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«La pauvreté pourrait être éradiquée, mais on s’en fout»

Photo: Getty Images

Selon des données de la Banque mondiale, le nombre de personnes vivant avec 1,90 $US par jour est passé de 12,7% (896 millions) à 10,7% de 2011 à 2013 (766 millions). Des chiffres encore beaucoup trop élevés, déplore Philip Alston. Métro s’est entretenu avec le rapporteur spécial sur l’extrême pauvreté et les droits de l’Homme à l’Organisation des Nations unies, alors qu’on souligne mardi la Journée internationale pour l’élimination de la pauvreté.

Quel est, selon vous, le portrait de la situation dans le monde à cet égard?
Sur le plan historique, les 30 dernières années ont été synonymes de baisse substantielle de la pauvreté, particulièrement dans des pays comme la Chine et l’Inde. La Banque mondiale est la principale source de données, et elle établit que, si une personne vit avec 1,90 $US ou plus par jour, elle est sortie de la pauvreté extrême. Il n’y a pas vraiment d’endroits sur la planète où on peut mener une vie décente avec cette somme.

L’ONU, quant à elle, va plus loin en prenant en considération des critères comme le système de santé, l’éducation, la violence. Ainsi, on compte près d’un milliard de personnes qui vivent encore dans la pauvreté.

Qu’est-ce qui est fait pour la combattre?
La communauté internationale se concentre sur les Objectifs de développement durable, qui ciblent les pays à bas salaires, mais ce n’est pas assez. La pauvreté est aussi répandue dans les pays plus riches. Pour ma part, je note que les mêmes gouvernements qui participent à l’effort mondial font l’inverse chez eux. Ils démantèlent leur système de sécurité sociale, suppriment des avantages dans le domaine de la santé, modifient leur Constitution pour réduire au maximum les dépenses sociales et blâment pauvres et marginalisés. Ces gestes montrent que beaucoup d’États ne s’attaquent pas au problème de la pauvreté avec sérieux.

En Occident, on est obsédés par les réductions d’impôts, qui enrichissent les riches et qui n’aident pas les moins nantis.

«La pauvreté pourrait être éradiquée, mais on s’en fout, préférant partir du principe que toutes les personnes pauvres sont des moins que rien qui n’ont que ce qu’elles méritent.» – Philip Alston, rapporteur spécial sur l’extrême pauvreté et les droits de l’Homme à l’ONU, affirmant que si la pauvreté existe encore aujourd’hui, c’est avant tout un choix politique. «On n’a aucun scrupule à laisser un grand nombre d’enfants vivre dans la pauvreté, alors qu’ils n’ont assurément rien à se reprocher», ajoute-t-il.

Quels sont les problèmes auxquels doivent faire face les gens vivant dans la pauvreté?
Le manque de possibilités pour s’en sortir. Quand on a faim, on ne peut pas se concentrer à l’école. Quand on vit dans un quartier pauvre sans surveillance policière, on a plus de chance de subir des traumatismes physiques ou psychologiques, ou de se faire voler ses quelques biens. Quand on a des dents en mauvaise santé parce qu’il n’y a pas de fluorure dans l’eau qu’on consomme et qu’on ne peut pas se payer des soins dentaires, on a plus de difficultés à trouver un emploi.

Et si on a un job, il risque probablement d’être temporaire et payé à l’heure, avec donc moins de temps libre pour, par exemple, aller voter pour le parti ou pour la personne qui pourrait nous aider. C’est un cercle vicieux.

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