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Le cabinet Trudeau discutera de la frontière

A man and his family cross the U.S.-Canada border in Hemmingford, Que., Sunday, March 5, 2017. THE CANADIAN PRESS/Graham Hughes Photo: THE CANADIAN PRESS
Stephanie Levitz, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

OTTAWA — Les ministres fédéraux discuteront en profondeur des pressions politiques et pratiques qui pèsent sur le gouvernement libéral quant à l’augmentation du nombre de demandeurs d’asile au Canada.

L’agence frontalière, la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et les responsables de l’immigration ont élaboré des scénarios face à la possibilité que l’afflux de migrants illégaux augmente avec les températures plus clémentes du printemps.

Les résultats de cette réflexion feront l’objet de discussions lors de la réunion du cabinet, mardi prochain, selon ce qu’a appris La Presse canadienne.

Les responsables des diverses agences étudient aussi le lien entre les groupes distincts de migrants illégaux, qui pourraient ne pas tous avoir été influencés par le climat politique aux États-Unis.

Deux représentants du gouvernement fédéral ont confirmé à La Presse canadienne que plusieurs des migrants arrivés au Québec détenaient des visas américains délivrés par l’ambassade des États-Unis à Riyad, la capitale de l’Arabie saoudite.

Des interviews ont permis de comprendre que ces visas ont été obtenus pour aller aux États-Unis en transit vers le Canada, et finalement demander l’asile ici — des plans qui remontent bien avant l’élection américaine du mois de novembre, selon les représentants gouvernementaux, qui ont requis l’anonymat puisqu’ils ne pouvaient pas discuter publiquement de ce sujet.

Les photos des agents de la GRC transportant des enfants dans leurs bras au milieu des champs couverts de neige à la frontière américaine ont fait le tour du monde et ont accru la pression sur le gouvernement Trudeau.

L’opposition conservatrice incite le gouvernement à prendre des mesures sévères pour contrer la migration illégale et punir ceux qui franchissent la frontière — ce que le gouvernement nie pouvoir faire avant que les demandes d’asile soient traitées.

Le fait que les migrants illégaux soient plongés dans un système déjà contingenté a incité d’autres à presser le gouvernement à investir plus de ressources dans le processus d’accueil des réfugiés et dans les agences qui doivent s’occuper d’eux.

Selon le dernier rapport financier trimestriel de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada, dans les neuf premiers mois de l’exercice 2016-2017, il y a eu une hausse de 40 pour cent des nouvelles demandes comparativement à la même période un an plus tôt.

Ces statistiques démontrent que le niveau de demandes a commencé à augmenter avant l’assermentation de Donald Trump. En fait, une hausse a été observée depuis que Justin Trudeau a pris le pouvoir au Canada.

En octobre 2015, le mois de la dernière élection fédérale, 1519 demandes ont été déposées au Canada. Le mois suivant, lorsque le gouvernement de Justin Trudeau est entré en poste, il y en avait 1647 et — mis à part deux mois en 2016 — elles ont toujours augmenté davantage.

Donald Trump incite les gens à déménager au Canada, mais le message accueillant du gouvernement Trudeau sur la diversité et de l’immigration est aussi un facteur à considérer, selon Chris Friesen, directeur des services de rétablissement de l’Immigrant Services Society de la Colombie-Britannique.

«Nous sommes maintenant la lueur d’espoir pour les réfugiés désemparés», a-t-il soutenu.

En Colombie-Britannique, le nombre de demandeurs d’asile a bondi de 60 pour cent dans les 12 derniers mois par rapport à la même période un an plus tôt. La plupart sont des Kurdes de l’Irak, des Afghans et il y avait aussi 18 sans-papiers originaires du Guatemala, du Honduras et du Venezuela.

Le nombre de demandeurs mexicains a aussi commencé à augmenter dans la province, dans la foulée de l’abolition des visas pour les Mexicains. Seulement dans les trois derniers mois, 29 personnes originaires du Mexique ont présenté une demande de réfugié, alors qu’ils étaient 30 entre décembre 2015 et novembre 2016.

La Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada commence déjà à s’adapter au nombre accru de demandes, mais le cabinet envisage l’idée d’investir plus de ressources.

Les ministres se pencheront aussi sur la possibilité de retoucher l’accord sur les tiers pays sûrs entre le Canada et les États-Unis comme le réclament certains groupes. En vertu de cette entente, les migrants doivent demander l’asile dans le premier des deux pays où ils arrivent — sauf s’ils sont admis exceptionnellement. Selon certains, c’est pour cette raison que des migrants choisissent d’éviter les frontières officielles pour s’y rendre illégalement.

La décision du cabinet pourrait aussi être influencée par le prochain décret présidentiel de Donald Trump, qui s’est vu forcé de réviser sa précédente directive interdisant l’entrée aux États-Unis pour les ressortissants de sept pays à majorité musulmane. Le décret de M. Trump a été invalidé par les tribunaux.

Le gouvernement du Canada n’a pas beaucoup de recours pour freiner l’afflux de migrants, selon Ward Elcock, qui conseillait l’ancien gouvernement conservateur sur la migration illégale après avoir passé des années à la tête du Service cana­dien du rensei­gne­ment de sécu­rité (SCRS).

Le Canada doit continuer à discuter avec les Américains pour trouver la source du problème, mais en réalité, le nombre de migrants arrivant au Canada s’avère beaucoup plus modeste qu’en Europe, a-t-il remarqué.

Mais peu importe le nombre de personnes qui entrent illégalement au Canada, certains politiciens tenteront d’en faire un enjeu politique.

«C’est vu comme si on ne contrôlait pas l’afflux de personnes arrivant au pays», a-t-il conclu.

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