Quel âge me donnez-vous?: une très mauvaise idée de Canal Vie
Je voulais vraiment attendre la diffusion de la première émission et donner une chance au coureur, mais à quoi bon? La bêtise de l’opération est tellement évidente qu’on peut déjà crier à la très mauvaise idée de la part de Canal Vie.
Lundi, Jean Airoldi revient en ondes avec un nouveau concept aussi subtil que délicat: Quel âge me donnez-vous?
En gros, on stationne une madame dans un centre d’achat sous une cloche de verre et des passants devinent son âge. Évidemment, les dames sont vexées et souhaitent rajeunir et c’est là qu’Airoldi le sauveur débarque avec son relooking, des retouches esthétiques et même quelques manipulations faciales.
Déjà qu’interpeler les gens dans la rue pour leur dire qu’ils s’habillent mal était limite cruel et pas mal méchant, là on traverse une ligne. Ce que Canal Vie ne devrait pas, à mon avis, ignorer.
Je ne veux pas envoyer Airoldi dans la fosse aux lions ici. À la base, ce n’est pas son concept, juste un recyclage maladroit d’une émission en conserve de la chaîne TLC. Mais, c’est tout de même lui qui est associé au projet et il doit recevoir, malgré tout, une part du blâme.
On alimente avec ce genre d’émission un culte de la jeunesse et de la beauté superficielle qui n’a plus sa place en télévision de nos jours. Plusieurs médias font un travail de front afin d’éradiquer cette objectivisation du corps et on recule de 15 ans en véhiculant l’absurde idée que le bonheur c’est la jeunesse et qu’être jeune veut forcément dire être plus belle.
Ça me fâche en tant que spectateur, en tant qu’homme et surtout en tant que père.
Ma fille est encore jeune, mais je n’ai pas envie de la voir grandir dans un monde où on alimente encore la bêtise que le bonheur passe par la beauté et que celle-ci se trouve dans un fond de teint à 30$ et une teinture fraîche du jour. En tant que société, on devrait être au-delà de ça.
L’âge est un chiffre et la beauté passe par l’acceptation de soi. Encourager un autre message est une erreur.
Je comprends que les femmes qui participent à l’émission le font sur une base volontaire et que la production ne leur impose pas un mode de vie contre leur gré. Mais, le simple fait d’offrir la plateforme est répréhensible. On ouvre la porte à d’autres dérapages. Ça va être quoi ensuite? Devine mon poids. Devine si je suis dépressif. Devine si je suis fertile.
Articuler un divertissement autour du jugement des autres, c’est un terrain salement glissant que l’on devrait éviter complètement, pas juste en télé. Malheureusement, Canal Vie ne semble pas équipé pour bien manœuvrer cette glissade.
Préparez-vous à vivre un malaise signé Jean Airoldi et sa fontaine de jouvence.
