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L’audace

Petit précis à l’usage des dirigeants de Radio-Canada.

La petite vie fut un succès phénoménal. Au plus fort de sa popularité, le sitcom ramassait 4 millions d’auditeurs, ce qui signifiait à l’époque que plus d’un Québécois sur deux écoutait en direct les folleries de Popa et Moman. Ce genre de succès n’arrive qu’une fois par décennie et bien heureux sont ceux qui en font partie. Avec les cotes d’écoute, les revenus publicitaires sont au rendez-vous si bien qu’évidemment, tout le monde voudrait reproduire l’expérience. Un fou dans une poche.

Fort malheureusement, personne ne détient le secret de la sauce. Alors on s’accroche aux succès du passé en proposant des concepts calqués ou, dans les pires des cas, en étirant ladite sauce. C’est ainsi que 20 ans après avoir fracassé des records d’audimat, on pense faire un bon coup en ressortant une vieille barbe, un chapeau et des lunettes vieillottes qui, depuis, ont eu le temps de redevenir à la mode. Et si le secret du succès comme La petite vie était plutôt l’audace?

Quand La petite vie a été mise en ondes, le produit était audacieux : un personnage féminin interprété par un homme, des individus qui dorment à la verticale, une adulescente à la sexualité débridée, une caricature nécessaire du père de famille plus connecté sur ses vidanges que sur sa progéniture. On découvrait, aussi, des comédiens de talent comme Guylaine Tremblay et Marc Labrèche. Enfin, nos parents découvraient ces nouveaux noms. Nous, on les connaissait déjà du Club des 100 watts. Aujourd’hui, un jeune de 20 ans n’a aucune idée de ce que vient faire un vieux barbu maladroit dans ce talk-show du vendredi soir. Mais c’est pas grave, les baby-boomers sont contents. En fait, je paris un dix qu’ils seraient tout aussi contents si on leur redonnait carrément… des épisodes de La petite vie.

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«Si j’avais demandé aux gens ce qu’ils voulaient, ils m’auraient répondu des chevaux plus rapides», disait l’inventeur de l’automobile.

On pense sauver Radio-Canada du démantèlement en proposant des valeurs sûres à un public pour lequel on doit avoir très peu d’estime pour le croire ainsi endormi. Pourtant, les grands succès de notre télé ne se sont pas faits dans la facilité. Les Bougon brassaient la cage de la bienpensance, Lance et compte se donnait les moyens du cinéma à une époque où c’était impensable.

Fais attention, Radio-Canada, parce que TVA, la chaîne populaire connue pour ses choix consensuels, est en train de te damer le pion dans le créneau de l’audace avec des propositions comme Les beaux malaises ou l’inclusion d’artistes champ gauche à La Voix ou dans le Gala Célébration. Ça ne va pas super bien quand un gala de loterie fait des choix plus audacieux que la chaîne nationale sensée prendre les plus grands risques créatifs.

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