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Stephen Poloz choisi personnalité de l'année

Photo: La Presse canadienne

OTTAWA – Au début de l’année 2015, Stephen Poloz dirigeait une banque centrale d’un pays qui manifestait enfin des signes de reprise économique, ce qui laissait croire qu’il allait hausser le taux directeur resté longtemps stable.

Mais seulement trois semaines après le début de l’année, le gouverneur de la Banque du Canada a perçu une menace, au loin: la chute des prix du pétrole dans le monde.

C’est à ce moment qu’il a causé une commotion dans le secteur des affaires en abaissant le taux directeur de 1 à 0,75 pour cent, prenant de court les marchés. Il avait dit vouloir protéger l’économie canadienne contre les effets «nécessairement négatifs» de la diminution des prix pour un pays qui exporte du pétrole.

Le gouverneur de la Banque du Canada Stephen Poloz a été choisi personnalité de l’année dans le secteur des affaires par La Presse Canadienne pour son rôle dans l’économie du pays, qui a traversé une période turbulente cette année.

M. Poloz a passé l’année 2015 à analyser une économie malmenée par la variation des prix du pétrole, qui a plongé le pays en récession technique. Ces difficultés ont amené le gouverneur à diminuer une fois de plus le taux directeur dans les mois suivants.

«Cela n’arrive pas souvent, ou même jamais, qu’une banque centrale prend complètement au dépourvu le marché avec la politique du taux directeur, et c’est précisément ce que Stephen Poloz a fait», a souligné l’animateur Greg Bonnell, du réseau Business News, en expliquant son choix.

«Bien que plusieurs se soient demandé pourquoi le gouverneur avait trouvé nécessaire cette « assurance », les deux trimestres négatifs de suite de l’économie canadienne ont fait que ses décisions du mois de janvier avaient l’air visionnaires», a-t-il ajouté.

M. Poloz lui-même était surpris des développements il y a 12 mois.

«En résumé, c’était une année difficile, bien sûr, parce que nous avons commencé avec un choc d’une grande ampleur. Et ce n’était pas seulement un gros choc, c’était un type de choc des plus complexes auxquels peut faire face un économiste», a-t-il soutenu le mois dernier lorsqu’on l’a questionné sur le bilan de l’année.

Il a rappelé qu’au mois de décembre l’année dernière, la banque commençait à voir poindre la chute des prix du pétrole, mais quelque mois avant cela, «il n’y avait presque aucun signe» en ce sens.

«C’était juste un peu faible, mais on aurait dit ce serait temporaire», s’est-il souvenu, en parlant de la situation à l’automne 2014, lorsque les prix ont entamé leur plongeon.

Jusqu’au mois de janvier, la banque centrale anticipait une croissance accélérée de l’économie canadienne, de concert avec celle des États-Unis.

Or, la remontée de l’économie américaine ne s’est jamais concrétisée et le portrait s’est assombri au Canada, ce qui a amené M. Poloz à utiliser un qualificatif qui en a fait sourciller plusieurs. En entrevue au «Financial Times» au mois de mars, le gouverneur a affirmé que la chute des prix allait entraîner des résultats «atroces» pour le premier trimestre au Canada.

Sa déclaration a suscité la controverse, le forçant à tempérer ses propos devant un comité parlementaire, où il a affirmé qu’il n’avait «certainement pas eu l’intention de surprendre ou d’effrayer les gens».

Il n’en demeure pas moins que les premiers résultats ont été effectivement désastreux. Lors du premier et deuxième trimestre, l’économie canadienne a reculé. En théorie, lorsque l’économie se contracte pour deux trimestres consécutifs, on parle d’une récession technique.

M. Poloz avait réagi en diminuant pour une deuxième fois le taux directeur à 0,5 pour cent — soit son niveau actuel.

«Aucune autre personne du secteur des affaires n’a pu défrayer les manchettes, tout en influençant grandement l’économie canadienne comme M. Poloz — pour le meilleur ou pour le pire», a souligné Jason Kirby, du magazine «Maclean’s».

Daniel Tencer, du Huffington Post Canada, a expliqué que les décisions du gouverneur de la banque centrale auraient plus d’influence que tout autre dirigeant d’entreprise sur une majorité de Canadiens.

M. Tencer a également fait valoir le risque potentiel pouvant être entraîné par les décisions du gouverneur de la banque: un accroissement de l’endettement chez les Canadiens.

«Sa décision de réduire les taux deux fois cette année, ce qui a encouragé le secteur immobilier, tout en menant la dette à la consommation à de nouveaux sommets, est au coeur des questions que tant de Canadiens se demandent: « Avons-nous trop de dettes? Est-ce que le marché immobilier est sur le point de chuter? »», a écrit M. Tencer.

«Seul le temps nous dira si les politiques de M. Poloz ont aidé le Canada en temps difficile, ou s’il a propulsé le pays directement vers un choc de désendettement», a-t-il poursuivi.

M. Poloz reconnaît que la vulnérabilité du pays s’est accrue avec l’augmentation de la dette des ménages, mais il estime qu’il est peu probable que cela puisse avoir des répercussions majeures et négatives.

Stephen Poloz, qui avait succédé à l’ancien gouverneur Mark Carney en juin 2013, s’est dit satisfait de la diminution des taux, rappelant qu’ils étaient encore en train de s’implanter dans le système.

«Je suis vraiment content de façon dont nos employés sont arrivés à (…) déterminer ce qui allait se passer. Mais au final, cela nous laisse encore un an, si vous voulez, dans la série de déceptions», a-t-il remarqué.

Il prédit toutefois que le Canada est sur la bonne voie de la reprise économique. «Nous croyons que les (points) positifs seront dominants en 2016», a-t-il tranché.

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