Montréal

Faute de logement, des demandeurs d’asile forcés de quitter Montréal

L’arrivée massive de demandeurs d’asile à Montréal exerce une pression telle sur la disponibilité du logement que, depuis juin dernier, Immigration Canada oblige ceux qui n’arrivent pas à fournir une adresse au Québec à aller s’installer ailleurs au pays. Avec près de 100 000 personnes de plus, entre 2017 et 2022, la métropole arrive à saturation en matière d’habitation.

Depuis six mois environ, le gouvernement du Canada transfère un certain nombre de demandeurs d’asile du Québec à Ottawa (293), à Niagara Falls (1486), et à Cornwall (720), en Ontario. Si Ottawa affirme que tout se fait avec l’accord des réfugiés, ces derniers soutiennent le contraire.

C’est le cas de Dieumaître François, qui a franchi la frontière en mai 2022. Ce dernier s’est réveillé à Niagara Falls avec sa femme et son enfant, alors que sa destination était Montréal. «Un agent des services frontaliers est venu nous souhaiter bon voyage en nous annonçant qu’on s’en allait dans une autre ville», raconte le demandeur d’asile.

Arrivée, avec ses trois enfants, au cours de la même période que M. François, Célimène André, une femme monoparentale, a échappé de justesse à un transfert vers Toronto. «En pleine nuit, on est venu me dire que je devais faire mes bagages, raconte la dame, en entrevue à Métro. C’est grâce à un ami qui a signé un bail à ma place in extremis qu’on ne m’a pas forcée à partir.»

Au total, ce sont près de 2500 personnes qui ont dû quitter le Québec depuis juin. Et, selon Immigration Canada, «les transferts se font sur une base volontaire». «Les demandeurs d’asile, qui ont manifesté un intérêt à aller en Ontario (ou plus à l’ouest) sont contactés par des fournisseurs de services, sous contrat avec Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC)», affirme le porte-parole de l’IRCC, Rémi Larivière, dans un courriel adressé à Métro.

Selon lui, ces déménagements «volontaires» sont temporaires dans certains cas. Le but serait de «libérer de l’espace dans [les] sites d’hébergement temporaire au Québec», indique IRCC. Son porte-parole précise que les demandeurs qui souhaitent demeurer au Québec «y reviendront dès que de l’hébergement sera disponible».

Or, la crise du logement fait rage dans la province. L’Office municipal d’habitation de Montréal (OMHM) fait déjà face à une liste d’attente de 23 784 ménages et les demandeurs d’asile ne sont même pas admissibles à un appartement subventionné.

«Pour faire une demande de logement subventionné, la personne doit être entre autres citoyen canadien ou résident permanent, et résider au Québec. Elle doit avoir habité la Communauté métropolitaine de Montréal au moins 12 mois», rappelle le directeur du Service des communications de l’OMHM, Mathieu Vachon.

Au total, 34 478 demandeurs d’asile, dont une majorité d’Haïtiens, sont entrés de façon irrégulière au Québec de janvier à novembre 2022, avec pour destination Montréal.

La vague de réfugiés, qui arrivent des États-Unis à la frontière canadienne, a débuté en 2017 et représente 95 252 personnes aujourd’hui. En entrevue à Radio-Canada, le premier ministre Justin Trudeau a affirmé qu’il serait prêt à bientôt «refouler» les migrants qui tenteraient de passer la frontière par le chemin Roxham. Selon lui, une modification de l’Entente sur les tiers pays sûrs (ETPS) «s’en vient», avec les États-Unis.  

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