Le nombre de voitures qui circulent dans les rues a diminué drastiquement au cours des derniers mois. Cette conséquence directe de la crise de la pandémie de coronavirus sur l’écologie a permis de réduire de façon concrète nos émissions de gaz à effet de serre et ce, à l’échelle planétaire. Mais ça ne suffira pas pour atteindre les cibles de réduction des GES, préviennent des experts.
Selon des données compilées à la fin du mois d’avril par l’Agence internationale de l’énergie, la demande totale en énergie dans le monde a chuté d’environ 4% au cours des trois premiers mois de l’année, en comparaison à la même période en 2019. Cette situation, reliée principalement aux mesures de confinement prises par de nombreux pays, a généré une réduction d’environ 5% des émissions de GES pendant cette même période.
Une étude publiée à la mi-mai dans la revue Nature fait aussi état d’une réduction de 17% des émissions de GES dans le monde depuis le début de la pandémie, principalement en raison de la baisse des besoins en matière de transport. Au Canada, ce pourcentage grimpe à 20%.
Des réductions temporaires?
Ces données peuvent paraître encourageantes du point de vue de la lutte contre les changements climatiques. Or, les répercussions du confinement sur les habitudes de déplacements des citoyens sont temporaires. En 2008, les émissions de GES avaient aussi diminué en raison de la crise économique. Elles ont ensuite remonté rapidement dans les années suivantes.
«Ce qu’on craint, c’est que ce soit seulement des réductions temporaires», souligne le responsable de la campagne Climat-Énergie de Greenpeace, Patrick Bonin.
«Il y a moyen de changer les habitudes. On peut miser sur le télétravail ou opter pour les pistes cyclables plutôt que la voiture. C’est ce qu’on voit un peu partout dans le monde, dont à Montréal.» Patrick Bonin, responsable de la campagne Climat-Énergie de Greenpeace
Selon un récent sondage CROP mené pour le compte de Métro, plusieurs utilisateurs du transport en commun à Montréal envisagent de migrer vers la voiture, alors que la métropole procède à son déconfinement progressif. Une situation qui s’explique notamment par le désir de nombreux Montréalais de respecter les règles de distanciation physique. Ces règles ont contribué dans les derniers mois à une chute de 80 à 90% de l’achalandage du transport en commun dans le Grand Montréal.
«C’est sûr que c’est inquiétant. On ne veut pas reculer sur les quelques gains qu’on a faits dans les dernières années. Il faut que les gouvernements continuent d’investir dans la création de nouveaux projets pour qu’on ait un transport collectif plus compétitif à l’auto-solo», soulève M. Bonin. Ce dernier croit d’ailleurs qu’il faudra continuer de recommander le port du masque dans le métro, voire l’obliger si nécessaire, afin que ses usagers s’y sentent en sécurité.
Changer les habitudes
Le professeur titulaire de la Chaire de gestion du secteur de l’énergie à HEC Montréal, Pierre-Olivier Pineau, estime pour sa part qu’il faudra s’attaquer aux émissions de GES provenant du transport de marchandises, qui se fait en bonne partie par camion au Canada.
Patrick Bonin voit quant à lui d’un bon œil la tendance grandissante vers l’utilisation des modes de transports actifs, comme la marche et le vélo, à Montréal comme ailleurs. Le 15 mai, l’administration de Valérie Plante a d’ailleurs dévoilé son Plan de déplacements estival.