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Une vie: L’humble vérité

Photo: MK2 Mile End

Le classique littéraire Une vie de Maupassant devient un film d’une grande beauté grâce au travail d’orfèvre du réalisateur Stéphane Brizé.

Au sein d’une filmographie déjà impressionnante qui comprend Je ne suis pas là pour être aimé, Mademoiselle Chambon et Quelques heures de printemps, Stéphane Brizé met en scène des personnages qui ont de la difficulté avec les sentiments et la parole. Des êtres purs, comme Jeanne (Judith Chemla, nommée aux Césars) dans Une vie, qui seront malmenés par l’existence dans un nouveau long métrage mélancolique sur le deuil.

«J’ai l’impression que le roman a été écrit pour moi, confie le cinéaste français, lors de son récent passage à Montréal. J’ai le sentiment d’avoir fait une expérience commune avec Jeanne. Sauf que moi, mon expérience s’est arrêtée avant d’entrer dans la souffrance. En lisant cette histoire, ça m’a rappelé qu’en faisant mes premiers pas dans ma vie d’adulte, j’avais le sentiment de ressentir une blessure devant la brutalité de ce qu’était l’Homme. Il fallait mettre en place des défenses et après je me suis construit dans la nuance.»

Sauf que Jeanne ne le fait jamais. Elle regarde le monde comme un lieu sublime, ce qui est la cause de son drame. «Comme pour La loi du marché, il s’agit d’un film sur la fin des illusions, concède son scénariste. Nous avons l’obligation de cesser de croire en quelque chose qui n’a jamais existé ou qui n’existe plus depuis longtemps, et ça, c’est universel.»

«Ça m’embête presque de ne pas être l’auteur original de cette histoire, car il faut maintenant que je partage mon film avec Maupassant.» – Stéphane Brizé, réalisateur

Lauréat du prestigieux Prix Louis-Delluc (le Goncourt du cinéma), Une vie est porté par une réalisation minutieuse sur les plans de la lumière, du piano forte et des ellipses qui transcendent le matériel source.

«Je ne suis pas là pour faire une jolie illustration, maintient le metteur en scène. L’adaptation, c’est un braquage. Mais je ne peux pas faire table rase de tout ce qui se passe dans le roman pour y mettre mes inventions. C’est quand même Maupassant, il a oublié d’être bête. Mon travail, c’est de trouver un chemin de cinéma pour relier les éléments saillants du récit qui peuvent exister dans l’imaginaire collectif.»

Photo

Ce qui happe d’emblée dans Une vie est le format carré utilisé, qui s’apparente à des photos Polaroid semblant emprisonner l’héroïne, Jeanne.

«C’est un cadre qui me permet d’enfermer mon personnage dans une boîte, avec son regard qui bute contre le bord, développe le cinéaste Stéphane Brizé. Jeanne est une femme humble et il y a une forme d’humilité dans ce cadre que je trouvais émouvant, qui est modeste et qui, en même temps, possède
sa propre vérité.»

En salle vendredi

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