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Into the Forest: Après la fin

Se plongeant Into the Forest, Ellen Page incarne une jeune femme qui, lorsque disparaît le monde tel qu’on le connaît, doit faire face à une série de deuils, en comptant sur son instinct de survie et en s’accrochant à sa sœur, comme elle s’accroche à l’espoir.

Film indépendant, film qui ne dépend pas non plus de dénouements heureux et de questions éclaircies à tout prix, Into the Forest joue avec une idée qui apparaît à la fois impensable… et de plus en plus vraisemblable. Celle d’un univers où toutes les ressources se seraient taries. Où un jour, soudain, il n’y aurait plus d’électricité dans la maison. Plus d’essence à la station-service. Plus de denrées au supermarché. Pourquoi? Comment? Qui sait…

Au cœur de ce drame de science-fiction intimiste, Ellen Page se glisse dans la peau d’une étudiante studieuse aspirant à être acceptée dans une grande université. Evan Rachel Wood incarne quant à elle sa grande sœur, une danseuse qui rêve de devenir étoile. Quand le courant saute et que le noir se fait dans la chic demeure qu’elles partagent avec leur gentil papa, elles ne pensent qu’à une chose : «Mais je dois étudier!»; «Mais je dois répéter!» «Et la fête à laquelle on devait aller?! Comment on va s’y rendre?!»

Alors que leur père continue de sourire, d’abord sincèrement, ensuite pour la forme, jusqu’à ne plus sourire du tout, l’inquiétude se met à assombrir les humeurs. Et si l’on était coincés comme ça? Pour plusieurs jours? Pour longtemps? Pour tout le temps?

Adapté du roman de l’écrivaine américaine Jean Hegland, Into the Forest joue avec les codes postapocalyptiques. Mais contrairement aux films qui baignent habituellement dans ce genre – et qu’au demeurant, Ellen Page «adooore!» –, l’œuvre n’est pas «bourrée d’explosions, de créatures maléfiques ou, plus simplement, située en milieu urbain.» Non. Tout repose sur l’ambiance, sur l’anticipation. Sur ces regards complices, lourds de sens ou remplis de larmes que se lancent les deux sœurs. Ces instants «plus silencieux ont émergé naturellement, confie Ellen Page. Evan et moi sommes si proches! Tourner avec quelqu’un que j’aime, en qui j’ai confiance et que je suis soucieuse de protéger (et réciproquement) a permis à ces moments de naître.» C’est aussi cette approche minimaliste qui «permettait de réellement montrer à quel point les êtres humains sont résilients et capables de s’adapter à tout en situation de crise», remarque la charismatique actrice canadienne.

Ainsi, tandis que les filles s’organisent tant bien que mal, malgré les ressources qui s’épuisent et la fatigue qui s’installe, les nouvelles de l’extérieur arrivent par bribes. D’abord par les ondes de la radio qui griche : «Plusieurs rumeurs s’élèvent… Certains soupçonnent des terroristes…» Ensuite d’un copain qui débarque chez elles : «Les gens tombent malades, il n’y a plus d’électricité, plus de moyens de transport, plus d’internet. C’est le putain de Far Ouest!» Puis… silence.

«Si le genre post-apocalyptique nous attire tant, c’est parce qu’il nous fait prendre conscience du caractère éphémère de nos possessions… et de nos espérances.» –Ellen Page

Comme le bruit du métronome qui, une fois la panne installée, rythme les séances de répétition et les chorégraphies saccadées et viscérales de la grande sœur danseuse, tous les éléments sont bien dosés et précis dans ce film : le jeu des actrices, l’atmosphère, la musique. C’est d’ailleurs Ellen Page qui a convaincu le compositeur londonien Max Richter («Je suis folle de lui!») de signer la trame sonore. Et qui a ajouté à l’ensemble la reprise de Wild Is the Wind, interprétée par la voix douce et fantomatique de Cat Power.

En fait, c’est carrément Ellen qui a mis le roman de Jean Hegland, paru en 1996, entre les mains de la cinéaste Patricia Rozema. Et qui lui a proposé : «Faisons un film!» Cette adaptation a permis à l’actrice née à Halifax de tenir, pour la première fois, le rôle de productrice. «J’ai été chanceuse de travailler avec des gens qui ont été très patients avec moi et qui m’ont permis d’apprendre ce qu’assembler un long métrage voulait dire non seulement en termes créatifs, mais aussi en termes financiers», dit humblement celle dont la popularité a explosé à la sortie, en 2007, de la comédie dramatique Juno, réalisée par Jason Reitman.

Tourné à Vancouver, Into the Forest laisse une grande place à la forêt du titre qui, au fil du temps, se transforme, passant de couche protectrice contre le monde extérieur où tout part en vrille à lieu de renouveau, de vie possible. «Quel endroit magnifique! Le calme qui régnait là…!» s’exclame Ellen.

«Personnage à part entière», comme le note l’actrice, la maison dans ladite forêt, où habitent les deux sœurs, subit également des transformations au fil de «l’arc narratif» : se muant de cocon familial à refuge isolant les complices de la dureté de l’humanité, à lieu dangereux qu’il faut fuir. Une idée traduite à l’écran par ces murs qui commencent à s’effondrer, ce sentiment d’angoisse.

N’empêche, souligne Ellen. Bien qu’il soit teinté par les thèmes de la détérioration, de la perte et de la désolation, et «marqué par des événements brutaux et tragiques, le récit est rempli d’espoir». Principalement en raison de cette relation qui lie les deux sœurs et qui éclaire l’ensemble de sa force fusionnelle. Car dans cet univers qui s’écroule, il faut «laisser aller non seulement son passé, mais aussi son avenir tel qu’on se l’imaginait, et tous ses rêves». «Chez certains, ça se manifeste par la colère, la frustration. Mais malgré toutes les choses horribles qui leur arrivent, ces deux personnages décident de s’unir. Pour survivre.»

Into the Forest
En salle dès vendredi

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