Avant de commencer, j’aimerais préciser que je ne passe pas 70% de mon temps à être enragée. Oh, j’ai mes creux, c’est certain. Quand le chien défait les poubelles, je me fâche, et quand il pleut, ça arrive que j’aie le vague à l’âme. Le reste du temps, je suis heureuse. Je ris beaucoup – bénéfice marginal d’avoir la blonde la plus drôle sur terre – et je ne passe pas mon temps à rouler les yeux au plafond parce que je suis féministe.
J’ai des amis gars et je ne souhaite pas couper leurs testicules durant la nuit. Je ne rêve pas d’un monde où les femmes dominent. Je n’achète pas des jouets roses à mes neveux pour le simple plaisir de faire des malaises dans les fêtes de famille. Je me contrefous de la hauteur à laquelle les hommes font pipi, à condition qu’ils sachent viser.
Je ne me sens pas diminuée dans ma situation de femme lorsque je fais à manger. Je ne mets pas mes échecs sur le dos du genre auquel j’appartiens. Je ne crois pas que le fait d’être une femme fasse de moi une victime. En fait, je sais que je fais partie des personnes privilégiées de ce monde et s’il y a injustice envers les femmes, il s’agit plutôt d’une injustice systémique qui me touche personnellement peu ou pas.
Je précise, parce que selon un groupe de femmes opposées au féminisme, être féministe fait de moi une victime névrosée anti-hommes qui voit des problèmes là où il n’y en a pas et qui n’hésitera pas à accuser le patriarcat en cas de défaite quelle qu’elle soit. Les photos de ces femmes «qui n’ont pas besoin du féminisme parce que» ont dû déclencher l’alerte rouge au siège social mondial du féminisme. Si une telle chose existait, nous pourrions conclure que le féminisme a échoué dans sa façon de communiquer son message. Parce que rien, dans toutes les sortes de féminisme que je connais, ne s’oppose à l’égalité entre les sexes, à l’émancipation des femmes, à la beauté ou à la sensualité.
Où ces nuances se sont-elles égarées? Probablement dans l’interprétation que se font ces antiféministes des messages tels qu’ils ou elles les conçoivent. J’ai des exemples fréquents de ces interprétations exagérées dans les commentaires à certaines de mes chroniques. Prenez par exemple celle d’hier, où je parlais de la réaction de plusieurs personnes au phénomène des jambes poilues. Pour certains réactionnaires, ce mouvement vise à forcer toutes les femmes du monde à laisser pousser leur pilosité. Or, rien dans l’expression «changer l’idéal social de la beauté» n’appelle à ce type de dictature.
Je ne sais pas pourquoi les revendications féministes sont toujours perçues comme pires qu’elles ne le sont en réalité. Pourquoi les féministes passent toujours pour des enragées qui veulent enlever quelque chose aux hommes? Peut-être que revendiquer l’égalité est une idée encore trop radicale.