Le maire de l’arrondissement du Plateau-Mont-Royal, Luc Ferrandez, est un être qui me fascine et m’exaspère de manière égale. Élu en 2009, il nous a rappelé ce qu’on avait tous oublié, à savoir qu’un candidat pouvait aussi mettre en œuvre ce qu’il s’était engagé à faire s’il remportait une élection. Depuis le temps qu’on votait simplement pour avoir du changement, la leçon a eu de quoi nous surprendre. Ça nous apprendra. Et pour apprendre, on apprend…
Communicateur efficace, pour ne pas dire exceptionnel, il mène un combat obstiné contre tous ceux qui possèdent un véhicule à moteur et qui auraient le sombre dessein de s’approcher de son arrondissement. Comme si la victoire dans cette lutte à finir était conditionnellement liée à son succès en politique. Changez quelques lettres au mot «obstiné» et vous obtiendrez, sans trop d’effort, le mot «obsédé»…
Ici même, la semaine passée, on parlait des immenses bacs terreux qui font maintenant partie du paysage sur la rue Rachel pour compliquer la vie des méchants propriétaires de chars. Une fixation, je vous le dis. Le maire Ferrandez l’a déjà clairement exprimé en entrevue, «des autos sur le Plateau, on n’en veut pas!» Aux autres, la langue de bois. Là aussi, il se distingue clairement du reste de la classe politique habituelle.
C’est cette même authenticité (!) qui m’a fait tomber sur le cul la semaine dernière alors qu’il accordait une entrevue à Paul Arcand. Parlant de l’unification des deux terrains du parc Baldwin, de l’élimination d’un segment de la rue Marie-Anne et, bien évidemment, des 50 places de stationnement qui s’y trouvaient, le maire a poussé une bien drôle de réflexion quand on l’a interrogé sur une consultation populaire qui n’avait jamais eu lieu avant de procéder à ce nouvel aménagement. «Moi, j’ai pas envie de consulter pour enlever des places de stationnement parce que, quand tu fais ça, d’la consultation, tu peux être certain du résultat : tu vas juste recevoir des tomates pis des œufs pourris dans face!» Bang! Relisez la phrase, c’est exactement ce qu’il a dit. Il a même ajouté : «… les consultations, on les fait quand on est prêt à changer d’idée.» Beau portrait… En d’autres terme : on ne commencera pas à s’enfarger dans ceux qui pensent autrement. Venant d’un élu mandaté qui «foxe» les assemblées du Conseil municipal en prétextant qu’il est impossible de s’y faire entendre sérieusement, voilà qui semble assez paradoxal.
À la fin de l’entretien, le maire s’est quand même voulu rassurant. Le monde sera consulté quand viendra le temps de choisir ce qu’on installera dans la nouvelle incarnation du parc. À savoir, une nouvelle série de balançoires, une allée botanique ou une scène qui permettra aux talents émergents de
se faire voir et entendre… Big deal.
En agissant ainsi, Luc Ferrandez me rappelle en tous points les méthodes employées par Stephen Harper à Ottawa. Lui aussi n’est pas très porté sur la consultation. Et, comme le PM du Canada, le maire du Plateau entreprend des projets comme si tout ce qui existait avant son arrivée était une erreur qu’il fallait effacer à jamais. Quitte à tout démolir pour réparer ce qui n’était pas brisé.
Quand même troublant. Harper et Ferrandez. Deux hommes que rien ne devrait rapprocher. L’un clairement niché à droite et l’autre qui, de prime abord, semble plutôt porter à gauche. Mais deux hommes réunis par leur idéalisme et leur intransigeance. Deux cousins éloignés. Et pourtant si près…