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Homosexualité au travail : encore prudents

Photo: Métro

Encore aujourd’hui, les homosexuels sont moins enclins à révéler leur orientation sexuelle dans leur milieu de travail que dans leur entourage.

Dans une étude parue en 2007, la professeure au département de sexologie de l’UQAM et titulaire de la Chaire de recherche sur l’homophobie Line Chamberland révélait que 70 % d’entre eux s’affichaient devant les collègues de travail, contre 90 % avec la famille et les amis. Six ans plus tard, qu’en est-il?

Est-ce que les homosexuels sont encore discrets?
C’est difficile à dire, mais une enquête sur la satisfaction envers les services de santé et sociaux indique qu’il y a encore un écart, sur le plan de la connaissance de la situation, entre la famille et les amis, d’une part, et les collègues, d’autre part.

Avez-vous l’impression que la situation s’est améliorée?
Je pense que dans les milieux déjà plus ouverts, elle s’est améliorée. Les lois concernant le mariage homosexuel ou l’homoparentalité ont eu un effet. Le message est symbolique – on reconnaît les personnes LGBT –, et les gens se sentent de plus en plus à l’aise d’en parler. Cela dit, je crois qu’il y a des milieux de travail qui demeurent très homophobes. Les milieux où la virilité est valorisée, notamment la construction, n’ont souvent pas bénéficié de sensibilisation. Le vocabulaire qu’on y utilise est d’ailleurs fortement connoté… Il n’est pas rare d’entendre : «Ne prends pas ton marteau comme une tapette.» On peut tout de même dire qu’il y a eu des changements. J’ai connu une époque de censure des CV. On cachait qu’on avait fait du bénévolat pour des organismes LGBT.

Y a-t-il des facteurs qui déterminent la plus ou moins grande ouverture d’un milieu?
L’évolution des perceptions varie selon les secteurs. Ces dernières années, on a vu les banques courtiser cette clientèle. Les caisses Desjardins ont notamment mis des employés LGBT en valeur dans des publicités. D’autres secteurs bougent moins vite. La composition des travailleurs influence cette ouverture. Les milieux de femmes et de relation d’aide, où les compétences d’empathie sont déjà valorisées, sont moins homophobes.

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Pourquoi taire son homosexualité davantage au travail qu’ailleurs?
Ce sont souvent des enjeux de carrière. Dans le secteur de la construction, par exemple, il faut faire partie de la «gang» pour arriver à être placé ou à suivre les filières. Ailleurs, le fait de révéler son homosexualité peut rendre vulnérable à la discrimination indirecte. On peut être exclu des rencontres informelles, une carte jouée insidieusement. D’autres secteurs dans lesquels l’image est importante ne voudront pas qu’une personne efféminée représente l’entreprise. Déclarer son orientation sexuelle nuit alors aux possibilités de promotion. Avant de faire un coming out, les gens évaluent généralement les réactions possibles, les risques, les alliés ou les personnes à éviter. Surtout dans un nouveau milieu de travail ou une nouvelle affectation.

Comment peut-on réagir aux blagues homophobes?
Il n’y a pas de recette. Répondre à l’humour par l’humour peut être une excellente méthode. Ce qui passe en général moins bien, c’est de sermonner ses collègues. Sans être l’éteignoir, on peut faire comprendre plus tard que ce genre d’humour est blessant.

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