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Débat sur les transgenres et les concours de beauté

VANCOUVER – Dans le monde très réglementé des concours de beauté, il est normal de se teindre les cheveux, il est impératif de savoir marcher correctement, et il n’est pas rare de passer sous le bistouri. Les révélations d’une transgenre de 23 ans de Vancouver qui voulait participer au concours Miss Univers Canada ont cependant déclenché un débat profond sur ces événements.

Jenna Talackova a été disqualifiée plus tôt ce mois-ci après avoir admis aux responsables qu’elle était une transgenre, ce qui contrevient aux règlements du concours, qui stipulent que les participantes doivent être «naturellement nées» femmes.

La possibilité que cela constitue de la discrimination se retrouve au coeur du débat.

Une ancienne reine de beauté, qui a dirigé l’un des plus anciens concours de beauté du pays pendant cinq ans, croit que c’est le cas.

Pour Connie McNaughton, qui a entre autres été couronnée Miss Monde Canada en 1984, le règlement est dépassé et la société a évolué. Selon elle, des participantes dans certains pays n’hésitent pas à subir des «améliorations» chirurgicales et esthétiques, et le fait de changer de sexe lorsqu’on est convaincue d’être une femme ne diffère pas de ces pratiques.

Mme McNaughton, qui a dirigé Miss Monde Canada de 2003 à 2008, a déclaré que les organisateurs de Miss Univers Canada, l’«autre» concours de beauté, étaient coincés parce qu’ils doivent respecter des règles édictées par l’organisme international qui appartient à Donald Trump.

Même si les organisateurs permettaient à Mme Talackova de participer, elle pourrait être expulsée au tour suivant, ce qui n’aurait contribué qu’à gaspiller du temps et de l’argent.

La décision a attiré l’attention chez des défenseurs des droits de la personne et poussé plus de 35 000 personnes à signer une pétition en ligne demandant le retour de Mme Talackova dans la compétition. La femme haute d’environ deux mètres et à la chevelure blonde dit avoir su dès son plus jeune âge qu’elle était une femme dans un corps d’homme. Elle a commencé un traitement hormonal à l’âge de 14 ans, et a changé de sexe à 19 ans.

Elle n’a cependant pas voulu commenter son exclusion du concours de beauté.

Les responsables de Miss Univers, à New York, sont jusqu’à maintenant demeurés campés sur leurs positions, expliquant par voie de communiqué que toutes les franchises du concours devaient respecter ses règlements. Cela inclut les exigences en matière de citoyenneté, d’âge, d’état civil, et le fait que toutes les participantes doivent être «nées naturellement femmes».

Selon l’avocate Kathleen Lahey, toutefois, il ne fait aucun doute que Mme Talackova pourrait intenter une poursuite pour discrimination. «Les droits de la personne s’appliquent également aux concours de beauté», a expliqué Me Lahey, qui se spécialise dans les questions liées au genre sexuel à la faculté de droit de l’Université Queen’s à Kingston, en Ontario.

«Ce que nous constatons, ici, est un autre cas de violation des droits de la personne en lien avec l’identité sexuelle et le genre sexuel.»

La professeure Lahey estime également que les organisateurs ne peuvent se réfugier derrière le concept d’une femme «née naturellement», puisque cela n’existe pas en droit. Elle estime plutôt qu’il existe simplement des lois et des protocoles médicaux qui permettent à une personne de faire correspondre sa vraie nature sexuelle et son apparence physique.

Selon Becki Ross, directrice de la chaire d’études féminines et d’étude des genres à l’Université de la Colombie-Britannique, la science démontre par ailleurs que les genres sexuels ne sont pas clairement définis mais existent en vertu d’une grande variété de déclinaisons, en lien avec les variations des chromosomes.

«Il y a ici une opportunité très importante pour conscientiser et éduquer les gens, entre autres en apprenant de Jenna et des autres femmes qui ont le courage de sortir des sentiers battus.»

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