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ALÉNA: Québec n’a pas de plan B si la gestion de l’offre est abolie

Photo: Judi Bottoni / The Associated Press

MONTRÉAL — Le gouvernement Couillard et l’industrie agroalimentaire n’ont pas de plan B advenant un démantèlement complet de la gestion de l’offre dans le cadre du renouvellement de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA).

Alors que le Canada, les États-Unis et le Mexique entameront dimanche une sixième ronde de négociations à Montréal, Québec et une coalition d’intervenants sont revenus à la charge vendredi en exhortant les négociateurs canadiens à maintenir la ligne dure face aux demandes des Américains entourant le système canadien qui régit les productions de lait, d’oeufs et de volaille.

Autrement, de 58 000 à 80 000 emplois — dont 26 000 au Québec — seraient menacés chez les producteurs d’oeufs et de volaille au pays, ont-ils fait valoir vendredi en dévoilant les conclusions d’une étude réalisée par le cabinet PwC.

«Lorsqu’on rencontre le gouvernement canadien, on leur dit « il n’y a pas un morceau qui s’enlève, parce que c’est toute la structure qui tombe »», a fait valoir le ministre de l’Agriculture, Laurent Lessard, en conférence de presse, à Montréal.

Ce dernier était accompagné notamment du président de la Coop fédérée, Ghislain Gervais, du président de l’Union des producteurs agricole (UPA), Marcel Groleau, et des dirigeants d’Agropur ainsi que d’Exceldor coopérative.

Ces 80 000 emplois menacés s’ajoutent aux quelque 24 000 postes qui, selon une étude commandée au Boston Consulting Group (BCG) par Agropur en 2015, seraient en jeu dans le secteur laitier advenant la disparition de la gestion de l’offre.

Interpeller

Les conclusions de la plus récente enquête ont été présentées au cours de la semaine à des négociateurs canadiens, a expliqué M. Gervais, ajoutant que l’exercice visait notamment à sensibiliser ces derniers ainsi que la population.

«C’est certain que les résultats sont alarmistes, a-t-il concédé. Nous voulions, avec ces données, éclairer le gouvernement dans les décisions qu’il aura à prendre. Les conséquences sont réelles advenant l’abandon.»

C’est en octobre dernier que les États-Unis ont réclamé la fin définitive du système de la gestion de l’offre d’ici les dix prochaines années, une idée qui, selon le gouvernement fédéral, est vouée à l’échec.

S’ils se félicitent du soutien offert par Ottawa à l’égard du système réglementaire actuel, Québec et l’industrie agroalimentaire souhaitaient aussi interpeller les consommateurs à propos des conséquences entourant la souveraineté alimentaire.

«Si cela devait disparaître, il faut le dire aux Canadiens, il n’y aurait aucun changement, a lancé M. Lessard. Il y aurait encore des oeufs, du lait et de la volaille. Mais il y aurait un important changement dans ceux qui livrent.»

À ce stade-ci des négociations, la pression s’accentue pour annoncer des déblocages substantiels. L’échéancier actuel des pourparlers prévoit que les discussions doivent prendre fin en mars, alors que le Mexique se lancera dans une campagne électorale pour la présidentielle de juillet.

Pour Québec et les représentants du secteur agroalimentaire, les demandes américaines visant par exemple l’agriculture, l’industrie automobile, les contrats publics et la culture sont tout simplement inacceptables.

«Par rapport à ce que les Américains demandent, nous serions mieux sans ALÉNA qu’avec un (nouveau) traité», a estimé le président de l’UPA.

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C’est la Coop fédérée, Exceldor coopérative, les Fermes Burnbrae et Nutrigroupe, en collaboration avec la Fédération des producteurs d’oeufs du Québec, Les Éleveurs de volailles du Québec et les Producteurs d’oeufs d’incubation du Québec qui ont mandaté PwC pour la réalisation de l’étude.

Voici quelques conclusions:

— D’importantes fluctuations: Un démantèlement de la gestion de l’offre pour les oeufs et la volaille signifierait que la production et les prix canadiens seraient établis par les marchés plutôt que par les offices de commercialisation et que les contrôles à l’importation seraient supprimés. Une déréglementation ferait en sorte qu’il serait impossible pour les fermes canadiennes familiales de concurrencer les géants américains.

— Disparition: Une ouverture des frontières ferait plonger la part de marché de la production canadienne d’oeufs de 80% à 90% alors que celle des producteurs de poulet fléchirait de 40% à 70%. De plus, la grande majorité de l’industrie canadienne de la dinde disparaîtrait probablement, fait valoir l’étude.

— Impact sur le produit intérieur brut (PIB): La disparition de milliers d’emplois et de producteurs canadiens aurait un impact négatif sur le PIB canadien, qui pourrait fléchir dans une fourchette oscillant entre 4,6G$ et 6,3G$. En cas de disparition de la gestion de l’offre, un «soutien massif» gouvernemental serait nécessaire pour tenter d’assurer une transition.

— Dépendance: Les provinces pourraient devenir plus dépendantes à l’égard des importations alimentaires de base, ce qui augmentera les risques de chocs alimentaires. L’étude suggère également qu’un marché plus ouvert pourrait se traduire par un recul de la qualité des approvisionnements alimentaires étant donné qu’ils proviendront de l’extérieur.

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