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L’accès à l’information fédérale est «très malade»

OTTAWA – La loi fédérale sur l’accès à l’information est impuissante à stimuler une véritable culture de reddition de comptes et de transparence dans les administrations publiques, concluent des chercheurs qui se sont frottés aux différentes lois régissant les données ouvertes dans tout le pays.

Dans sa neuvième Enquête nationale sur l’accès à l’information, l’organisme Journaux canadiens conclut cette année que la loi fédérale sur l’accès à l’information «ne fonctionne tout simplement pas», à cause des longs délais de traitement des demandes, d’une pénurie de personnel assigné à cette tâche et du caviardage des documents.

L’organisme, qui représente plus de 800 journaux canadiens, a transmis près de 450 demandes d’accès à des ministères, agences et sociétés de la Couronne du fédéral, des provinces et des territoires, mais aussi à des municipalités et à des corps policiers. «L’étude donne ainsi au public l’occasion de voir à quel point nos gouvernements respectent les dispositions de leurs propres lois sur l’accès à l’information, et d’effectuer des comparaisons entre les différents gouvernements», indique Journaux canadiens.

Au-delà des récriminations habituelles, l’enquête a révélé de nouvelles lacunes, notamment en ce qui a trait au support des documents. À l’ère du «tout numérique», l’étude a révélé que plusieurs organisations sont pourtant réticentes à fournir des documents qui peuvent être consultés sur un ordinateur.

Le rapport révèle par ailleurs que les municipalités offrent un service relativement rapide — plus que les provinces, et beaucoup, beaucoup plus que le fédéral, qui traîne très loin derrière. Car un Canadien qui demande un document fédéral en vertu de la Loi sur l’accès à l’information ne doit pas être trop pressé, selon l’étude. Et ce qu’il obtiendra risque d’être sérieusement caviardé. Le gouvernement et ses agences reçoivent des chercheurs une note de F pour la rapidité de la divulgation et une note de C pour l’ampleur du contenu divulgué.

Les différentes agences du gouvernement du Québec reçoivent une note de D pour la rapidité et le contenu divulgué. La Ville de Montréal et son service de police obtiennent une note conjointe de B pour la rapidité et de C pour le contenu. La Ville de Québec et sa police, par ailleurs, excellent à ce chapitre: elles décrochent une note conjointe de A pour la rapidité et de B pour la qualité du contenu déposé. La police de Québec a ainsi été le seul corps policier étudié à dévoiler la liste électronique de tous ses policiers, leur rang et leur échelle salariale.

«Il ne fait aucun doute que le mécanisme fédéral d’accès à l’information est gravement malade, écrivent les chercheurs. Certains ministères peuvent mettre des mois avant d’accéder à des demandes, même si tout le processus devrait prendre 30 jours ou moins.» À titre d’exemple, le ministère fédéral de l’Environnement a mis plus de deux mois avant de divulguer la liste de tous ses comptes Twitter, alors que neuf provinces ou municipalités se sont exécutées en une journée ou moins.

Et l’un des pires ministères fédéraux à ce chapitre, Transports Canada, n’avait toujours pas répondu à trois des cinq demandes déposées, plus de trois mois après la requête initiale. L’une de ces demandes concernait les observations des transporteurs ferroviaires dans le cadre des modifications à apporter aux normes en vigueur pour les wagons-citernes, à la suite de la tragédie de Lac-Mégantic.

La piètre performance du gouvernement fédéral, qualifiée d’«au mieux médiocre» dans le rapport, s’explique d’une part par la façon dont la loi est appliquée, et d’autre part par le libellé de cette loi adoptée il y a 32 ans, explique le directeur de projet, Fred Vallance-Jones, professeur de journalisme à l’Université King’s College, à Halifax. Il a été épaulé dans son travail par la journaliste pigiste montréalaise Emily Kitagawa.

«L’essentiel de cette loi n’a pas été revu depuis 1983 — et le monde a bien changé depuis», rappelle M. Vallance-Jones.

Les néo-démocrates, les libéraux et les verts ont tous promis en campagne électorale de moderniser la loi. Le rapport cite en exemple la province de Terre-Neuve-et-Labrador, qui a réformé sa loi en juin dernier, notamment en réduisant considérablement les frais de demandes d’accès et en augmentant les pouvoirs du commissaire à l’information.

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