Ça prenait donc ça. Suffisait d’annoncer la fermeture du costumier de Radio-Canada pour que l’on sente enfin une réaction réelle face à ce qui s’y passe depuis déjà fort longtemps. Là où les compressions idiotes et sauvages ont échoué, l’éventuelle dispersion des habits de Bobino, de Fanfreluche et autres amis de la Ribouldingue a fini par alerter la population sur le destin odieux qui est réservé à la radio-télé publique par les autorités fédérales en place.
Quand même étrange de constater que le sort des 2 500 travailleurs de la place touchés par ces coupes surréalistes n’avait pas su émouvoir autant de monde jusqu’ici. Fallait viser le centre mou de nos tendres souvenirs d’enfance pour qu’une réaction majeure se produise. Si c’est ça que ça prenait, tant mieux. Jamais, sur les réseaux sociaux, un tel embrasement n’était arrivé. Évidemment, y’a les éternels pisse-vinaigre de la nation qui n’y voient qu’un vulgaire ménage de garde-robe mais, ce coup-ci, on ne prendra même pas une minute pour essayer de leur expliquer quoi que ce soit, c’est peine perdue.
Ce qui est fou là-dedans, c’est de voir une fois de plus avec quelle désinvolture ces annonces sont faites. On vous prive d’un morceau de votre culture, on vous annonce qu’on va se départir de ce qui vous appartient – jusqu’à preuve du contraire, Radio-Canada demeure encore la propriété de tout le monde – et ça sonne comme si on fermait une guérite dans le stationnement.
Je souhaite vivement qu’une fois pour toutes, un réel mouvement d’appui et de pression prenne forme pour sauvegarder ce qu’il reste de cette possession inestimable qu’est cette institution au patrimoine prestigieux. Notre patrimoine. Et que ce mouvement soit, sans aucune distinction, celui des auditeurs, des artisans des communications et autres voix influentes de notre société. Ça presse.
Si l’heure était grave depuis déjà longtemps, là, les minutes comptent…
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Quand j’ai appris samedi matin que le gouvernement Harper, dans une manœuvre électoraliste sans équivoque, prévoyait donner le nom de Maurice Richard au prochain pont qui reliera Montréal à sa Rive-Sud, j’avoue que j’ai réagi plutôt positivement. Le nom du Rocket, avec ce qu’il représente, méritait bien d’être utilisé sur un site majeur, donc… Mais j’ai changé d’idée depuis.
Parce que le nom de Champlain, faute d’être suffisamment évoqué dans nos cours d’histoire, mérite de demeurer dans le paysage. Aussi parce que le premier pont de ce nom sera démoli de toute façon et que les cartes routières et les panneaux de signalisation pourront toujours servir. Mais surtout parce qu’avec la controverse que ça suscite déjà, c’est la famille de Maurice Richard qui pourrait le plus en souffrir. Nul besoin de répéter ce qui fut infligé à la descendance de Robert Bourassa quand on a voulu renommer l’avenue du Parc en sa mémoire.
Pis, entre nous, les vraies questions à propos du futur pont ne sont-elles pas : quand sera-t-il construit, combien ça va coûter et combien faudra-t-il débourser pour passer dessus?
Me semble que c’est déjà en masse, non? Pour le reste, bof…
Les opinions exprimées dans cette tribune ne sont pas nécessairement celles de Métro.