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Place des femmes en politique: un rapport évidé

Rien ne va plus à la Commission des relations avec les citoyens (CRC) qui se penche depuis deux ans sur la question de la place des femmes en politique.

Des libéraux qui y siègent ont pris le marqueur rouge pour biffer presque l’entièreté du rapport préliminaire, rejetant ainsi ses principaux constats et accusant le Service de la recherche de l’Assemblée nationale d’avoir manqué de «rigueur» dans sa rédaction, a appris La Presse canadienne.

Très attendu dans les milieux féministes et les partis politiques, le rapport final de la commission doit être rendu public vers la fin mai ou début juin.

Il devait formuler des recommandations pour dire comment les partis, le gouvernement et l’Assemblée nationale pouvaient de façon très concrète, et à court terme, lever les obstacles et créer les conditions favorables à la parité hommes-femmes en politique.

Car plus de 75 ans après avoir obtenu le droit de voter et de se porter candidates, les Québécoises occupent moins du tiers des sièges parlementaires alors qu’elles représentent la moitié de la population.

Modifications «substantielles» exigées
Or, comme le rapportait La Presse canadienne en avril, la CRC — qui est formée d’une majorité de libéraux —a plutôt choisi de privilégier le statu quo.

Pas besoin de loi imposant au moins 40% de candidatures féminines et pas question non plus de recommander aux partis politiques d’atteindre des quotas de candidates.

D’ailleurs, dans un document produit le 9 mai accompagnant le rapport préliminaire et dont La Presse canadienne vient d’obtenir copie, les élus libéraux expriment tout leur malaise face au processus de consultation, à la méthodologie qui s’est avérée «déficiente» et au contenu du rapport qui «fait preuve d’un manque de rigueur».

Fait rare, ils blâment sévèrement les recherchistes de l’Assemblée nationale, qui ont retenu dans le rapport des «propos dirigés», selon eux.

«Les résultats présentés ne peuvent constituer de grandes tendances ou constats, ces derniers référant à ‘des’ ou ‘plusieurs’ sans mentionner le nombre, etc.», peut-on lire dans le document.

«Il est extrêmement surprenant et décevant de constater que les propos et recommandations retranscrites NE RESPECTENT PAS les discussions et décisions prises par les membres de la commission.»

Selon eux, le questionnaire en ligne a été rempli par des clientèles «captives», c’est-à-dire «celles ayant déjà un intérêt pour ce type d’engagement, connaissant et visitant le site Internet de l’Assemblée nationale du Québec, entraînant des biais inévitables dans le recensement des données et dans leur interprétation».

Des groupes d’intérêt venus présenter un mémoire devant la commission «risquent fort» d’avoir aussi répondu au questionnaire en ligne, «ce qui fait qu’une même personne peut compter pour deux».

Par ailleurs, la commission n’a jamais sondé ni les élues actuelles ni celles ayant choisi de quitter la vie politique, ont déploré les libéraux. Pourtant, ont-ils noté, elles auraient été en mesure d’identifier les freins, réels ou perçus, à l’engagement politique.

«Nous ne pouvons accepter le rapport tel que présenté et sans des modifications substantielles liées à la rigueur des faits, l’abolition de nombreuses interprétations libres et le respect des discussions ayant eu cours entre les membres de la commission», ont-ils conclu.

Les nombreux changements survenus dans la composition de la CRC au cours des deux dernières années n’ont pas contribué au succès de l’entreprise ni contribué à faciliter et accélérer le processus décisionnel.

Les quelques députées membres de la commission qui ont accepté de dévoiler en avril les grandes orientations prises par la CRC ont dit l’avoir fait parce qu’elles étaient déçues, voire outrées, des choix faits par la majorité des élus composant la commission. Toutes ont requis l’anonymat.

Selon elles, au moins 80% des groupes venus témoigner dans ce dossier recommandaient à Québec de favoriser des mesures coercitives (loi ou quotas) pour forcer les partis à faire plus de place aux femmes en recrutant davantage de candidates.

Recommandations
À cette étape, les 13 recommandations de la CRC sont modestes et consensuelles. En résumé, elles sont:

  • Que les connaissances sur la représentation des femmes en politique au Québec soient développées;
  • Que la présence des femmes dans les instances dirigeantes soit encouragée en vue d’une représentation paritaire;
  • Que les femmes en politique soient plus visibles et valorisées;
  • Que l’offre de formation et de mentorat pour les aspirantes candidates soit développée;
  • Qu’une politique et un plan d’action pour la conciliation travail-famille-vie personnelle à l’Assemblée nationale soient élaborés;
  • Que le travail politique et parlementaire soit examiné en vue de le rendre plus attrayant, notamment en ce qui concerne l’organisation et la culture de l’Assemblée nationale;
  • Que des cours d’éducation à la citoyenneté soient intégrés aux programmes obligatoires d’enseignement primaire et secondaire.

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