Je suis un junkie d’info. Un mal incurable, j’en ai bien peur. D’ailleurs, au moment où j’entreprends la rédaction de cette chronique, la radio est allumée. Un peu plus tard, la télé va prendre le relais et m’accompagnera en sourdine tout au long de la journée dans mon repaire. Mes journaux, eux, sont lus depuis déjà longtemps. En plus, régulièrement au cours des prochaines heures, j’irai consulter mes sites de nouvelles préférés, histoire de me rafraîchir le bloc-note. On n’en sait jamais trop que je me dis. Enfin presque…
Quand j’apprends qu’un incendie dans une maison de retraite a fait plein de victimes, c’est sûr que mon radar s’active. Et dès lors, j’ai envie d’en savoir un maximum à propos de l’événement. Mais que l’on me comprenne bien: mon maximum a quand même des limites. Des limites que la décence devrait imposer.
Donc, pour moi, inutile d’aller interroger un homme qui a vu sa mère mourir emprisonnée sur son balcon à peine soit-il rentré à la maison. Ni de lui demander si elle allait lui manquer. Oui oui, cette question-là, on l’a entendue…
Pas besoin non plus de consacrer une intervention en direct dans un bulletin de nouvelles du matin pour nous montrer la table (!) sur laquelle on allait s’installer pour donner un point de presse un peu plus tard dans la journée.
Pas certain qu’il soit plus pertinent de claironner toute la journée le témoignage «exclusif» d’un gardien encore clairement en état de choc qui attribue la responsabilité de l’incendie à un pensionnaire de 96 ans qui en aurait fumé une de trop le soir venu. Avez-vous ressenti le même malaise que moi quand le fils du vieux monsieur en question s’est senti obligé de prendre la défense de son père qui venait incidemment de mourir lors du même événement? J’aurais voulu déménager sur Saturne quand j’ai entendu ça.
Tout ça sans compter le nombre incalculable de fausses mises à jour où l’on n’avait rien d’autre de neuf à ajouter que des vox pop faits avec le boulanger, le dépanneur, le valet service et chaque incontournable qu’on trouve dans tout bon village qui se respecte.
Je ne suis pas un analyste des médias et je n’ai aucune envie de le devenir. Sauf qu’au cours de la dernière semaine, j’ai l’impression qu’on a atteint un sommet d’indécence dans la couverture de l’incendie de l’Isle-Verte. Une couverture étouffante.
La semaine dernière, pendant quelques heures, j’ai fermé la télé, éteint la radio et rangé les journaux. C’était mieux comme ça.
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En passant, que des membres du gouvernement ou des députés locaux soient présents sur les lieux d’une tragédie, ça va de soi, c’est leur devoir élémentaire. Mais quand des politiciens courailleux de kodaks se ramassent là pour jouer sur leur violon leur pseudo concerto empathique, c’est tellement, mais alors là, tellement méprisable. Une mention d’honneur avec haute distinction sera donc décernée à l’insipide François Legault de la CAQ, qui est venu colliger les doléances de certains citoyens éprouvés par le drame pour les transmettre aux médias. Celui-là, j’vous dis…
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Prédiction: d’ici une semaine, vous serez exposés à plus ou moins 2 384 articles ou reportages sur les publicités du Super Bowl de dimanche. Ça, c’est sans compter les mêmes maudites recettes d’ailes de poulet et de nachos que l’on nous sert chaque année. J’ai assez hâte là…
Les opinions exprimées dans cette tribune ne sont pas nécessairement celles de Métro.