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Montréal: une ville, deux cultures

On sait tous que Toronto a depuis longtemps supplanté Montréal en lui ravissant le titre de métropole du Canada. Sur les plans économique et politique du moins. En tirant le meilleur parti de ce qu’il nous restait, on a choisi de mettre en valeur la vitalité de notre scène culturelle pour trouver un certain réconfort dans notre déconfiture. Ce qui ne fut pas une mauvaise idée, bien au contraire.  

La carte «Montréal, ville des arts», on l’a jouée et rejouée à maintes et maintes reprises, depuis le temps. Et, avec l’avènement de la place des Festivals, Montréal a non seulement replacé le cœur de son centre-ville au bon endroit, mais s’est aussi payé un nouveau cœur tout court. Après une couple d’années de crevasses, de mares de bouette et de chantiers désolants, on voit maintenant que la transplantation était non seulement souhaitable, mais bel et bien nécessaire. Sauf que ça ne suffit pas…

Au cours des dernières semaines, j’ai abordé le problème avec différents promoteurs de culture qui œuvrent à Montréal. Au centre-ville comme sur le Plateau. Qu’ils présentent du théâtre, de la chanson, de la danse ou même de l’humour, tous en arrivent au même constat : les temps sont durs. Jamais, de mémoire récente, les billets n’auront été aussi difficiles à écouler. Ici même, à Montréal, la prétendue mecque du divertissement. Que se passe-t-il donc?

Essentiellement, il y a que les banlieusards viennent de moins en moins en ville. Trop d’entraves à la circulation, pas assez de stationnements et surtout, une garantie quasi-automatique qu’un donneux de contraventions viendra décorer le pare-brise de leur bagnole avant que la soirée s’achève. Ceux-là, faut les regarder aller autour des salles chaque soir. De vrais vautours. Pendant ce temps-là, les affaires vont plutôt bien dans les salles de spectacle de Brossard et de Laval. Que dire de plus?

On dirait que Montréal a deux fixations. La première, on l’a dit, c’est son titre de métropole culturelle. Et la deuxième, c’est l’obsession du stationnement, ou plutôt, de la manière de faire un maximum de cash avec son stationnement en vidant les poches des automobilistes. Je n’ai jamais vu, nulle part ailleurs sur le globe, autant de panneaux de signalisation, d’interdictions, de menaces de remorquage, etc. Je le répète, nulle part. Comme je n’ai jamais vu une ville qui faisait autant sortir ses préposés au stationnement – ou à la contravention, c’est selon – les soirs où les gens sortent. De la pure folie.

Une ville, deux cultures. L’une du divertissement, l’autre de la contravention. Petit problème : avec la seconde, on est en train de tuer la première. Bizarre, il n’y a pas un gestionnaire qui semble y voir une relation de cause à effet. Brillant.

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Décédée hier à l’âge de 93 ans, Madeleine Parent fut une grande dame du monde syndical des années 1940, 50 et 60. Interviewée dans le cadre d’une recherche il y a une quinzaine d’années, elle m’avait raconté comment le mouvement syndical, très préoccupé par la question nationale, s’était tiré dans le pied en négligeant de faire une meilleure place aux immigrants fraîchement débarqués ici. Surtout en ne profitant pas de leur énergie nouvelle et de leur désir d’avoir une vie meilleure. En une phrase, elle a résumé une leçon de solidarité que plusieurs n’apprendront jamais de leur vie. Ne les oublions jamais. Ni Madeleine Parent ni cette leçon.

– Les opinions exprimées dans cette tribune ne sont pas nécessairement celles de Métro.

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