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Recherches à deux vitesses

Photo: Facebook

Heureusement, la jeune Jade Maréchal a été retrouvée saine et sauve. Dans les heures qui ont suivi sa disparition, le cri du cœur du père cherchant sa fille a fait le tour des réseaux sociaux et il était difficile de ne pas savoir que l’ado était disparue. La mère de Jade, Claire LeCarpentier, affirme que la forte médiatisation de cet avis de recherche a été déterminante dans les retrouvailles de sa fille. Influence Communication estime qu’au moment de l’annonce de l’heureuse découverte, la nouvelle a dépassé en poids la conférence de presse de Marc Bergevin sur Twitter.

C’est, en soi, une excellente nouvelle que l’on s’intéresse davantage au sort d’une jeune fille disparue qu’aux déboires du tricolore. Et il est beau de voir qu’en situation critique, la communauté se sert les coudes pour venir en aide à son prochain. Mais est-ce toujours le cas?

On sait que les premières heures suivant la disparition d’une personne sont décisives dans l’issue des recherches. Or, dans son essai Sœurs volées, Enquête sur un féminicide au Canada, Emmanuelle Walter recense plusieurs cas de disparitions de femmes autochtones pour lesquels la police a mis des jours, voire des semaines avant d’entamer les démarches de recherche. La GRC a attendu six mois avant de mettre les photos des jeunes Maisy Odjick et Shannon Alexander dans ses fichiers d’avis de recherche. Dans la région où sont disparues ces jeunes filles, la cavale d’un lionceau a suscité plus d’émoi, de battage médiatique et de battues.

À la suite de la découverte d’ossements de Cédrika Provencher, la SQ déployait plus de 200 policiers pour retrouver ne serait-ce qu’un cheveu de la petite victime. On comprend que la découverte du moindre indice, pouvant mettre derrière les barreaux le monstre responsable de sa disparition, avait le potentiel d’éviter que ce dernier récidive, et que d’autres enfants soient victimes. On comprend aussi que cette démonstration de détermination à l’égard de la petite victime dont la disparition a ému tout le Québec ait pu faire sourciller les proches de femmes autochtones toujours disparues, pour lesquelles moins d’efforts ont été fournis.

Est-il vraiment nécessaire de préciser ici que l’idée n’est évidemment pas de dénoncer l’énergie que nous déployons collectivement dans la recherche de qui que ce soit, ni de culpabiliser les familles des victimes qui font légitimement tout en leur pouvoir pour retrouver un être cher, mais bien de souligner un manque de considération équivalent pour les disparitions de femmes autochtones. S’il n’y a pas de relation causale entre l’énergie déployée pour retrouver des victimes allochtones ou autochtones, il y a certainement dans la comparaison des cas l’illustration d’une sensibilité à deux vitesses. Une solidarité exemplaire a été démontrée pour retrouver Jade Maréchal. Peut-on en faire autant pour les femmes autochtones disparues?

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