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Crise du logement: un enjeu électoral de poids pour les jeunes

Les jeunes Montréalaises et Montréalais constituent un des premiers groupes touchés par la crise du logement. Dans un avis rendu en 2020, soit avant même que le marché immobilier et l’industrie de la construction ne subissent les conséquences de la pandémie, le Conseil jeunesse de Montréal (CjM) posait que «les enjeux de précarité résidentielle discutés dans cet avis ciblent plus particulièrement les jeunes de 17 à 30 ans».

Tout d’abord, parce qu’ils et elles sont le plus souvent contraints de déménager en centres urbains pour étudier ou travailler. D’autre part, et c’est lié, dit le rapport, «la jeunesse n’a donc accès qu’aux logements locatifs disponibles à un moment précis, ce qui l’affecte grandement en période de crise du logement et de baisse record des taux d’inoccupation».

Finalement, les 16 à 24 ans sont plus vulnérables financièrement. D’après Statistique Canada, le revenu médian des Montréalais de cette catégorie d’âge est de 18 500$ annuels, contre 38 700$ pour l’ensemble des résidents.

Si on avait une volonté politique d’offrir du logement, il y aurait une compétition plus loyale, on aurait un marché plus stable. […] C’est la crise du logement qui fait que les gens acceptent la hausse des loyers, car ils n’ont pas le choix

Yvon Rudolphe, chargé de cours à l’UQAM et spécialiste en immobilier

«D’autres éléments rendent jeunes plus précaires», pointe Alice Miquet, vice-présidente du CjM. «Il y a une méconnaissance des droits et devoirs locatifs, avec des contraintes à l’habitation. Quand on va étudier, on a un moment pour déménager contraint dans le temps, donc ça force à accepter des logements en mauvaise conditions Avec un marché locatif sous pression, le rapport de force est forcément défavorable aux jeunes en particulier.»

Plus de logements abordables?

Dans un communiqué de presse publié la semaine dernière, l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec (APCHQ) rappelait son désir de voir 60 000 logements sortir de terre dans la métropole. Elle recommandait en outre «d’assurer le plein financement des programmes de logements sociaux».

«On a laissé les promoteurs faire l’acquisition de terrains et on n’a pas construit assez de logements. Les moyens étaient là auparavant, sauf que […] les paliers de gouvernement se relancent la balle», analyse le chargé de cours à l’UQAM, et spécialiste en immobilier, Yvon Rudolphe. 

Un constat que partage en partie le CjM. Dans son avis, il identifiait plusieurs solutions parmi lesquelles l’amélioration de la coordination entre les différents paliers de gouvernement. «Il faut intensifier la production de logements sociaux et communautaires pour les jeunes en difficulté», ajoute Mme Miquet. Et si la Ville de Montréal a réussi à atteindre 90 % de sa cible de création de logements abordables fixée en 2018, «le volet social est pour sa part nettement au ralenti», écrit le CjM, avec un avancement de l’ordre de 55 % de sa cible pour 2021.

L’avis du CjM pointait notamment la fluctuation des fonds provinciaux ces dernières années, les blocages autour d’une entente entre Ottawa et Québec, de même que l’arrêt des chantiers de construction en contexte de COVID-19.

«On se rend compte, élection après élection, que le logement est [un thème de campagne] d’une importance capitale», abonde André Castonguay, directeur général du Réseau québécois des OSBL d’habitation (RQOH).

Une politique d’habitation claire

Tout comme le recommandait le Conseil jeunesse de Montréal, il fixe comme priorité d’investir dans le patrimoine bâti communautaire. «C’est toute une vision de l’habitation qui faut changer au Québec», complète M.Castonguay. Et ce dernier d’avancer un minimum de 5000 logements sociaux et communautaires à créer chaque année.

«C’est pas exagéré. Ça peut être beaucoup plus. […] On souhaite que les candidats s’engagent à avoir une politique d’habitation claire. C’est important qu’on soit capable de planifier et prévoir le logement social et communautaire.»

Construire plus de logements, c’est aussi une demande de la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec (CORPIQ). En entrevue avec Métro, son directeur Marc-André Plante le répète à son tour: «il faut construire plus de logements». Afin de rééquilibrer le marché locatif, elle recommande de créer 620 000 unités de plus que prévu dans un horizon de 10 ans, avec des logements sociaux ou coopératifs, notamment. Tout comme M.Castonguay, M.Plante demande aussi «un plan d’ensemble au niveau de l’habitation» au prochain gouvernement.

Interrogé sur la part des hausses de loyers abusives dans la crise du logement, le directeur de la CORPIQ croit que le phénomène est très marginal, et que la hausse suit de près celle de l’inflation.

«Les données de la Société canadienne d’hypothèques et du logement (SCHL) disent qu’au Québec, dans la dernière année, les loyers ont cru de 3.4%. L’inflation touche tous les secteurs, l’habitation est affectée aussi. Les propriétaires sont pas sur une île déserte, ça coute plus cher d’entretenir les bâtiments, les corps de métiers sont de plus en plus rares… La crise affecte aussi les propriétaires», fait-il valoir.

Une élection, des propositions

Le constat semble unanime: pour résorber la crise du logement, il va falloir construire. On peut aussi «étudier le potentiel de sous-occupation des terrains vacants qui pourraient être revalorisés. Ces bâtiments vacants sont opportunité pour du logement abordable», précise Alice Miquet.

Tous interrogés sur les mesures qu’ils prendraient en cas d’élection, seuls Québec solidaire (QS) et le Parti québécois (PQ) avaient répondu aux sollicitations de Métro.

QS promet de construire 50 000 nouveaux logements sociaux en 5 ans s’il était porté au pouvoir. «Seul le logement social, sous toutes ses formes, permet de garantir une abordabilité perpétuelle», insiste un attaché de presse auprès de Métro. Précisons que le parti est également favorable à un blocage des hausses de loyers.

Et comme les solidaires, le PQ est partisan de la transformation de bâtiments publics non utilisés en logements sociaux et communautaires. Un gouvernement péquiste construirait en outre 2000 logements étudiants par an pour les 5 prochaines années. Le parti propose aussi l’adoption d’un registre national des loyers.

Dans sa plateforme électorale, le Parti libéral s’engage à construire, lui, 50 000 logements, sur 10 ans. Il est d’ailleurs le seul parti à proposer la décontamination de terrains pour y implanter des logements abordables. La Coalition avenir Québec (CAQ), promettait de son côté 11 700 logements sociaux et abordables. Elle s’est néanmoins fait reprocher par des organismes de n’avoir réalisé que 4328 logements sociaux sur les 15 000 promis en début de mandat.

Refusant de financer la création de nouveaux logements sociaux et abordables, un gouvernement conservateur s’opposerait à la tenue d’un registre des baux, soustrairait les loyers élevés du contrôle des loyers et abolirait le recours à la révision de ce dernier, entre autres. Pour stimuler l’industrie de la construction, le PCQ mise sur l’assouplissement de la réglementation.

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