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L’affaire Martineau ou la valeur de la science

Photo: Yves Provencher/Archives Métro

Les réseaux sociaux sont inondés, à l’instar des médias traditionnels, de la nouvelle affaire Martineau. Conformément à toute guerre de tranchée de type Radio-Canada versus Québécor,  «l’attaque» de la Société d’État envers le chroniqueur-vedette n’allait pas demeurer sans réponse: plusieurs collègues de Martineau, et le principal intéressé, se sont chargés de répliques assez salées merci.

Sans se prononcer sur le fond de l’affaire, notons néanmoins certains éléments soulevés, toujours en réplique, qui ont de quoi faire sourciller.

D’abord, l’auteure du mémoire de maîtrise en question n’accuse pas Martineau d’être islamophobe, mais prétend plutôt que ses chroniques ont eu pour effet de contribuer au climat islamophobe ambiant. La distinction est notable.

Ensuite, que le mémoire ait été déposé en 2015 ne change rien à la valeur scientifique (ou non) de l’affaire, l’étude portant précisément sur la période de 2006 à 2014, où l’étudiante s’est farcie 438 chroniques de Martineau sur le sujet. Et pour information, la publication sur Papyrus, plate-forme de diffusion de travaux universitaire, prend habituellement un temps certain. De là, probablement, la justification entre le dépôt et le traitement médiatique du mémoire.

Troisièmement, certains collègues du controversé chroniqueur ont qualifié ce même mémoire de…minable. Navrant, dans l’optique où aucun argument n’est avancé à cet effet. Minable pourquoi, le mémoire? Parce que ses conclusions sont navrantes pour Martineau?

Ce type de réplique boulet de canon non appuyée sur des faits semble symptomatique d’une nouvelle tendance aux allures détestables: celle de miner, voire anéantir, toute étude scientifique ayant le malheur d’heurter certaines croyances, idéologies ou simples conforts. À titre d’illustration, il ne s’agit pas pour un individu (et ses amis) de prétendre que ses chroniques ne contribuent pas au climat islamophobe ambiant pour qu’il en soit ainsi. C’est pourquoi il appert nécessaire, sinon purement fondamental, que la science, notamment sociale, puisse continuer d’être au service des faits. Non alternatifs. Pensons Stephen Harper, qui imposa une politique confinant au silence les scientifiques gouvernementaux. Pensons Donald Trump, qui….Bon, ça va, vous avez compris.

En bref, quiconque n’appréciant pas les conclusions d’une étude universitaire, comme en l’espèce, porte nécessairement sur ses épaules le fardeau de la preuve, soit celui de démontrer les lacunes, de fond ou méthodologiques, qui plombent les résultats obtenus. Ici, rien entendu de tel. Plutôt des attaques faciles, caricaturales et gratuites. Que l’étudiante, maintenant doctorante, est inscrite à l’UQAM. Qu’elle est ainsi, par définition, de gauche. Pour le renversement du fardeau de la preuve, on repassera.

Surtout quand l’on sait que Martineau lui-même, se portant à propre défense, accuse l’étudiante de ne pas avoir défini, dans un premier temps, le concept même d’islamophobie. Voici la table des matières du mémoire en question. C’est ça.

Il est, en l’espèce, bien sûr permis de critiquer le traitement médiatique apporté ici par Radio-Canada. Mais ceci ne peut justifier, en aucun cas, la destruction tous azimuts, sans motifs autres que l’attaque perso ou le préjugé caricatural, d’une étude universitaire.

Il en va de la valeur de la science. Ou, dans le cas contraire, du règne du fait alternatif.

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