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Une crise sans fin

OPATOVAC, CROATIA - SEPTEMBER 22: Migrants walk the last kilometres during the night towards a refugee camp after crossing the Croatian border with Serbia on September 22, 2015 in Opatovac, Croatia. Croatia has built a refugee camp to control the transit of migrants to Hungary with a capacity of 4,000 people. Thousands of migrants have arrived in Austria over the weekend with more en-route from Hungary, Croatia and Slovenia. Politicians across the European Union are to hold meetings on the refugee crisis with EU interior ministers meeting tomorrow and EU leaders attending an extraordinary summit on Wednesday. (Photo by David Ramos/Getty Images) Photo: Getty

L’Union européenne peine à contenir la plus grave crise de réfugiés qu’elle a connue depuis la Deuxième Guerre mondiale. Selon les données disponibles, plus de 206 000 demandeurs d’asile ont atteint l’Europe depuis le début de l’année. Et cet afflux de désespérés semble encore loin de se résorber alors que la guerre en Syrie continue de faire rage. Métro a fait le point pour tenter de comprendre les solutions à apporter à cette crise européenne inédite.

L’enjeu est si grand que l’agence des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR) a lancé une campagne et une pétition appelée #WithRefugees pour encourager les gouvernements à faire tout en leur pouvoir pour aider ceux qui sont en danger.

Bien que l’afflux de réfugiés accostant sur les côtes grecques ait diminué de manière significative à la suite de la fermeture de la route des Balkans et de la signature d’un accord entre l’Union européenne et la Turquie – qui prévoit, depuis mars, que tous les nouveaux arrivants en situation irrégulière puissent être retournés sur le territoire turc –, le nombre de personnes arrivant en Italie continue d’augmenter.

De plus, l’été et ses conditions météorologiques favorables à la traversée de la Méditerranée devraient encore contribuer à la hausse.

«Les conditions de vie des réfugiés sont bien pires cette année que l’année dernière», affirme Shailja Sharma, directrice d’études sur les réfugiés et les migrations forcées à l’Université DePaul, à Chicago, aux États-Unis.

L’issue à la crise semble encore échapper aux autorités, bien qu’elles semblent avoir pris conscience de son ampleur et de l’urgence d’y remédier.

«Protéger les Syriens à l’intérieur de leur pays permettra de s’attaquer aux racines du problème des réfugiés. La solution est politique, pas seulement humanitaire. Cette crise n’aura pas de fin tant que la guerre civile fera rage en Syrie.» – Shailja Sharma, directrice d’études sur les réfugiés et les migrations forcées à l’Université DePaul, à Chicago

Les experts croient que tant et aussi longtemps que la guerre en Syrie perdurera et que les peuples seront forcés de fuir leur pays pour échapper aux persécutions, les réfugiés tenteront de trouver la paix dans les États limitrophes au leur et en Europe.

Il est impératif que les pays facilitent l’accueil des réfugiés en créant davantage de canaux légaux, au moyen, notamment, de programmes de réinstallation qui permettraient aux gens d’atteindre l’Europe de manière sécuritaire et licite.

«Les pays riches doivent maintenant comprendre qu’ils ne peuvent plus se permettre d’agir en fonction du simple fait accompli en ce qui concerne les réfugiés comme ils l’ont fait tout au long de la seconde moitié du siècle dernier, croit James Hathaway, une sommité canadienne en matière de droit international concernant les réfugiés. Nous devons plutôt créer un système organisé et mondial afin d’implanter des normes de protection pour ces gens.»

M. Hathaway a ajouté qu’«il est ridicule d’exclure d’emblée que les réfugiés puissent risquer leur vie pour atteindre la sécurité et de laisser des accidents géographiques déterminer quels pays devront porter le fardeau de leur accueil».

Des changements majeurs sont attendus au cours des prochains mois dans le système d’asile et d’immigration européen, notamment la révision de la «règle de Dublin», une loi qui oblige les États à prendre en charge une demande d’asile émise depuis son territoire, ce qui représente un fardeau intenable pour les États méditerranéens où affluent la majorité des réfugiés voulant atteindre l’Europe du Nord, plus riche. L’UE espère également harmoniser les différents régimes d’asile qui cohabitent parmi ses 28 membres.

L’UE souhaite aussi conclure plusieurs accords avec des pays en voie de développement comme la Libye, l’Érythrée et le Soudan afin de réduire le nombre de réfugiés qui quittent ces pays.

«L’écart de développement entre le nord et le sud de la Méditerranée demeurera», selon Norma Rose, assistante du programme Migration et Diversité au sein du Centre de réflexion sur les politiques européennes, situé à Bruxelles. «L’UE devrait également ouvrir des canaux d’immigration légaux destinés aux travailleurs afin de réduire le nombre de réfugiés économiques qui viennent en Europe clandestinement.»

Sondage d’Amnistie internationale
Amnistie internationale a récemment publié un sondage dans lequel 27 pays sont classés en fonction de la volonté des peuples d’accueillir les réfugiés dans leur pays, leurs villes et leurs maisons :

  • Les cinq premiers pays en matière d’accueil de réfugiés sont l’Espagne, l’Allemagne, la Jordanie, la Chine et le Mexique.
  • Les cinq pays où la population est le plus prête à accueillir les réfugiés dans leur maison sont la Chine, le Royaume-Uni, la Grèce, l’Espagne et les États-Unis.
  • Les cinq pays où la population croit le plus que leur gouvernement devrait en faire plus pour les réfugiés sont la Chine, le Nigeria, la Jordanie, l’Espagne et le Brésil.
  • Là où les réfugiés sont les moins bienvenus: la Russie, l’Indonésie et la Thaïlande.

Entrevue avec Norma Rose, assistante du programme Migration et Diversité au sein du Centre de réflexion sur les politiques européennes

Quels sont les principaux problèmes auxquels sont confrontés les réfugiés?
Malgré les tentatives de la communauté internationale d’alléger les risques auxquels font face les réfugiés, ceux-ci rencontrent encore plusieurs problèmes, à toutes les étapes de leur épopée. La source de ces difficultés, c’est qu’ils n’ont aucun chemin pour atteindre l’Europe en toute légalité. La vaste majorité des réfugiés dépendent des passeurs, qui tirent profit de leur désespoir. Leur seule voie d’accès vers l’Italie ou la Grèce consiste à embarquer dans des navires en ruine pour traverser la Méditerranée – une route dangereuse, qui a déjà été un cimetière pour plus de 2500 personnes depuis le début de l’année. Et, une fois arrivés en Europe, les réfugiés subissent une réception souvent inhumaine dans des conditions misérables où ils croupissent longtemps avant que leur demande d’asile ne soit traitée, selon les dénonciations de plusieurs organismes de défense des droits de la personne.

Selon Amnistie internationale, les peuples «sont prêts à accueillir les réfugiés, mais la réponse inhumaine des gouvernements à la crise est déconnectée par rapport aux souhaits de leurs propres citoyens». Est-ce vrai?
La situation diffère d’un pays à l’autre et même d’une région à une autre. Les sondages réalisés en Europe indiquent que la majorité des gens appuient l’accueil des réfugiés si ceux-ci fuient la guerre et la persécution, mais pas lorsque ces derniers migrent pour des raisons économiques. Plusieurs des «réponses inhumaines» mises en œuvre ont eu pour but pour freiner ce dernier type de migration et ne ciblaient pas nécessairement les réfugiés qui ont droit à une protection internationale.
Cependant, les politiciens et les médias ont échoué à faire la distinction entre les deux jusqu’à maintenant, ce qui fait le lit de la xénophobie.

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