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De la musique à nos oreilles

À quand remonte la dernière fois où vous avez acheté un disque compact dans un magasin? Oui oui, un disque flambant neuf avec une pochette bien scellée. Oups, peu de réponses… Mario Pelchat avait donc raison quand il a publié son cri du cœur la semaine dernière : la vente au détail de disques ­­– selon le mode traditionnel s’entend – est en chute libre et il y a de moins en moins d’argent à faire là. Pas vraiment nouveau comme constat, mais bon, il y a là un producteur aux abois. Est-ce que ça veut dire que notre scène musicale traverse une crise d’anémie? Pas du tout.

Il fut un temps où pour posséder une chanson afin de l’écouter à sa guise, il fallait l’acheter sur un support solide. Du rouleau de cire au CD, en passant par les 78, 45, 33 tours et les rubans, c’est ainsi que les choses allaient depuis une centaine d’années. Là, on télécharge. Plus besoin de pochettes, de magasins ni même de système de son pour se divertir.  Tout se commande du bout du doigt pour se ramasser au fond de vos oreilles et hop, le tour est joué, vous avez toujours accès à votre bonheur.

Ça fait un bout de temps qu’on nous annonce qu’une terrible crise va détruire l’industrie de la musique. Faudrait peut-être faire la part des choses. Une crise, il y en a effectivement une qui affecte l’industrie telle qu’on la connaît et qui la blessera mortellement. Cependant, ça n’a rien à voir avec la musique et l’extraordinaire moment de créativité que nous vivons ces années-ci.
La vraie crise, c’est celle d’une machine qui a vendu ses produits à des prix indécents pendant des années.  En offrant un CD à 20 $ alors que le coût de production net avoisinait en gros les 5 piasses et quart. En réservant une large part de ce prix de vente injustement gonflé au distributeur, au détaillant et à l’étiquette tout en prenant bien soin de limiter la pointe de tarte de l’artiste et/ou du créateur à une fraction qui frôlait habituellement l’indécence.

La crise, c’est celle d’un modèle d’affaires qui a vu l’arrivée de l’internet comme un moyen de plus pour vendre des casquettes et des t-shirts mais qui n’a jamais deviné que le nouveau média allait favoriser la «très» libre circulation des œuvres. Pendant des années, «l’industrie» a cherché à trouver une solution pour affronter la bibitte qui allait inexorablement la dévorer tout rond. En ignorant bêtement qu’il y a une chose que rien ni personne n’a encore pu stopper dans l’histoire de l’humanité : le progrès.

Si les bonzes de la business avaient choisi de se ranger du côté des artistes et des fans afin de se réinventer plutôt que de continuer à se comporter en «peddlers» et en vendeurs de brosses, peut-être qu’ils auraient pu sauver la face de manière honorable. La plupart ne l’ont pas fait, tant pis pour eux. Ceux qui continueront à faire partie de l’équation ont compris que le seul lien solide est celui qui unit l’artiste et ses fans.

La musique demeure, le reste passe. Et c’est très bien comme ça.

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J’ai eu beaucoup de peine quand j’ai appris la mort de l’acteur Philip Seymour Hoffman. Et quand j’ai lu sur le web des commentaires du genre : «Bon débarras, un junkie de moins», je me suis dit qu’on vivait dans un monde parfois bien cruel qui était assez souvent habité par des épais.

Les opinions exprimées dans cette tribune ne sont pas nécessairement celles de Métro.

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