Montréal

Fermeture des gyms: on craint des répercussions sur la santé mentale

À peine rouvert, les gyms devront à nouveau fermer leurs portes.

La fermeture des gyms dans les zones rouges de la province pourrait avoir un effet néfaste sur la santé mentale de nombreuses personnes, avancent deux expertes consultées par Métro.

«Dans l’état des connaissances qu’on a sur la COVID-19, la mesure vise essentiellement à protéger notre santé physique. Ceci étant, oui, ça aura des impacts importants sur notre santé mentale», résume d’emblée Isabelle Doré, professeure à l’École de kinésiologie de l’Université de Montréal  et chercheuse au Centre de recherche du CHUM, qui se spécialise dans les questions de sport et de santé mentale.

Pour elle, le décalage entre le passage de Montréal en zone rouge et l’annonce de la fermeture des centres d’entraînement s’expliquerait probablement par une volonté de la Santé publique de maintenir l’offre sportive le plus longtemps possible en raison de ses bienfaits sur la santé physique et mentale.

«L’activité physique entraîne entre autres des bienfaits sur les émotions, le bien-être. Par exemple, ça sécrète de l’endorphine qui a pour effet de diminuer le niveau de stress et d’interrompre les pensées négatives», mentionne Mme Doré.

Lan Anh Phan, consultante en préparation mentale, œuvre notamment auprès d’équipes sportives universitaires et collégiales. Elle comprend également la volonté du gouvernement de vouloir protéger la population, mais s’inquiète des effets pervers que pourrait avoir cette mesure.

«L’annonce de la semaine passée a pu donner un espoir aux gens actifs. Ils ont pu goûter aux bénéfices d’un retour à l’entraînement, avant de se faire enlever cette source de bien-être pour une période indéterminée. Le plus difficile à gérer sera probablement l’incertitude», explique-t-elle.

«Il est impératif que le gouvernement demeure conscient et préoccupé des bénéfices de la pratique d’activité physique sur la santé mentale de la population. Cette préoccupation devra, je l’espère, se refléter dans les décisions prises à la fin octobre.» – Isabelle Doré, professeure à l’École de kinésiologie de l’UdeM et chercheure au Centre de recherche du CHUM

Des groupes vulnérables

Les deux expertes croient que les personnes vivant seules seraient particulièrement vulnérables face à cette fermeture.

«L’activité physique était une occasion de voir d’autres personnes, sans nécessairement socialiser. Le simple fait de sortir de chez soi et de voir des gens avait un effet positif», estime Mme Doré.

D’autant qu’avec la montée du télétravail, les contacts sociaux se font plus rares pour de nombreuses personnes.

«C’est important de communiquer avec des gens de notre entourage pour s’offrir un support mutuel. On peut aussi profiter de l’exception qui permet aux gens seuls de voir une personne», ajoute Mme Phan.

À l’inverse, les personnes qui avaient pris l’habitude de faire de l’activité physique à l’extérieur ou à la maison seraient mieux équipées pour traverser cette période. Les deux spécialistes recommandant de trouver une façon de se maintenir actif, tout en le faisant de manière sécuritaire.

«Il y a des groupes d’activité physique en ligne. Ce n’est pas la même chose que de voir les gens, mais ça peut donner un certain niveau de motivation et de plaisir», suggère Mme Doré.

Elle propose également d’intégrer certaines activités dans la routine quotidienne. Par exemple, pour les télétravailleurs, elle conseille de continuer à marcher le matin comme s’ils se rendaient au bureau.

«Il faut essayer de garder la structure. Si ça ne dure que trois semaines, je crois que c’est possible de rester organisé. Il faut mettre du temps dans notre horaire pour la pratique d’activités physiques et pour prendre soin de soi», souligne Mme Phan.

«Ce n’est rien de nouveau, mais c’est encore plus difficile, parce qu’on sait exactement ce qui s’en vient pour ce qui est du sentiment d’isolation. Ça amène un sentiment de déjà-vu.» – Lan Anh Phan, consultante en préparation mentale

Des gyms atteints

Propriétaire du gym Bio3Fitness, à Rivière-des-Prairies, Dickens Lambert se dit plutôt déçu de l’annonce, bien qu’il la comprenne.

«Je trouve ça très triste, mais c’est pour le bien des gens. Je veux protéger la santé de mes clients, mais eux me disent qu’ils en ont besoin pour leur santé mentale. L’enjeu devient plus grand avec le confinement, qui est déstabilisant émotionnellement», croit l’entraîneur.

Lui-même ne s’inquiète pas outre mesure de l’effet qu’aura la fermeture sur son gym, alors que celui-ci offre d’autres services thérapeutiques qui peuvent être maintenus. Des entraînements en ligne y sont également déjà proposés depuis plusieurs années déjà.

«Ça nous aide, et c’est là qu’on peut s’en sortir. C’est une chance pour nous, mais ce n’est pas tout le monde qui est dans notre situation», relativise-t-il.

Fondateur du Centre sportif Ludus à Saint-Léonard, Pascal Brabant est plutôt inquiet des conséquences que pourrait avoir cette deuxième fermeture forcée. D’autant que la première vague avait fait plutôt mal.

«J’espère qu’il y aura des programmes d’aide. On met en danger beaucoup d’infrastructures sportives dans l’est de Montréal. Il y a déjà une sous-présence de l’offre sportive, comparée au reste de l’île. Ça serait dommage qu’elle soit encore plus réduite», s’inquiète-t-il.

Durant la première fermeture, son centre offrait des entraînements en ligne. Néanmoins, rien n’est encore certain pour la suite des choses.

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