Soutenez

Amélie Dubois : Bonheur à l’horizon

Photo: Chantal Lévesque / Métro

«C’est l’histoire d’une fille qui cherche une idée de roman et qui… Ah non. C’est poche. En plus, si j’écris une histoire dont le personnage principal est auteure, tout le monde pensera que j’en suis réellement l’héroïne.» Quand on lit cette observation après presque 200 pages du nouveau livre d’Amélie Dubois, il est un peu trop tard. Clairement, l’auteure québécoise a mis beaucoup, beaucoup de sa personne dans ce récit. La fois où… j’ai suivi les flèches jaunes? La fois où Amélie a suivi les flèches jaunes?

Dans son nouveau roman, Amélie Dubois ramène les quatre filles «ayant formé une consœurie pour guérir de leurs patterns amoureux débiles» que l’on avait croisées dans Chick lit, sa série à succès. Vu de l’extérieur, son succès à elle, d’ailleurs, fait rêver. Psycho­criminologue et prof, elle met en 2009 sa carrière de côté pour écrire à temps plein. Près de 300 000 exemplaires plus tard, elle peut apposer le convoité et rare titre de best-seller à son nom.

Dans La fois où… j’ai suivi les flèches jaunes, premier tome de ce qui s’apprête à devenir une (autre) série, elle remet toutefois les pendules à l’heure. Car son héroïne, Mali Allison, qui lui ressemble quand même un peu, beaucoup, en fait énormément, est également auteure. Pratique. Elle peut ainsi préciser que le quotidien d’«écrivain-contemporain-moyen», ce n’est pas siiiii glamour. Que non, elle n’a pas de «crayon en bois de saule gossé par son arrière-grand-père, ancien analyste de hiéroglyphes égyptiens». Que non, elle n’écrit pas «installée confortablement devant une fenêtre panoramique donnant sur une forêt de pins de première génération», emmitouflée dans un foulard pashmina grade A. «Ne-non.»

«Il y a quelque chose de très romantique autour du métier de poète, de romancier, remarque en souriant Amélie Dubois. Mais pour vivre de sa plume, il y a des délais, des contraintes. Ce n’est pas “je remets mon manuscrit au gré du vent quand je sens qu’il est à point”.»

Elle note aussi (en fait, Mali le fait), qu’en commençant dans le métier, les médias l’ignoraient. Et que certains collègues lui disaient «Oh! T’as eu un coup de chance!» Petite pique? «C’est ce que j’ai vécu. C’est ce que j’ai entendu. “Pour toi, ç’a été facile.”» L’auteure trentenaire pause. S’esclaffe. «Oui, j’avais peut-être besoin de passer un message de façon tout à fait inconsciente finalement!»

Dans La fois où…, on renoue avec les scènes marrantes et pétillantes qui ont fait sa renommée (une tordante séquence de porte bloquée chez le coiffeur), les textos («un classique dans beaucoup de romans se passant de nos jours») et ses expressions déformées. «Sans l’ombre de l’épervier d’un doute.»

Mais on découvre aussi un aspect plus intérieur, spirituel, introspectif. Car Mali, «anéantie par la récurrence de sa lassitude, perdue, vide», épuisée par une relation amoureuse qui va tout croche, décide d’aller marcher sur le chemin de Compostelle. «Pour trouver des réponses. Ses réponses.»

Comme sa protagoniste, Amélie Dubois, qui pratique la méditation pour vrai, a soudain réalisé qu’elle devait faire ce périple. Puis qu’elle devait en tirer un livre. «C’est vraiment arrivé comme dans le roman : ça brassait sur le plan personnel. J’ai fait OK. Go. J’y vais. Maintenant.»

«Je ne voulais pas écrire sur Compostelle au départ. Mais je me suis mise à prendre des notes dans mon calepin sur les gens que je rencontrais en marchant. Et je les trouvais tous fascinants.»
– Amélie Dubois

Son périple romancé, elle l’a divisé en série de moments. «La fois où un miracle s’est produit à YUL. La fois où j’ai été inspirée dans l’avion. La fois où Reese Witherspoon m’a inspirée.» Cette fois-là, c’est celle où son héroïne a écouté Wild, de Jean-Marc Vallée. Avant son départ pour Compostelle, comme Amélie dans la vie. Vous savez, le film où Reese marche. Comme Amélie dans la vie bis. «Je trouvais ça tellement beau. J’étais dans tous mes états!»

Le chemin, elle l’a fait deux fois depuis, ce livre étant inspiré du premier voyage et «de la portion Espagne». Elle y décrit les trucs, les rituels. Et les gens. Car à Compostelle, en réalité comme dans les pages, on trouve une galerie de personnages. Tous là pour diverses raisons. Deuil insurmonté, cœur brisé, perte de repères. Mali marche ainsi avec un couple de retraités, un enfant charmant, un ado mystérieux. Chacun faisant ressortir des traits différents de sa personnalité. Humour, amour de la solitude, curiosité. À tous ces compagnons, elle dira merci. «Merci Logan. Merci Bettany. Merci Ginger Ninja.» Une façon, pour la romancière, de «rendre hommage à tous les gens qui ont croisé sa route».

Mais à la fin de cette route qu’elle aura parcourue pour trouver des réponses, il restera quand même tout plein de questions. À sa protagoniste aussi. «Ultimement, ce qu’elle cherche, c’est le bonheur absolu. Mais Compostelle, ce n’est pas un voyage miracle qui, ouh, règle tout.»

Comme la question de ce fameux bonheur absolu. Que son héroïne-double ne voit pas de façon conventionnelle. Qu’elle ne définit pas par «être complice avec notre conjoint 24 heures sur 24, puis se courir après au ralenti autour de l’îlot en cuisinant des recettes méditerranéennes (à base d’aliments bios sans gluten.)»

D’ailleurs, pour Amélie Dubois, écrire est peut-être un moyen de sortir du cadre et de dire à ses lecteurs que ce n’est pas grave si eux non plus ne suivent pas, par exemple, les règles établies pour «éduquer leurs enfants de façon à ne pas brimer l’épanouissement longitudinal de leurs compétences transversales». Que s’ils veulent autre chose que l’équation «maison + chum + fonds de pension + chien», c’est correct. «Ce cadre, ce moule ne convient pas à tout le monde. Tant de gens m’écrivent pour me dire : “Je me reconnais tellement dans ton personnage! Moi aussi je ne sais pas quoi faire, je cherche et je cours après quelque chose, mais je ne sais pas quoi.” Elle n’est pas toute seule Mali. Vraiment pas.»

La fois où… j’ai suivi les flèches jaunes
Aux Éditeurs réunis
En librairie dès le 2 novembre

Au Salon du livre de Montréal
Jeudi de 18 h à 20 h
Vendredi de 19 h à 21 h
Samedi de 14 h à 16 h
Dimanche de 14 h à 16 h

Articles récents du même sujet

Mon
Métro

Découvrez nos infolettres !

Le meilleur moyen de rester brancher sur les nouvelles de Montréal et votre quartier.