L’arrondissement de Rosemont–La Petite-Patrie méritera certainement cet été le titre de chef de file de l’agriculture urbaine montréalaise. Le parc du Pélican utilisera des moutons pour tondre la pelouse alors que la place Shamrock abritera des conteneurs combinant élevage de poissons et potager. Aperçu de deux projets porteurs de sens.
Deux Montréalais présenteront cet été un projet de ferme où l’élevage des poissons permettra d’irriguer les plantations de fruits et légumes.
Les deux conteneurs du projet ÉAU (Écosystèmes alimentaires urbains) seront visitables d’ici la fin du mois de mai à la place Shamrock, dans l’arrondissement de Rosemont–La Petite-Patrie, et pour tout l’été. Il s’agit de deux conteneurs superposés où les locataires du rez-de-chaussée seront 300 perchaudes. L’eau de leurs bassins sera pompée à l’étage supérieur pour irriguer quelques 350 plants de fruits et légumes issus de semences du patrimoine agricole du Québec.
«Comme l’eau est riche en micro et macro-nutriments à cause des rejets des poissons, il n’y a pas besoin d’ajouter d’engrais ou de pesticides. Puis, l’eau en recirculant dans le système est filtrée plus efficacement par les plantes que si elle avait été nettoyée par un filtre industriel, ne produisant ainsi aucun rejet: c’est ça l’aquaponie», lance Oliver Demers-Dubé, l’un des deux fondateurs d’ÉAU.
«À l’étage, on a décidé de valoriser la richesse du patrimoine agricole. Alors en plus du choux frisé, du basilic, des fraises, de la moutarde ou du cresson d’eau, on fera notamment pousser de la tétragone cornue ou la ficoïde glaciale», ajoute Émilie Nollet, cofondatrice d’ÉAU. Elle ajoute qu’à leur connaissance, ce sera «le premier système commercial d’aquaponie à utiliser un poisson tel que la perchaude».
«Les conteneurs installés dans Rosemont, ce sera surtout pour faire de la démonstration et de l’éducation. Il y aura notamment plusieurs ateliers thématiques autour de l’agriculture urbaine», soulignent Olivier et Émilie, qui investiront 50 000$ dans le projet.
À terme, ils souhaitent participer au développement de serres aquaponiques plus grandes et plus rentables qui seraient implantées dans des déserts alimentaires, en partenariat avec des organismes locaux. Elles pourraient aussi servir à alimenter des restaurants.
Cette fois-ci ça devrait être la bonne: le parc du Pélican, dans le Vieux-Rosemont, devrait accueillir 14 agneaux et agnelles de la Ferme gastronomique chez Anouk pendant le mois de juillet, l’arrondissement ayant confirmé son intérêt. «Le financement va plus que bon train, nous avons établi un partenariat avec Terra Perma qui réalisera la bergerie. Il ne reste plus qu’à lancer et réussir notre campagne de socio-financement au début du mois de mai», lance Marie-Ève Julien-Denis qui pilote le projet Biquette à Montréal, dont le slogan est: pâturer, éduquer, égayer.
Avis aux anges investisseurs, les promoteurs du projet proposeront notamment du compost de mouton aux généreux donateurs qui auront contribué sur la plateforme La Ruche, un nouvelle plateforme locale de sociofinancement. La somme doit notamment permettre de financer un enclos mobile et des ateliers d’éducation populaire.
Par contre, ils ne pourront pas offrir du fromage «Made in Montréal» pour des raisons règlementaires. «Cette année, on garde la projet simple, mais si ça marche, on compte être présent plus longtemps l’été prochain et on pourrait produire le fromage du 375e de Montréal», ajoute la jeune femme qui s’est déjà impliquée il y a quelques années dans le projet de chèvres urbaines dans une ville de 90 000 habitants du nord de la France.
Si ces deux projets se concrétisent tous deux dans Rosemont–La Petite-Patrie c’est notamment parce l’arrondissement a enlevé «tous les freins financiers et administratifs aux projets d’agriculture urbaine dans plusieurs zones industrielles et commerciales de l’arrondissement», affirme le maire François Croteau.
Avant que la règlementation soit assouplie, il fallait déposer pour un tel projet: une demande de dérogation, obtenir l’aval du comité consultatif d’urbanisme, passer par trois périodes de lecture dans autant de séances du conseil d’arrondissement en plus de payer des frais de permis s’élevant à plusieurs milliers de dollars. «Aujourd’hui, les coûts sont 50 fois moins élevés et le processus est beaucoup plus simple et rapide», se félicite M. Croteau qui espère ensuite voir des projets d’agriculture industrielle se concrétiser dans son arrondissement.