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Tribunal: le syndicat des Postes invoque la Charte

Photo: Archives Métro

MONTRÉAL – Dans sa requête déposée devant la Cour fédérale, le Syndicat des travailleurs des Postes demande au tribunal de déclarer que la fin de la livraison du courrier à domicile est inconstitutionnelle et discriminatoire en vertu de la Charte des droits.

Le syndicat avait annoncé, en octobre dernier, qu’il allait contester devant les tribunaux la décision de la Société canadienne des postes de mettre fin à la livraison du courrier à domicile. Il a finalement déposé sa requête, cosignée par six autres organismes, représentant des personnes retraitées et handicapées, de même que deux particuliers.

«On est prêt, nous, à aller jusqu’au bout dans ce dossier-là. Il faut aller jusqu’au bout dans ce dossier-là pour permettre que la Cour suprême tranche», a confié le président national du syndicat, Denis Lemelin, en entrevue à La Presse Canadienne, mardi.

Le syndicat, qui représente 54 000 travailleurs, se bat pour la sauvegarde de 6000 à 8000 emplois.

Dans leur requête, ces groupes invoquent non seulement la Charte canadienne des droits et libertés, mais aussi la loi qui a créé la Société canadienne des postes et même les obligations internationales du Canada, en vertu d’une convention qu’il a signée.

Entre autres, ils demandent à la Cour fédérale de statuer que l’interruption définitive de la livraison du courrier à domicile est inconstitutionnelle et inopérante, parce qu’elle contrevient à la Charte des droits, plus particulièrement en ce qui a trait au droit à l’égalité pour tous, indépendamment de l’âge, des déficiences physiques ou mentales.

«L’élimination de la livraison du courrier à domicile est discriminatoire à l’endroit des personnes âgées et des personnes ayant une déficience mentale ou physique et crée un désavantage pour elles, en limitant leur accès à un service public fondamental», écrivent ces groupes dans la requête.

Postes Canada prévoit en effet remplacer le service de livraison du courrier à domicile par des boîtes postales communautaires, auxquelles les citoyens devront se rendre, dans leur quartier, pour aller chercher eux-mêmes leur courrier.

Ces groupes allèguent aussi qu’en exigeant des personnes ayant des limitations fonctionnelles qu’elles fournissent une attestation médicale de leur état, afin de continuer à leur offrir un certain service personnalisé, la Société canadienne des postes s’immisce dans leur vie privée en demandant des renseignements médicaux personnels. Et ultimement, cela vise à leur offrir «une norme ou une fréquence de service de livraison du courrier inférieure, créant ainsi de nouveaux obstacles à l’accessibilité», déplorent-ils dans leur requête.

Ironiquement, les demandeurs citent un ancien ministre des Postes, André Ouellet, à l’appui de leur cause. Lorsque M. Ouellet avait transformé le ministère des Postes en société d’État, en 1981, il avait publiquement donné des garanties quant au maintien des services postaux. «La création d’une société de la Couronne ne voudra pas dire la diminution des services habituellement assurés au public. L’article 5 garantit justement que ce même niveau de services essentiels que nous assurons devra continuer et c’est un objectif dans la loi confié à la nouvelle société», avait martelé M. Ouellet, un ancien ministre sous Pierre Elliott Trudeau.

Obligations internationales

Les requérants allèguent également que la Société des postes contrevient à ses obligations internationales, comme celles prévues dans la Convention relative aux droits des personnes handicapées et celle d’assurer un service universel, en tant qu’État membre de l’Union postale universelle.

Ils citent cette convention, qui stipule que pour «permettre aux personnes handicapées de vivre de façon indépendante et de participer pleinement à tous les aspects de la vie, les États parties prennent des mesures appropriées pour leur assurer, sur la base de l’égalité avec les autres, l’accès à l’environnement physique, aux transports, à l’information et à la communication (…) et aux autres équipements et services ouverts ou fournis au public, tant dans les zones urbaines que rurales».

Le groupe allègue également que Postes Canada a outrepassé sa compétence en vertu de la Loi sur la Société canadienne des postes. Cette loi impose à la Société des postes d’assurer «l’essentiel du service postal habituel». Et le Protocole du service postal canadien stipule que «Postes Canada livre les lettres, les colis et les publications cinq jours par semaine à toutes les adresses canadiennes».

Le combat juridique n’est toutefois pas le seul outil du syndicat. «La prise qu’on a, c’est de bloquer le plan comme tel. La façon de protéger les emplois, c’est 1- d’avoir la contestation et 2- de faire de l’enjeu du service postal un enjeu politique. Notre lutte est une lutte politique, on ne se le cache pas. C’est la question: quel genre de service postal on veut», a résumé en entrevue M. Lemelin.

«Il faut que le gouvernement, qui a le contrôle sur Postes Canada, dise à Postes Canada ‘non, on veut garder un service postal public et universel et on veut garder la livraison à domicile’», a ajouté le président du syndicat.

En plus de ces sept organismes et deux particuliers qui intentent cette poursuite, des municipalités pourraient bientôt faire partie du mouvement de contestation judiciaire.

Le maire de Montréal, Denis Coderre, a déjà annoncé qu’il mandaterait son contentieux afin de voir comment la Ville pourrait demander le statut d’intervenant dans la cause et faire valoir son opposition et ses arguments supplémentaires — problèmes d’entretien des boîtes communautaires, circulation accrue aux abords de ces boîtes, dévaluation des résidences situées à proximité, problèmes de sécurité et autres.

Et la présidente de l’Union des municipalités du Québec, Suzanne Roy, avait indiqué aux côtés du maire Coderre que cette démarche l’intéressait également et qu’elle comptait examiner aussi toutes les possibilités.

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