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Racisme médical: des victimes témoignent

Candice Fuego entend poursuivre un hôpital montréalais pour racisme médical.

Consultante en ressources humaines, Candice Fuego a consulté au moins huit médecins pour une douleur insupportable au cou. Cinq lui ont établi un diagnostic mettant en cause ses volumes mammaires, alors trois autres disaient déceler des problèmes de sciatique, au niveau des lombaires.

Mais en réalité et en fin de compte, le cas de Mme Fuego serait d’ordre ostéopathique et pourrait être réglé par de l’acuponcture, ce qu’elle fait actuellement. Avant cela, Candice Fuego a dû se soumettre aux recommandations des médecins et subir une opération de la poitrine.

«Pourtant, mes seins n’étaient pas super gros comparés à d’autres personnes», note la jeune femme en entrevue avec Métro, lors d’une activité de la Clinique juridique de Saint-Michel (CJSM) sur le «Racisme médical» dans le système québécois de la santé.

L’opération qui s’est mal déroulée. Mme Fuego s’est retrouvée avec une ouverture béante à la poitrine à la suite de l’intervention. Et en consultant son dossier médical, Candice Fuego affirme que le personnel médical de cet hôpital montréalais a fait usage de faux, et qu’elle n’a pas été bien traitée.

Fiche médicale falsifiée?

Ne pourrait-il pas s’agir d’erreurs médicales ou bien d’incompétence dans son cas? «Non», répond la jeune femme sans broncher.

«Je connais et j’ai rencontré d’autres personnes blanches ayant subi la même opération que moi. On leur a donné une feuille de préparation deux semaines avant. Moi on ne m’a rien donné, on ne m’a pas dit quoi manger avant et après», répond la plaignante. Elle précise que sa fiche médicale mentionne qu’elle a effectué un test sanguin avant l’intervention, ce que Mme Fuego nie avoir subi.

«C’est faux!, s’exclame-t-elle. Ils ont falsifié les informations de ma fiche médicale.» La consultante dit avoir été à l’hôpital afin de demander pourquoi elle n’a pas fait de test sanguin et obtenu une feuille de préparation.

Poursuite en préparation

«On m’a répondu que c’est peut-être un oubli. Mais moi je ne crois pas», tranche celle qui entend porter plainte contre le centre hospitalier. «Je vais les poursuivre, notamment cette chirurgienne, c’est primordial pour moi».

La chirurgienne en question, du même hôpital, l’a opérée pour une tendinite à la main gauche, un autre diagnostic lié à sa douleur au cou. «Elle a commencé par m’injecter une aiguille avec une pression tellement forte que j’ai crié et pleuré de douleurs. Tout l’hôpital a entendu», raconte Mme Fuego.

Elle m’a crié dessus en disant : arrête de crier, arrête de crier et elle m’a frappée. C’est l’anesthésiste qui l’assistait qui essuyait mes larmes.

Candice Fuego, consultante en ressources humaines

Vendredi soir, la CJSM a présenté les résultats préliminaires de ses recherches sur le racisme médical à la Tohu. La cérémonie était agrémentée d’une exposition de photos et de témoignages de huit victimes.

«Il fallait que j’aille chercher du papier-mouchoir»

Le président de la CJSM, l’avocat Fernando Belton, a parlé d’un projet très difficile à réaliser en raison du manque de volonté des victimes de témoigner. «Les traumas sont encore trop importants», observe l’homme de loi. «Dans certaines des séances, j’entendais des gens pleurer et il fallait que j’aille chercher du papier-mouchoir».

Plusieurs personnalités, notamment des députés du Parti libéral du Québec (PLQ) et de Québec solidaire (QS) y ont pris part. La directrice générale de l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ), Marie-Claire Richer, avait également tenu à être présente.

On est conscient de l’importance de ça et on a un groupe d’experts qui va se mettre en place très bientôt pour se pencher sur les recommandations de notre Énoncé sur le racisme systémique.

Marie-Claire Richer, directrice générale de l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec

«C’était plus sur les Premières Nations, mais, pour moi, cela englobe toutes les personnes racisées. Les infirmières ont des biais conscients et inconscients aussi», admet-elle.

Les communautés autochtones sont moins enclines à témoigner du racisme médical, constate la CJSM. «Beaucoup dépendent du système de santé et ont peur de représailles», fait remarquer la coordonnatrice du projet, Wafaa Ghlamallah. La Clinique se dit en réflexion présentement pour savoir comment aborder la question avec les Premières Nations.

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