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Lundi liste – Les valeurs québécoises

Je suis fière d’être Québécoise. Pour toutes sortes de raisons. Je pense que nous sommes un peuple ouvert, accueillant, comme bien d’autres peuples, bien sûr. Le fait que ces traits de caractère nous définissent malgré les écueils que nous avons surmontés me donne l’impression que nous sommes quelque chose comme des irréductibles.

J’aimerais que ces valeurs de tolérance dans l’adversité nous définissent. Mais ça, c’est mon opinion personnelle à moi et je suis bien consciente du danger de vouloir que des valeurs définissent un peuple. C’est pas parce que ces valeurs me plaisent à moi que c’est la même chose pour le voisin, même quand des valeurs paraissent universelles.

Avec le projet de loi 60, j’ai l’impression qu’on voudrait couler dans le ciment des valeurs qui ne me plaisent pas tant, comme l’exclusion, en nous les vendant comme des valeurs contre lesquelles on ne peut bien sûr pas s’ériger. L’égalité hommes/femmes, la laïcité et l’acceptation de l’homosexualité, par exemple, personne ne peut être contre ça. Ce sont des prérequis pour être un bon humain sur la terre. Mais est-ce que ces valeurs sont spécifiquement québécoises et, surtout, sont-elles en danger?

Notre insécurité collective semble nous porter à croire qu’elles le sont, et que notre identité en est menacée. Et s’il y a un réflexe qui semble nous définir, comme peuple, c’est de nous replier sur ce que nous connaissons lorsque nous sentons notre identité menacée. C’est ce que nous avons toujours fait. En voici quelques exemples.

1. La religion catholique

Aujourd’hui, on se définit d’abord comme peuple francophone, mais pendant des siècles, nous nous sommes définis en regard de nos rivaux comme peuple francophone ET catholique, l’un n’allant pas sans l’autre. Ce sont des Paul-Émile Borduas et autres signataires du Refus global qui nous ont permis de réaliser que notre repli sur une identité catholique conservatrice nous empêchait de nous émanciper. Enfin, je résume, mais en gros, on comprend que ça devait être insécurisant de laisser aller un pan de notre identité qui avait été si important pour nous définir. Et pourtant, nous l’avons fait, quoi qu’il y en a qui ne sont pas encore tout à fait à l’aise de s’en débarrasser complètement aujourd’hui!

2. L’agriculture

Une autre chose qui nous a longtemps distingué des anglais, c’était notre attachement au système seigneurial, un système pas très égalitaire, mais qui avait l’avantage de bénéficier aux propriétaires de terres que nous étions. C’était beaucoup plus simple de continuer à labourer la terre que de se risquer à faire des affaires, un domaine dans lequel les conquérants excellaient. S’il avait fallu que nous nous obstinions à nous définir comme des agriculteurs, nous n’aurions jamais vu l’avènement d’Air Transat, et donc, jamais connu cet autre aspect qui nous définit :

3. Applaudir en avion

Que serait la nation québécoise si on lui interdisait de féliciter bruyamment le pilote d’avion de nous avoir mené à bon port, tel que le stipule son contrat d’embauche, de Montréal à Fort Lauderdale? Hein?

4. La langue française

Il me semble tout à fait légitime, en 2014, de nous définir comme peuple francophone. Ça nous a bien servi jusqu’à maintenant. Ça nous a permis de maintenir en vie une culture distincte, qui se démarque par son originalité et sa vivacité au sein d’une Amérique du Nord majoritairement anglophone.

Ça nous permet de gravir régulièrement les marches du Festival de Cannes, de rire des cotes d’écoute des séries télé canadiennes qui n’arrivent pas à la cheville des nôtres, et de laisser nos voisins ontariens pantois devant la valeur marchande d’une personnalité publique comme Véronique Cloutier. What? 1 million $ Who?

Ça donne une scène tellement fertile qu’un gars capable d’avoir du succès d’Abu Dhabi à Hollywood décide de faire carrière aux côtés de Simon-Olivier Fecteau à Montréal. Franchement une réussite cet attachement à la langue.

Et quand nos réalisateurs qui ont connu le succès grâce à C.R.A.Z.Y, Incendies ou J’ai tué ma mère décident de travailler en anglais parce que c’est de l’autre côté de la frontière qu’est la grosse argent, on a quand même le sentiment que c’est le Québec qui rayonne à l’étranger, et non l’étranger qui menace notre identité. Parce qu’on est confiants. Parce qu’on sait qu’il y a un peu de nous dans leur succès, que le terreau fertile de la spécificité francophone québécoise y est pour quelque chose.

5. La peur

La peur nous a longtemps défini. Normal. Notre identité semble toujours avoir été menacée. Mais l’heure est à l’attrait plutôt qu’à la réclame. Et comme on n’attire pas des mouches avec du vinaigre, mieux vaut miser sur ce qui nous rend cool et sympa que sur ce qui nous donne simplement l’air insécures. Mais ça, c’est mon avis très personnel.

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