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Sida: sensibiliser les jeunes une école à la fois

Photo: Métro

François Blais déteste le 1er décembre. La Journée mondiale de lutte contre le sida fait en sorte, selon lui, que le reste de l’année n’existe pas pour les personnes touchées de près ou de loin par le VIH/sida.

Pourtant, à tous les jours, il côtoie de près cette maladie mortelle. Depuis deux décennies, il est séropositif. Il se gave quotidiennement de pilules pour conserver la forme, qui est excellente pour un homme porteur du virus.

Le VIH/sida lui a en plus inspiré son gagne-pain: depuis 1993, François Blais se déplace d’école en école pour sensibiliser les jeunes aux infections transmises sexuellement (ITS). Cette année, la conférence Ruban en route sera donnée dans une cinquantaine d’écoles au Québec. Les compressions budgétaires font en sorte qu’il est de moins en moins invité.

En ce jeudi froid du mois de novembre, M. Blais s’est retrouvé devant une centaine d’élèves de quatrième secondaire du Collège Mont-Saint-Louis. Depuis une quinzaine d’années, il rencontre les jeunes de cette école privée du nord de Montréal.

«On ne joue pas à l’autruche, a indiqué l’intervenante spécialisée du collège, Andrea Whiteway. Les élèves font le party la fin de semaine et on le sait. Ils consomment et on le sait. Ils s’envoient en l’air et on le sait. Ce n’est pas tout le monde, mais on va leur parler de façon franche.»

D’après François Blais, ce ne sont pas toutes les directions scolaires qui sont prêtes à l’accueillir puisque le VIH/sida est tabou et que la sexualité est un sujet délicat, surtout pour les communautés culturelles et ceux qui pratiquent assidument une religion.

«Quand il n’y a pas d’infirmière et qu’il n’y pas d’intervenant dans une école, c’est une catastrophe. Après cela, on se demande pourquoi les CLSC débordent.» – François Blais, fondateur de Ruban en route

«Je vais vous inviter dans des zones assez inconfortables, a-t-il annoncé d’entrée de jeu aux jeunes qui semblaient très nerveux, voire gênés. Il y en a qui vont rire, il y en a qui vont trembler, il y en a qui auront chaud et d’autres qui vont perdre connaissance.» L’animateur n’a pas hésité à leur demander s’ils étaient actifs sexuellement. Une poignée de courageux ont levé la main.

Au cours de l’heure qui a suivi, François Blais a testé leurs connaissances sur les ITS en leur demandant les modes de transmission et les façons de bien se protéger. Entre quelques rires gênés, il leur a aussi donné des conseils pratiques pour installer un condom ou concevoir une digue buccale.

François Blais se promène dans toutes les régions du Québec pour donner sa conférence. Au fil de ses rencontres, il a constaté que les jeunes sont mal informés sur la sexualité, surtout depuis l’abolition des cours d’éducation sexuelle, il y a près de dix ans.

«Les jeunes en connaissent trop ou trop mal, a-t-il rapporté. Il y a beaucoup trop d’internet. Il y a beaucoup de gars qui viennent me voir en me disant qu’ils ne se trouvent pas performants. Ils regardent des films pornos. Ils ne réalisent pas qu’il y a trois ou quatre caméras et que ça fait 12 heures qu’ils tournent.»

«Il y a une fille qui m’a déjà demandé si on pouvait attraper quelque chose par la salive, a ajouté l’animateur. Je lui ai dit que pour le VIH, il n’y a pas de danger. Par contre, je lui ai dit que si elle rencontre un gars dans une discothèque et qu’elle lui donne un baiser, elle peut attraper l’hépatite B. La face de la fille a tombé. Elle a compris qu’elle n’était pas en danger pour le VIH, mais elle pensait qu’elle était correcte pour tout. L’information n’est plus là.»

François Blais en a aussi contre les scientifiques qui affirment que le virus du VIH/sida est indétectable chez les personnes séropositives qui prennent des médicaments et que celles-ci peuvent avoir des relations sexuelles sans risque.

«Si cette personne, dont le virus est indétectable, ne va pas voir le médecin depuis six mois et qu’elle oublie de prendre ses médicaments, qu’est-ce qui dit qu’elle n’est pas à risque, a demandé M. Blais. Cette information n’est pas rajoutée. La science évolue, c’est super le fun, mais il faut être prudent.»

Pour que les jeunes comprennent bien l’importance de bien se protéger, François Blais leur raconte son histoire. Après avoir fait un don de sang, il a découvert qu’il était porteur du virus VIH/sida. Il ne leur a pas dit comment il avait été infecté pour contrer les préjugés.

«Il n’y a pas personne qui mérite cette maladie, a-t-il insisté devant les élèves. De savoir comment la personne a été infectée, ça ne changera pas son diagnostic. Tôt ou tard, elle finira six pieds sous terre.»

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