OTTAWA — Les chefs de police canadiens réclament une loi pour contraindre les gens à révéler leurs mots de passe aux forces de l’ordre s’ils ont obtenu l’approbation d’un juge.
L’Association canadienne des chefs de police (ACCP) a adopté une résolution incitant le gouvernement à prendre des mesures législatives pour faciliter l’obtention de preuves électroniques. L’ACCP estime que les criminels ont de plus en plus recours au chiffrement pour dissimuler leurs activités illicites en ligne.
Le commissaire adjoint de la Gendarmerie royale du Canada (GRC), Joe Oliver, a déclaré qu’aucune loi canadienne ne contraignait actuellement le détenteur d’un mot de passe à le révéler aux policiers dans le cadre d’une enquête.
Lors d’une conférence de presse mardi, M. Oliver a soutenu que les criminels, qu’ils soient membres de la mafia ou pédophiles, bénéficient d’un anonymat quasi absolu grâce à des outils en ligne qui camouflent leur identité, de même que leurs communications.
«Les victimes dans l’espace numérique sont réelles, a rappelé M. Oliver. Les lois du Canada et sa capacité à maintenir l’ordre doivent suivre le rythme de l’évolution technologique.»
Cette résolution de l’ACCP survient alors que le gouvernement fédéral entame ses consultations en matière de cybersécurité, notamment par rapport à l’équilibre entre les besoins des policiers et les libertés fondamentales. Ces consultations se poursuivront jusqu’au 15 octobre.
Au cours des dernières années, les demandes de policiers quant à l’accès aux communications en ligne ont attisé les tensions entre les autorités et les défenseurs des libertés civiles préoccupés par le droit à la vie privée.
L’enjeu a ressurgi, l’an dernier, lorsque le bureau fédéral d’enquête des États-Unis (FBI) est allé devant la cour pour obtenir le mot de passe du cellulaire d’un présumé terroriste, dans la foulée de la tuerie de San Bernardino, en Californie.
Le commissaire adjoint Joe Oliver affirme que les policiers du pays cherchent à obtenir plus aisément des informations de base sur les abonnés de services de télécommunications, dont leur nom et leur adresse, pour démarrer les enquêtes.
En juin 2014, la Cour suprême du Canada a statué que l’autorisation d’un juge est nécessaire à l’obtention de données personnelles auprès d’un fournisseur Internet.
Le plus haut tribunal au pays a rejeté l’idée que la loi fédérale sur la vie privée permettait aux entreprises de révéler, de leur propre chef, des informations relatives à l’identité de leurs clients.
Les policiers soutiennent que les entreprises de télécommunications ainsi que d’autres fournisseurs de services, telles les banques ou les agences de location, exigent dorénavant un mandat de perquisition pour pratiquement toutes les demandes d’informations de base sur une personne.