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Floride: voyage vers l’oubli

Photo: Séverine Brigeot/Métropole films

Le cinéaste français Philippe Le Guay (Molière à bicyclette, Les femmes du 6e étage) signe avec Floride sa première adaptation, celle de la pièce Le père, de Florian Zeller.

Claude (Jean Rochefort) a 80 ans et, même s’il garde sa prestance d’antan, il lui arrive de plus en plus souvent d’avoir des trous de mémoire, depuis un événement terrible qu’il a choisi d’oublier. Mais il refuse de l’admettre et il n’est pas tendre avec sa fille (Sandrine Kiberlain), qui fait tout ce qu’elle peut pour que Claude ne se retrouve pas seul et livré à lui-même. Et puis un jour, Claude décide de s’envoler seul vers la Floride pour rendre visite à sa fille cadette.

«Le voyage en Floride n’était pas du tout dans la pièce, explique le réalisateur. C’est ce qui donne son impulsion au personnage. Il va quelque part, il attend quelque chose de ce voyage, il a un espoir, une envie, et le spectateur fait le voyage avec lui.» Et la Floride, pour le cinéaste, c’est «l’endroit où on n’a pas mal, comme une promesse de paix, avec son soleil, ses palmiers et sa mer chaude». «Et au fond, c’est un peu comme la salle de cinéma, poursuit-il. On y va pour se sentir bien, vivre des émotions, oublier la violence de la vie. Et c’est ce que Claude fait, il choisit le rêve plutôt que la réalité.»

Ce voyage, qui ouvre et ponctue le film, a permis à Le Guay une construction faite d’ellipses et de retours dans le temps. «Dans la tête des gens qui ont une mémoire fragile, il y a des trous, fait-il valoir. Et il fallait retrouver dans la forme du film ces moments où le temps passe sans explication. On prend le spectateur de vitesse, il comprend le sentiment de Claude d’être perdu.»

Mais tout confus qu’il soit, le personnage de Claude, dés­inhibé, tantôt rieur, tantôt colérique, n’en est pas moins d’une dignité à toute épreuve, et cela, le réalisateur l’attribue à son interprète, Jean Rochefort. «J’avais un énorme désir de faire le film avec lui, se souvient-il. C’est extraordinaire de voir comment il s’approprie le personnage. Il est superbe, il a quelque chose de tellement majestueux.»

«La Floride, c’est un peu comme la salle de cinéma. On y va pour se sentir bien, vivre des émotions, oublier la violence de la vie. Et c’est ce que fait le personnage du film. Il choisit le rêve plutôt que la réalité.» – Philippe Le Guay, cinéaste

Sandrine Kiberlain, avec qui Le Guay avait travaillé pour Les femmes du 6e étage, s’est aussi imposée rapidement pour créer avec Rochefort cette chimie empreinte de complicité, mais aussi d’antagonisme entre la fille et son père. «Fondamentalement, c’est un père qui ne voit pas sa fille, décrit le cinéaste. Il veut la garder pour lui, mais en même temps il n’est pas gentil avec elle. Je crois que dans la vie, on est parfois brutal avec les gens qu’on aime. Il devrait être reconnaissant envers cette fille attentive, qui prend soin de lui, mais il lui fait payer. C’est injuste, mais c’est poignant, aussi. Et c’est là l’arbitraire de l’amour : on peut continuer à aimer quelqu’un qui nous fait du mal, et ne pas savoir regarder la personne qui est bonne pour nous. Il n’y a pas de logique.»

Floride
En salle dès vendredi

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