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Palo Alto: la première fois de Gia Coppola

Photo: collaboration spéciale

Dans Palo Alto, son premier long métrage inspiré d’un recueil de nouvelles signé James Franco, Gia Coppola filme l’adolescence dans tout ce qu’elle a de plus fragile, de plus beau et de plus douloureux.

Une jeune fille déchirée entre son coach de soccer qui lui fait de l’œil et un de ses camarades de classe à la fois poète et poteux. Un jeune homme qui fait mille et une folies, jouant au plus con qu’il ne l’est vraiment. Une adolescente qui cherche l’amour en multipliant les coucheries.

Sur ces histoires qui pourraient sembler banales, et qui se déroulent dans un décor californien évoquant celui d’un Less Than Zero en moins destructeur, Gia Coppola pose un regard fin, doux, gracieux. Qui plus est, son Palo Alto est porté par une distribution impeccable: Emma Roberts en fille au cœur mêlé, Val Kilmer en beau-père complètement givré et son fils, Jack Kilmer, en ado dérouté et sensible.

Avec ce premier film, la réalisatrice de 27 ans, qui a grandi sur les plateaux de cinéma, va au-delà du nom célèbre qu’elle porte, et qui la précède. Au bout du fil, tout doucement, la petite-fille du géant Francis Ford raconte.

Au sujet de Palo Alto, vous avez dit: «Il y a quelque chose de magnifique dans le fait de faire son premier film… mais il n’y a aucune façon de s’y préparer.» Ce mélange de beauté et d’anxiété s’applique aussi à toutes les «premières fois» que vivent les adolescents dans votre récit. Avez-vous senti une connexion spéciale à cet égard?
Assurément. Je trouve que réaliser son premier film est très similaire au fait d’être un ado. Il faut passer par le même chemin de découverte de soi, une fois de plus. Il y a beaucoup de similitudes.

À l’exception des scènes de grosse fête, vous nous présentez des lieux souvent déserts. Souhaitiez-vous faire un lien entre ce vide et la solitude doublée du sentiment d’être incompris que ressentent vos personnages?
C’est une jolie façon de le voir, mais c’est surtout parce qu’on n’avait pas vraiment beaucoup d’argent pour les figurants! Les seules fois où on arrivait vraiment à attirer plus de gens, c’était pour les scènes de fête. Et même là, c’est vraiment une illusion, parce la plupart du temps, on utilisait les mêmes personnes encore et encore. On essayait de donner une impression de pièce pleine, mais en réalité, on est, genre, cinq. On me voit même de dos!

On entend beaucoup de sons ambiants, des oiseaux qui chantent. Vous avez aussi préconisé l’utilisation de la lumière naturelle. Est-ce une façon d’exprimer une certaine pureté que vous associeriez à l’adolescence?
Hmm… J’utilise essentiellement la lumière naturelle. Même quand je fais de la photo, je n’utilise pas de lumière de studio. Pour ce qui est du son, j’ai travaillé avec un concepteur sonore vraiment génial [Richard Beggs], afin d’incorporer des subtilités : les oiseaux, un train dans le lointain… Je préférais laisser la musique jouer dans les moments qui sont très importants, quand il fallait intensifier l’émotion et laisser respirer le reste.

Malgré leurs défauts, vous ne jugez pas vos personnages. Ni les adolescents ni les adultes. Croyez-vous que c’est la règle primordiale en matière de cinéma : ne jamais juger ses protagonistes?
Je pense que c’est important… mais je n’y avais jamais prêté attention avant que les gens ne commencent à me le faire remarquer. En écrivant le scénario, je ressentais beaucoup d’amour et d’affection pour tous ces personnages parce que, après tout, ce sont simplement des êtres humains qui tentent de mettre de l’ordre dans leurs vies. Pour écrire, et pour pouvoir travailler avec les acteurs, je devais comprendre d’où ils venaient et comprendre pourquoi ils faisaient les choses qu’ils faisaient.

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Il y a plusieurs scènes de soccer dans votre film [la jeune fille jouée par Emma Roberts faisant partie d’une équipe]. On dit que les scènes de sport sont ardues à filmer, car elles sont comme des chorégraphies. Vous qui avez voulu être ballerine lorsque vous étiez petite, trouvez-vous des ressemblances avec la danse?
Oui! C’est si dur de comprendre les mécanismes permettant de représenter [un match] de la meilleure façon possible… Je ne connais vraiment rien au sport, et j’étais vraiment nerveuse face à tous ces trucs de soccer. J’ai assisté à plusieurs matchs afin de rendre ça le plus réaliste possible. Et puis, j’ai une directrice photo exceptionnelle, Autumn [Durald]. Elle a su trouver la bonne approche.

Une des choses qui ressort de votre film, c’est que les expériences adolescentes sont plutôt universelles. On pense au jeu «I’ve Never Ever» («Je n’ai jamais») auquel jouent vos personnages et auquel nous avons tous joué un jour ou aux cœurs gravés dans un tronc d’arbre… Est-ce une chose que vous avez constatée aussi?
Oui, c’est d’ailleurs ce que j’aimais du livre de James [Franco] : c’est que, même si l’action se déroule à Palo Alto, je pouvais m’identifier aux émotions qu’il décrivait. En plus, dans ses dialogues, je retrouvais des expressions que mes amis avaient l’habitude d’employer. J’ai aimé l’amplitude des personnages, le fait qu’aucun d’entre eux n’était catalogué dans un certain type de rôle. Ça faisait un moment déjà que j’étais irritée par la façon dont on dépeint les adolescents de nos jours et j’ai trouvé le point de vue de James rafraichissant, authentique.

La technologie est présente dans votre film… mais de façon modérée. Trouvez-vous que les cellulaires et les ordinateurs sont des objets peu cinématographiques? Ou est-ce parce que, dans le fond, les ados les utilisent un peu moins qu’on ne le pense?
En fait… ces objets ne m’apparaissent pas très cinématographiques, mais ils font partie de la vie quotidienne. Ce sera d’ailleurs intéressant de voir comment les autres cinéastes les incorporeront dans leurs films [à l’avenir]. De mon côté, je trouvais que plonger dans ce monde aurait entraîné l’histoire dans une tout autre direction qui ne fait pas partie du livre. Et puis, dans un sens, ces technologies ne sont pas une partie du quotidien si importante que ça. Quand j’ai commencé à travailler avec les jeunes acteurs, c’était par exemple impossible de rejoindre Jack Kilmer, parce qu’il ne regardait jamais son téléphone!

[youtube https://www.youtube.com/watch?v=sTqMUu1iTIo]
Palo Alto
En salle dès vendredi

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