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Les régions, les grandes oubliées de la santé

On est samedi après-midi. Alors que je m’apprête à regarder des séries sur Netflix, activité dans laquelle j’excelle particulièrement, je reçois un appel. C’est ma mère, un peu paniquée, un état dans lequel j’ai l’habitude de la voir. Elle m’appelle pour me dire que la fille d’amis de la famille est transférée à l’hôpital Rosemont-Maisonneuve. Elle vient de Chibougamau, elle est seule et confuse. Marie-Pierre est aussi enceinte. Quelques jours avant, elle s’est rendue à l’hôpital, car elle ne se sentait pas bien. N’étant pas équipés pour accoucher des bébés prématurés, ils l’ont transférée d’urgence à Montréal, à 687km de chez elle. Pendant quatre jours, elle ignorait si elle pourrait être transférée à Chicoutimi, qui se trouve à seulement quatre heures de Chibougamau. Une situation bien éprouvante pour une future mère dont l’enfant risque de naître avant terme.

Voilà la réalité de bien des gens qui vivent en région éloignées. Chaque année, les revendications restent les mêmes. D’où je viens, la grogne envers les services de santé persiste. Mais des histoires comme celle de Marie-Pierre sont nombreuses au Québec. L’automne dernier, sur la Côte-Nord, les témoignages étaient les mêmes. Les délais d’attente sont catastrophiques et les ressources en santé mentale, en santé publique, ainsi que dans l’aide aux aînés – pour ne nommer que celles-là – se font rares. En 2016, on apprenait que huit régions du Québec étaient sous-financées : la Montérégie, les Laurentides, Laval, Lanaudière, la Mauricie, l’Estrie, l’Outaouais et la Chaudière-Appalaches. Si certaines d’entre elles sont près des grands centres, imaginez les ressources disponibles pour celles dont la réalité géographique est tout autre.

La situation dans les communautés autochtones isolées est la même. Les femmes enceintes sont très souvent obligées d’aller dans des centres urbains pour mettre leur enfant au monde, ce qui peut s’avérer une expérience stressante et traumatisante pour celles-ci. Les barrières linguistiques, le choc culturel des codes sociaux et l’approche médicale différente sont des facteurs qui peuvent compliquer les procédures. C’est dans cette optique que la ministre fédérale de la Santé, Jane Philpott, a annoncé que les femmes autochtones pourront maintenant être accompagnées d’une personne de leur entourage lorsqu’elles accoucheront en dehors de leur communauté. Une décision qui soulagera plusieurs futures mères apparemment terrifiées à l’idée d’accoucher seules. Toutefois, ce règlement s’appliquera seulement aux femmes enceintes. Les personnes ayant besoin d’autres services médicaux à l’extérieur devront y aller seules. Au pays, alors que la courbe démographique chez les Autochtones augmente de 1,1% à 2,3% chaque année, de meilleurs services prénataux en région sont de plus en plus nécessaires.

Le peu de considération qu’on accorde aux régions me désole. Le fait qu’on les instrumentalise à tour de bras en période électorale me dérange encore plus. C’est quand même très ironique de leur tourner le dos, surtout lorsqu’on s’autoproclame champion de la santé et l’économie.

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