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Sauver Palmyre, oui mais…

FILE - This file photo released on Sunday, May 17, 2015, by the Syrian official news agency SANA shows the general view of the ancient Roman city of Palmyra, northeast of Damascus, Syria. Members of the Islamic State group have captured the ancient town raising fears that the extremists will destroy its archaeological sites that have stood for two millennia. Palmyra, home to one of the Middle East's most famous UNESCO world heritage sites, was under full control of militants on Thursday after troops withdrew to nearby bases. (SANA via AP, File) Photo: The Associated Press

Les jours de Bêl, d’Aglibol et de Malakbêl sont comptés. Après avoir régné pendant des siècles à Palmyre, les trois grandes divinités de la cité caravanière du désert syrien disparaîtront avec l’entrée de l’État islamique dans la célèbre oasis.

Les djihadistes ont déjà détruit d’innombrables trésors de l’Antiquité, rappelant que le «prophète [Mahomet] a ôté et enterré les idoles à La Mecque». Cela ne les empêche pas d’en épargner quelques-unes pour les monnayer au prix fort sur le marché noir afin d’enrichir leur trésor de guerre.

C’est peut-être le sort qui attend la triade divine de la «Venise du sable». À moins que tout le site archéologique soit rayé de la carte à coups de bulldozers, d’explosifs, de fusils, de marteaux piqueurs et de pioches. À Nimroud, dans le nord de l’Irak, l’EI a fait exploser en février le site assyrien datant de plusieurs millénaires.

En Afghanistan, il y a 14 ans, les talibans ont détruit les gigantesques bouddhas de Bâmiyân en criant : «Allah-u-abkar! Dieu est le plus grand!»

Tout cela au nom de la «vraie» religion.

La Syrie a 50 siècles d’histoire et la destruction de son patrimoine est une autre facette de sa guerre à huis clos qui tue en moyenne 5 000 personnes tous les mois depuis le début du conflit en 2011.

La barbarie syrienne a fait près de quatre millions de réfugiés. Le Canada a promis d’en accueillir 10 000 au cours des trois prochaines années.

Mais cette guerre n’intéresse plus personne. Il n’y a pas véritablement des «bons» d’un côté et des «méchants» de l’autre. Elle ne retient l’attention médiatique que lorsqu’une ville regorgeant de trésors millénaires, comme Palmyre, tombe sous la coupe de l’EI.

L’indignation est alors mondiale. Pour ses monumentales ruines avec son millier de colonnes romaines torsadées et sa nécropole de 500 tombes. Mais ses 60 000 habitants en proie désormais à la barbarie djihadiste, qui s’en soucie?

Si l’ONU est aphone politiquement pour tenter de mettre fin au massacre syrien, l’UNESCO, sa branche culturelle et scientifique, cherche à mobiliser la communauté internationale afin de sauver le joyau de l’Antiquité, situé à 210 kilomètres au nord de Damas.

«Il faut sauver Palmyre», lance sa directrice bulgare Irina Bokova. Oui, mais comment? Le site, classé au patrimoine mondial, connaîtra-t-il le même sort que celui de Nimroud? Sa destruction est-elle inéluctable?

«Je ne peux répondre à cette dernière question. Personne à l’UNESCO ne spécule sur l’avenir et n’émet une quelconque opinion sur ce que fera l’EI», note, prudent, son porte-parole Roni Amelan dans un échange de courriels.

L’héritage culturel de la Syrie est mis à sac. La guerre, elle, se terminera sans doute faute de combattants.

Pour l’EI, toutes les valeurs que l’Occident tient pour universelles doivent à tout prix disparaître, et les cris de l’UNESCO pour tenter de les sauver sont des coups d’épée dans l’eau.

Cependant, Palmyre et ses dieux Bêl, Aglibol et Malakbêl peuvent se consoler : s’ils sont rayés de la carte, ce ne sera pas dans l’indifférence générale.

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