Encore une chronique sur le même sujet. Vous êtes tannés? Moi aussi, je vous l’assure. Tanné mais aussi un peu beaucoup ébranlé. Faut dire que je n’aime décidément pas ce que je vois. Ni ce que j’entends. Les manifs qui dégénèrent m’écœurent, et l’intolérance grandissante qui se glisse dans le discours des différents camps me fait capoter. C’est pas chez nous, ça? Dites-moi que c’est pas nous autres? Je ne m’y retrouve plus et ne reconnais plus rien. Ni ma ville ni mon monde. Quand ça sera fini, j’ai le sale sentiment que rien ne sera plus jamais pareil…
Aux infos en direct à la télé samedi soir, j’ai vu des cohortes de la Sûreté du Québec parader sur Sainte-Catherine. Et des manifestants survoltés prêts à se battre à mains nues. Au milieu de ces lignes à haute tension, les inévitables «party-animals» bien paquetés de la rue Crescent se faufilaient en titubant. Accompagnés par une poignée de touristes qui ne semblaient pas comprendre à quoi ils s’exposaient. Surréaliste. Dans le centre-ville de ma ville, il fallait avoir un agent de police posté tous les trois pieds. Et ça, je ne l’admettrai jamais.
Comme il est inadmissi-ble que Jacques Villeneuve reçoive des menaces de mort. Comme il est inadmissible qu’un humoriste de la nouvelle vague suggère, tel qu’on l’a entendu la semaine dernière au micro de Paul Arcand, que les médias cessent de donner le micro à Gilbert Rozon, qui avait commis l’impair de ne pas penser comme lui. Dans la société dans laquelle j’ai grandi, tous ont acquis à la naissance le droit de s’exprimer sans réserve. Qu’on soit d’accord ou non avec Villeneuve, Rozon et les autres preneurs de parole de la gauche, de la droite, d’en bas, d’en haut, qu’ils soient riches ou cassés comme des clous, c’est pareil. Qu’on ait envie d’en faire taire juste un seul me donne la nausée. Même dans la discorde totale, il faut se battre pour que même notre pire ennemi puisse conserver le droit de s’exprimer. Quand on souhaite qu’un adversaire soit réduit au silence, c’est qu’on est prêt à mettre sa propre liberté de parole en péril.
Je sentais bien qu’il y avait une braise de mécontentement qui couvait. Une brûlure latente qui ne partait pas. Mais jamais, jamais je n’aurais cru que nous étions porteurs d’autant d’intolérance et de violence dans le verbe. Cinquante ans après la Révolution tranquille, je n’aurais jamais cru avoir à vivre avec du «Toé, ta yeule!», comme Duplessis en donnait dans ce Québec qu’on croyait disparu pour de bon et pour le mieux. Jamais. Les temps changent mal. Je me permets de le dire.
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Une autre belle page du super service à la clientèle de Bell… Ma ligne domestique est morte vendredi. Pour réparer ça, un technicien était supposé se pointer chez nous dimanche matin, entre 8 h et midi. À 12 h 10, le gars n’était toujours pas venu. J’ai donc appelé le service pour savoir ce qui se passait. On m’a répondu : «On a appelé chez vous plus tôt, mais, puisqu’il n’y avait pas de réponse, on n’a pas envoyé de technicien.»
Ma réponse : «Madame, le téléphone a jamais sonné, ma ligne est en d-é-r-a-n-g-e-m-e-n-t.» Constat de la préposée : «Ouais, ça a ben d’l’allure, dans le fond…»
Rien à ajouter…
Les opinions exprimées dans cette tribune ne sont pas nécessairement celles de Métro.