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Femmes en TI au Québec: peu de sexisme, mais peu de mains tendues

Bien que les femmes qui travaillent dans le milieu des technologies de l’information au Québec ne vivent pas tant de sexisme, il existe peu de modèles féminins dans la haute direction des entreprises y oeuvrant. C’est ce qui ressort des résultats préliminaires d’une étude sur la place des femmes dans les entreprises de technologies de l’information et des communications (TIC) au Québec, divulguée mercredi soir, par la chercheuse Carol-Anne Gauthier.

L’étude, menée par TECHNOCompétences, organisme qui veut faire du Québec un chef de file mondial en technologies de l’information et des communications par la qualité de sa main-d’œuvre, en collaboration avec la Chaire Claire-Bonenfant de l’Université Laval, est de nature qualitative et non quantitative. En effet, la chercheuse a décidé de se concentrer sur trois organisations, dont les noms n’ont pas été divulgués, mais qui sont dans le domaine du jeu vidéo, de la production de logiciels et du service-conseil. Le but était de documenter les facteurs et les dynamiques personnelles, organisationnelles et sociales qui influencent la place faite aux femmes dans les postes de cadres et les postes-clés de ces trois grandes organisations. Des entrevues individuelles ont été menées.

Un constat de départ: les femmes représentent seulement 18% des diplômés en 2013 au Baccalauréat en informatique au Québec (données du ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur). C’est environ ce même chiffre que l’on retrouve dans les entreprises (selon un diagnostic de TECHNOCompétences) en 2015.

Beaucoup de littératures anglo-saxonne donne une impression très négative de la place de la femme en TI. L’information ne connaissant pas de frontières, les scandales sexistes de la Silicon Valley nous parviennent facilement et pourtant, San Francisco n’est pas Montréal. Carole-Anne Gauthier soupçonnait que la situation n’était pas aussi mauvaise chez nous et c’est effectivement vrai. «Le congé parental n’est pas au bon vouloir des entreprises, c’est dans la loi. Le plafond de verre est également plus haut au Québec qu’aux États-Unis. Ici, les hommes ont l’habitude de travailler avec des femmes et la relation est beaucoup plus saine.».

Parler des scandales américains m’a toujours semblé à double tranchant. Et s’ils contribuaient à dissuader nos jeunes filles de se lancer en STIM?

Aucune organisation ne se croit discriminatoire, mais il reste qu’elles le sont, comme l’explique Madame Gauthier: «Les entreprises ont souvent un même modèle qui n’a pas évolué en 40 ans. Au coeur du problème, il y a la pensée que si on veut progresser au sein d’une organisation, il faut s’y engager à 100%. Mais il y a 40 ans, il y avait quelqu’un pour s’occuper des enfants. On a beau dire qu’à performance égale, les femmes et les hommes ont des résultats égaux, mais ce n’est pas ce qui se passe.»

Voilà les grandes conclusions découlant de l’étude:

1. Ce sont des industries relativement jeunes avec des opportunités de progression où il y a la possibilité de recevoir de la formation, où il est possible de se réorienter et dont la culture entrepreneuriale valorise la prise d’initiatives et l’innovation. «La prise d’initiatives et de risques ne favorise pas les femmes. En effet, on a tendance à les éduquer en leur disant de « faire attention » plutôt que de foncer», explique la chercheuse.

2. La flexibilité des horaires permet la conciliation famille-travail.
La gestion de la vie familiale reste le domaine de la femme, même en 2017 au Québec. Si une jeune femme décide d’avoir des enfants et prendre un an de congé maternité, elle ne progressera pas aussi rapidement dans les échelons hiérarchiques que le père.

3. Il existe du «coaching» et du mentorat au sein des organisations, mais les processus d’accessibilité ne sont pas clairs.
«Les hommes qui mentorent (sic) ont tendance à le faire auprès d’hommes qui leur ressemblent. On a tous un biais inconscient. Les femmes sont très bonnes lorsque les règles sont claires, c’est pour ça qu’elles excellent à lécole, mais elles sont un peu plus perdues au sein de l’entreprise, d’où le rôle essentiel des mentors pour les guider», décrit la chercheuse de l’étude.

4. Il y a peu de sexisme vis-à-vis des collègues de travail. Le climat de travail est généralement positif favorisant la collaboration.
Cependant, Mme Gauthier a souvent constaté pendant ses entrevues des femmes qui ont besoin qu’on leur dise qu’elles sont capables et qu’elles sont bonnes sinon elles ne se voient pas dans ces hauts postes de direction.

5. Les formations sont encouragées, mais elles restent à l’initiative des employés.
«Toutes les femmes qui se trouvent dans les postes élevés de l’organisation ont eu des «coachs» et des mentors qui leur ont appris les règles du jeu», confie la chercheuse.

6. Il y a peu de modèles féminins dans la haute direction et celles qui s’y trouvent sont perçues comme ayant un profil dit masculin.
«Le monde des affaires est un monde d’hommes avec leurs règles. Si on veut s’y hisser, il faut utiliser les techniques des hommes», indique Carol-Anne Gauthier.

7. Plusieurs femmes doutent de l’équité salariale même si l’organisation a un discours public d’inclusion.

Afin de terminer sur une note positive, sachez que les organisations interrogées ont toutes dit qu’à compétences égales, un CV de femme était toujours privilégiée par rapport à celui d’un homme. Vu la rareté des candidatures féminines, vous avez beaucoup de chances, mesdames, d’obtenir le poste souhaité!

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