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Tirer des conclusions

Photo: Archives Métro

Il s’est dit beaucoup de choses sur la «créolisation» du Québec, le franglais, les Dead Obies et Christian Rioux au cours des derniers jours. Je n’ajouterai rien sur le sujet, sinon que je m’inquiète pour la sérénité du correspondant du Devoir à Paris. Connaître autant de détails au sujet des membres d’un groupe qu’on se réveille la nuit pour détester – leur village natal, les origines de leurs parents et tout ce qu’ils ont dit au cours des deux dernières années – ne peut pas être sain. À un quiz sur les Dead Obies, Christian Rioux battrait de même Rebecca Makonnen, Émilie Côté et Philippe Papineau réunis.

Mais au-delà de la tranquillité d’esprit de Christian Rioux, ce qui me préoccupe davantage, c’est la facilité avec laquelle on semble pouvoir dégager des tendances lourdes à partir de si peu. Christian Rioux disait sur le plateau de 125 Marie-Anne que les artistes étaient le reflet de la société dans laquelle nous vivons. Oui – c’est d’ailleurs un des arguments en faveur des subventions culturelles – et non. Dans le cas des Dead Obies, c’est vraiment difficile à justifier. S’ils sont le reflet de quelque chose, c’est d’une sous-culture qui est loin d’avoir atteint, au Québec du moins, le rang de représentante de la société. Dans le grand cahier Canada du hip hop, les Dead Obies se situent dans la marge.

Au printemps dernier, j’ai visité un nouveau fleuriste sur le boulevard Saint-Laurent, le Jardin de Monet. La mignonne petite boutique est tenue par deux asiatiques qui ne maîtrisent pas encore tout à fait la langue de Christian Rioux, mais ce n’est pas sur la question linguistique que je veux vous emmener avec mon anecdote. Lorsqu’une de leurs employées, une femme de la génération de ma mère, a voulu m’aider à choisir un bouquet pour mon amoureuse, elle m’a suggéré quelque chose de «jeune», dans son esprit du moins : des fleurs bleues tournant vers le plastique. Afin de mieux lui faire comprendre mes goûts, je lui ai dit que je cherchais quelque chose de plus… traditionnel. J’ai finalement choisi un agencement de roses et d’œillets.

De puis, je ne peux m’empêcher d’imaginer la gentille dame qui m’a servie raconter à qui veut l’entendre combien les jeunes d’aujourd’hui sont conventionnels parce que l’une d’entre elles a demandé des fleurs qui correspondent plus au goût du jour, moins au goût du 25 mai 1998. Elle ne le fait peut-être pas, et c’est sûrement malhonnête de croire qu’elle le fait, mais je m’imagine cette situation parce qu’on le fait tous. On (incluant la personne qui écrit) dégage tous, à un moment ou à un autre, des tendances à partir de cas isolés.

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