historien Pierre Nora, et surtout selon la page Wikipédia du concept de mémoire collective, cette notion renvoie au «souvenir ou à l’ensemble de souvenirs, conscients ou non, d’une expérience vécue et/ou mythifiée par une collectivité vivante de l’identité dans laquelle le sentiment du passé fait partie intégrante».
Or, la collectivité vivante, pour reprendre les mots de Nora, qui partage les souvenirs d’une vieille enseigne en néon et d’une vieille maison qui pourrissait, c’est essentiellement celle de Montréal. Le monde de région, lui, tripe sur Canadien et sur son (ou ses) char(s) montés. Même affaire pour moi, qui vient de Drummondville. Sauf qu’étant un transfuge de classe, en plus de triper sur Canadien, je rêve plutôt d’une Tesla. D’ailleurs, encore une couple de chroniques et mon rêve deviendra réalité – merci au journal Métro.
Bref, vouloir sauver pareilles inepties, c’est pas de la mémoire collective, c’est un état de dépendance du moi, aurait dit Freud. Une belle addiction aux objets, quoi!
Comme mon vieux chandail de Mats Naslund, dites-vous? Euh, non. C’est pas pareil. OK, là?