Charbonneau: audiences ajournées jusqu’à l’automne

MONTRÉAL – Les audiences printanières de la Commission Charbonneau ont pris fin, jeudi, après la sixième journée de témoignage de l’ancien président de l’Unité anticollusion, Jacques Duchesneau.
Jeudi, le procureur du gouvernement du Québec, Me Benoît Boucher, a contre-interrogé M. Duchesneau non pas sur la collusion ou la corruption dans l’industrie de la construction, non pas sur son rapport, mais sur son contrat de services professionnels avec le ministère des Transports, son mandat et les bureaux qu’il occupait.
Son contre-interrogatoire a été poussé dans des détails comme la date de l’envoi du curriculum vitae de la secrétaire et le type de pièces (cuisine, salle de conférence) des bureaux que l’Unité occupait. Me Boucher a même demandé si une salle de bain était accessible dans les bureaux du sous-ministre que l’Unité devait occuper, puisque l’Unité n’avait pas ses propres bureaux, durant ses premiers mois de travail.
Après avoir répondu patiemment, M. Duchesneau s’est étonné de l’angle des questions du procureur du gouvernement du Québec. «L’ennemi, c’est ceux que j’ai traqués pendant les 18 mois où j’ai été là. C’est drôle toutes ces questions! On vous a pointé la collusion et ce que vous regardez, c’est mon doigt, et non pas où on devait aller. C’est ça qui est triste!», s’est exclamé M. Duchesneau.
Me Boucher a par exemple tenté de justifier le fait que l’Unité anticollusion n’ait pas disposé de ses propres bureaux en affirmant que de tels bureaux n’étaient pas prévus à son contrat. «Dans votre contrat il n’était pas dit que vous alliez avoir une place nécessairement fixe pour travailler?» lui a demandé l’avocat du gouvernement du Québec.
«J’aurai tout entendu, là!» lui a répliqué M. Duchesneau.
«J’ose espérer que t’embauches quelqu’un, tu peux au moins penser lui donner un bureau! C’est comme si la Commission, on vous avait dit ‘vous allez tous travailler à partir de chez vous; je ne suis pas sûr que ça aurait donné les mêmes résultats’. Soyons sérieux», a-t-il ajouté.
M. Duchesneau a fini par qualifier de «peccadilles» les détails administratifs auxquels s’est attardé Me Boucher par ses questions, plutôt que d’aborder la collusion ou la corruption dans l’industrie de la construction ou le financement des partis politiques.
L’avocat du gouvernement du Québec voulait vraisemblablement faire comprendre que les embûches subies par l’Unité au cours des premiers mois de son existence, en 2010, étaient simplement dues au processus administratif. Il voulait aussi démontrer que M. Duchesneau avait accepté plusieurs de ces conditions de travail _ comme l’absence de bureaux dédiés ou le fait que les enquêteurs devaient utiliser leur véhicule personnel pour se rendre sur les chantiers de construction _ dans le contrat de services qu’il avait signé.
M. Duchesneau a tenté en vain de le ramener sur les questions de la lutte contre la collusion et la corruption, un aspect que le représentant du gouvernement du Québec n’a pas abordé dans ses questions à l’auteur d’un rapport choc sur ces sujets.
«Bien honnêtement, pendant les 18 mois de notre existence, on a géré la pauvreté. Je n’ai pas de problèmes avec ça. On a coûté moins de 2 millions $ et on a fait sauver 347 millions $. Je pense que le retour sur l’investissement était bien», a conclu M. Duchesneau.
Les audiences de la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction reprendront le 17 septembre.