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Doit-on avoir peur de l’intelligence artificielle?

double exposure image of virtual human 3dillustration on programming and learning technology Photo: Getty Images/iStockphoto

Grâce au développement fulgurant de l’intelligence artificielle (IA), la vision d’un monde dans lequel les robots remplaceraient les humains ne semble plus si futuriste.

Si on peut se réjouir à l’idée de confier les tâches ennuyantes et mal payées aux robots, beaucoup s’inquiètent de se retrouver au chômage… et même d’être dominés par les machines. Crainte justifiée?

La presse a fait grand cas, en mars 2016, de la victoire du système d’intelligence artificielle de Google sur le champion du monde du jeu de go, un jeu extrêmement complexe. Et pour cause.

«Cela démontre que la machine a une capacité de réflexion profonde, explique Arthur Charpentier, professeur à la Faculté des sciences économiques de l’Université de Rennes, en France. Elle est presque créative, elle peut produire des solutions et des scénarios auxquels un humain ne penserait pas.» Pour la première fois, une machine s’est montrée réellement plus «intelligente» qu’un humain, preuve à l’appui.

Il faut dire que les avancées de l’IA sont impressionnantes : nourri de partitions de Bach, un programme peut désormais composer un récital pour piano si élaboré que les experts sont incapables de le différencier d’une partition composée par un humain. Des voitures sans conducteur sillonnent déjà les routes. Et il y a belle lurette que les robots sont entrés dans les usines.

Faut-il s’en inquiéter? «Si l’intelligence artificielle comprend qu’elle est plus intelligente que l’humain, ça peut être problématique, répond Arthur Charpentier. Si elle veut juste nous aider, ça reste correct, mais ça ne l’est que tant qu’elle est maîtrisée.»

Doina Precup, codirectrice du Reasoning and Learning Lab de l’Université McGill, se fait plus rassurante : «La vision de la communauté de chercheurs est que l’intelligence artificielle devra toujours rester un outil pour l’humain, notamment en l’appuyant dans son travail, comme le font les ordinateurs», explique-t-elle.

Cela dit, a-t-on raison de penser que l’IA nous «volera» nos emplois? Le professeur Arthur Charpentier rappelle que toutes les révolutions technologiques n’ont fait que transférer des emplois d’un champ vers un autre. «Les machines aident à augmenter la productivité, ce qui crée plus de richesse et d’emplois. À la fin des années 1990, on se demandait s’il nous fallait un site web. Maintenant, c’est clair que oui. Personne n’avait imaginé tous les nouveaux emplois qui seraient créés grâce à l’internet, illustre-t-il. De même, on ne sait pas quels emplois créera l’intelligence artificielle.»

«Les machines aident à augmenter la productivité, ce qui crée plus de richesse et d’emplois. […] On ne sait pas [encore] quels emplois créera l’intelligence artificielle.» – Arthur Charpentier,professeur en sciences économiques

Quels emplois sont menacés?

Si l’intelligence artificielle a le potentiel de créer de nouveaux emplois, il n’en demeure pas moins que certains métiers risquent de disparaître… à cause d’elle.

Les métiers les plus menacés sont ceux qui comportent des tâches répétitives, comme les opérateurs de machines et les inspecteurs. La menace est aussi manifeste dans le domaine des transports, qui est en pleine transformation. Un ordinateur muni d’un GPS est bien plus productif qu’un chauffeur sur la route, qui doit prendre des pauses et dormir. En utilisant l’IA pour livrer des marchandises, on accroît la productivité de façon radicale. Le changement est imminent, car la technologie est au point et qu’il ne manque que le feu vert des autorités.

Parmi les métiers en danger, notons également ceux qui requièrent l’analyse d’une information limitée, indique Joëlle Pineau, codirectrice du Reasoning and Learning Lab de l’Université McGill. Elle donne l’exemple des radiologues, qui doivent lire des radiographies pour déceler des anomalies, ce que les machines peuvent déjà faire, parfois même mieux qu’eux.

Les machines remplaceront les radiologues bien avant les urgentologues, qui doivent analyser des informations beaucoup plus complexes, comme celles relatives à l’état d’un patient. L’analyse stratégique demeurant l’apanage des humains, le médecin lui-même a encore de belles années devant lui.

Doina Precup, aussi codirectrice du Reasoning and Learning Lab de l’Université McGill, explique que l’IA est excellente pour prendre en compte de très grands ensembles de données imprécises, comme la carte du ciel en astrophysique. «C’est utile, car les humains n’arrivent pas à comprendre tout ce qui se passe, mais la machine, oui.»

Ainsi, les comptables, les employés d’assurance et les responsables administratifs vont presque certainement disparaître, car l’IA gère mieux les tonnes de chiffres que les humains. Comme ces exemples l’indiquent, «ce ne sont pas nécessairement des emplois au bas de l’échelle salariale qui disparaîtront en premier», fait remarquer Joëlle Pineau.

À l’inverse, les métiers dans le domaine de la relation d’aide, comme les psychologues, sont peu affectés par cette révolution technologique. On n’ira pas de sitôt confier son mal-être à un ordinateur. Ces professions, qui exigent empathie et interactions, peuvent quand même bénéficier de l’appui de l’intelligence artificielle. Par exemple, un professeur peut donner des exercices personnalisés à ses élèves et utiliser l’IA pour analyser les lacunes de chacun.

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