La ville de Montréal et le reste du monde se préparent à faire un dernier adieu à Jean Béliveau. Le moment est donc bien choisi pour évaluer la place de cette légende du hockey dans l’histoire du Canadien.
S’il vous plaît, essayez de ne pas cracher votre gorgée de café en lisant la phrase suivante: Béliveau, et non Maurice (le Rocket) Richard, a été le plus grand joueur à porter l’uniforme du Tricolore.
Le fait que Richard et Béliveau soient numéro 1 et numéro 2 dans l’histoire de l’organisation la plus décorée de l’histoire de la LNH ne générera pas beaucoup de débats. Mais placer Béliveau devant Richard? Un sacrilège, diront certains. D’autres souligneront que choisir entre les deux hommes équivaut à devoir choisir entre Scarlett Johansson et Kate Upton pour un rendez-vous galant.
L’annonceur du Canadien Dick Irvin a déjà dit que Richard lui-même avait reconnu qu’il n’était pas le meilleur joueur de hockey à s’être aligné avec le Canadien. Le plus fougueux, le plus dynamique, le plus impressionnant? Absolument. Le meilleur? Ce titre revient à Béliveau, qui a passé sa carrière à rendre les autres autour de lui meilleurs et a conservé un niveau d’excellence plus longtemps que Richard.
En fait, si Béliveau n’avait pas été autant un homme de principe, il serait au sommet de toutes les listes qui peuvent définir l’excellence chez le Canadien. Il aurait facilement pu se joindre au CH à 20 ans au lieu de disputer deux saisons avec les Aces de Québec, dans la ligue senior, et il aurait pu allonger sa carrière de deux ou trois campagnes.
Quand Béliveau a pris sa retraite, après la saison 1970-1971, il était le meilleur pointeur de l’équipe, avec 76 points, et avait ajouté 22 points à sa fiche en séries, remportant sa 10e Coupe Stanley en carrière. Est-ce là les performances d’un joueur au bout du rouleau? Et il s’agit d’un autre contraste avec Richard, dont les habiletés avaient grandement diminué à la fin de sa carrière.
Béliveau n’est pas devenu un membre du Canadien à temps plein avant la saison 1953-1954. S’il avait joint l’équipe deux ans plus tôt, il aurait été dans l’alignement pour la conquête de la Coupe en 1953. Et s’il avait joué quelques années de plus, il aurait décroché son 12e championnat en tant que joueur en 1973.
Béliveau était le joyau des équipes du Canadien durant les années 1960, qui étaient, selon certains, aussi dominantes que celles des dynasties de la fin des années 1950 et 1970.
Quand on y pense, combien de fois des joueurs de la trempe de Richard ou de Béliveau débarquent dans la ligue? Ce n’est pas une coïncidence si Béliveau, Richard et Howie Morenz sont les trois seuls joueurs du Canadien à avoir été exposés en chapelle ardente au domicile de l’équipe. Ils étaient tous des talents qu’on voit une fois par génération. Et Béliveau mérite qu’on se souvienne de lui comme étant le meilleur du groupe.