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Legend: les facettes d’une légende

Photo: Remstar

Dans Legend, Brian Helgeland dirige Tom Hardy deux fois plutôt qu’une, l’acteur tenant le rôle des jumeaux Kray, des gangsters qui ont régné sur Londres dans les années 1960.

Quand le cinéaste américain Brian Helgeland s’est vu proposer de faire un film sur la vie des jumeaux Kray, des frères gangsters qui ont régné en rois et maîtres sur le monde interlope de Londres dans les années 1960, il n’a pas accepté immédiatement. «Dès que j’ai entendu parler d’eux pour la première fois, il y a 15 ans, j’ai trouvé que c’étaient des personnages fascinants, précise-t-il. Mais j’ai voulu faire un peu plus de recherche sur eux avant de me lancer dans la réalisation de ce film.»

Il a donc lu le livre de John Pearson sur lequel le scénario est basé, et quelques autres parmi la cinquantaine qui sont consacrés aux deux gangsters, en plus d’avoir passé un mois à Londres à rencontrer des gens qui les ont côtoyés de leur vivant.

Ce qui l’a convaincu? Le cinéaste cherchait à en savoir plus sur Frances, l’épouse de Reggie, dont peu de gens se souvenaient. C’est en parlant à un ancien membre du gang des Kray, Chris Lambrianou, qu’il a enfin eu une réponse: «Frances? C’est à cause d’elle que nous nous sommes tous retrouvés en prison.» «Et sans savoir ce qu’il voulait dire, j’ai su que j’avais un film», se souvient Helgeland. L’histoire de Ronnie, le frère psychopathe, et de Reggie, le gangster plus équilibré (tous deux interprétés par Tom Hardy), il a donc choisi de la raconter à travers les yeux de Frances (Emily Browning). «Je n’aurais pas pu raconter l’histoire de la même façon de leur point de vue à eux, précise le scénariste. Ça permettait de les humaniser, de rendre l’histoire plus complexe.» Métro a discuté avec le réalisateur.

Il y a une aura de glamour qui entoure les frères Kray, étant donné leur implication dans les boîtes de nuit et le charisme de Reggie, mais dans Legend, vous montrez aussi sans détour les actes de violence dont ils étaient capables…
Je ne voulais pas les dépeindre avec admiration et tout leur pardonner, mais je ne voulais pas non plus les juger. C’était très important pour moi. Et le fait de présenter leurs multiples facettes les montre de manière plus honnête.

Parlant de multiples facettes, vous avez choisi Tom Hardy pour jouer les deux frères, et il livre une performance très différente pour chacun d’entre eux… Pensiez-vous déjà à lui en écrivant le scénario?
Oui, mais pour le rôle de Reggie seulement. Au départ, je n’étais pas certain de vouloir qu’un seul acteur joue les deux frères. J’avais peur que ça fasse trop «gadget» et que ça déconcentre le public. Mais je n’avais pas exclu cette possibilité. Reggie était le rôle le plus important des deux, alors c’est celui-là qu j’ai proposé à Tom Hardy. Mais lui, tout ce dont il voulait parler, c’était Ronnie. Alors à la fin de notre rencontre, il m’a dit: «Je te donne Reggie si tu me donnes Ronnie.» On s’est entendus là-dessus sans trop comprendre dans quoi on s’embarquait.

C’était un gros défi?
Oui, mais surtout pour Tom, qui n’avait pas vraiment de partenaire de jeu, sinon son imagination. La dynamique avec les autres acteurs est importante pour un comédien, mais Tom ne pouvait pas s’appuyer là-dessus.

Les deux personnages sont très différents. Votre relation de travail avec Tom Hardy changeait-elle selon le rôle qu’il était en train de jouer?
C’est drôle, mais oui: c’était beaucoup plus agréable d’être avec Ronnie. Il avait toujours son bras autour de mes épaules, il ne remettait rien en question, il faisait ce qu’on lui disait. Reggie, lui, était plus discret, réservé, il observait de loin et voulait tout se faire expliquer. C’était très intéressant!

«J’ai l’impression d’avoir compris les Kray à ma manière. Parfois, un réalisateur étranger peut offrir une perspective sur une histoire que les gens trop proches de celle-ci ne peuvent pas forcément avoir. C’est d’ailleurs pourquoi certains des meilleurs westerns ont été réalisés par un Italien.» – Brian Helgeland, scénariste et réalisateur américain qui se penche, avec Legend, sur une histoire britannique

Vous avez commencé votre carrière comme scénariste (avec L.A. Confidential, Mystic River…), mais vous avez par la suite réalisé certains de vos scénarios (Payback, A Knight’s Tale, 42…). Est-ce que ça change la façon dont vous travaillez quand c’est vous qui créez le film de A à Z?
Oui. J’explique moins tout en détail quand c’est un scénario que je compte réaliser moi-même. Et puis quand je suis réalisateur, je connais parfois le budget dont je vais disposer, et je peux m’imposer des limites. Quand je réalise, je fais donc généralement des films à plus petite échelle, davantage basés sur les personnages que quand j’écris pour un autre cinéaste.

En regardant les films énumérés plus tôt, on constate que vous avez écrit des scénarios très différents les uns des autres, mais on y retrouve souvent des personnages qui cherchent à devenir une version idéalisée d’eux-mêmes. Encore dans Legend, Reggie essaie d’être un bon mari pour Frances, mais sa vraie nature reprend le dessus…
C’est vrai que mes films ont l’air très différents les uns des autres alors qu’en réalité, ceux dont je suis le plus fier, en tout cas, parlent tous d’identité. Les Kray m’intéressaient justement parce que Ronnie, même s’il semble être le plus mésadapté des deux, a une identité vraiment forte, alors que Reggie se cherche beaucoup, et se présente d’une manière différente selon la personne qui est en face de lui.

Legend
En salle dès vendredi

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