Il est difficile de sortir les jeunes des filets de l’exploitation sexuelle, mais en offrant des services qui «répondent à tous leurs besoins», il est possible d’y arriver. C’est ce que tentera d’accomplir un projet pilote lancé aujourd’hui, baptisé Sphères.
«C’est très difficile d’amorcer un changement quand on est pris dans un milieu d’exploitation sexuelle», résume René-André Brisebois, praticien-chercheur à l’institut universitaire Jeunes en difficulté du Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux (CIUSSS) du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal et porte-
parole du projet Sphères.
C’est donc pour pallier certaines «lacunes dans les services actuels» que les deux centres jeunesse de Montréal, les organismes L’Anonyme et En marge 12-17, de même que le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), ont décidé de faire équipe pour venir en aide aux jeunes de 12 à 24 ans. «Ce sont des jeunes qui sont déjà pris avec des problèmes d’exploitation et qui ont un certain intérêt à apporter des changements dans leur vie», indique M. Brisebois.
«Quand on n’est pas en mesure d’accompagner les jeunes dans tous les aspects de leur vie, ils sont susceptibles de retourner soit avec leur proxénète, soit dans la situation d’exploitation dans laquelle ils étaient.» – René-André Brisebois, praticien-chercheur à l’institut universitaire Jeunes en difficulté du CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal
Sphères a pour but de venir en aide à environ 150 jeunes. Ainsi, le suivi pourrait être maintenu pendant cinq ans, soit la durée totale du projet pilote.
«On va aborder plusieurs aspects, pas seulement la prostitution de rue. Il y a d’autres activités prostitutionnelles», illustre Shanda Jolette, coordonnatrice du programme d’éducation sexuelle à L’Anonyme. Elle cite aussi le partage d’images intimes et l’utilisation des réseaux sociaux, qui seront des thèmes abordés dans les ateliers avec les jeunes.
C’est dans cet esprit qu’il est essentiel d’arrimer les services. «Les jeunes vont fréquenter les organismes communautaires et développer un lien de confiance, dit-elle. Là, on va pouvoir faire le lien avec des ressources institutionnelles.»
Même s’il y aura un côté plus institutionnel dans ce projet qui implique deux CIUSSS et le SPVM, René-André Brisebois insiste pour dire que tout sera fait «avec le consentement des jeunes et avec une attitude de non-jugement». «Pour le SPVM, on travaille surtout avec le projet “Les Survivantes”, qui permet de rencontrer une survivante pour faire de la prévention. Ce n’est pas dans une optique de répression ou pour essayer d’attraper des proxénètes», souligne-t-il.
L’ultime but de Sphères est de permettre de mieux organiser l’entièreté des services pour les personnes victimes d’exploitation sexuelle.