Finalement, Line Beauchamp a choisi de partir. Quand la nouvelle est sortie hier après-midi, dans la plupart des médias, on parlait de démission surprise. Vous, étiez-vous franchement surpris? Pas moi. À sa place, j’aurais probablement fait la même affaire. Juste à voir les traits qui se creusaient sur son visage au cours des dernières semaines, il est permis de croire que l’ex-ministre a passé un bien mauvais moment sur les plans politique et personnel. Et on imagine également que son sentiment d’impuissance a dû enfler à un rythme exponentiel. Son départ, elle a dû en rêver plus d’une fois… Maintenant, c’est chose faite. Tant mieux pour elle. Quoi qu’on en pense, quoi qu’on en dise, les élus sont aussi des êtres humains. Parfois, quand la bataille devient hargneuse, on l’oublie…
On dit que tout ce qui traîne se salit. Depuis maintenant 14 semaines, l’affrontement qui oppose les forces étudiantes au gouvernement n’en finit plus de traîner en longueur. Tirez-en vos propres conclusions. De là à croire aveuglément Line Beauchamp quand elle raconte qu’elle avait simplement perdu toute confiance face aux leaders étudiants pour mener une négociation saine, on se permettra d’entretenir une certaine réserve. Pas sûr que la stratégie de fermeture prônée par le gouvernement lui laissait une marge de manœuvre suffisante pour faire bouger les choses. Le rythme du gouvernement, c’est Jean Charest qui le fixe, et personne d’autre.
N’oublions pas ce que nous rappelait dernièrement Jean Cournoyer, ce vieux routier de la politique québécoise qui a tout vu. «Dans le conseil des ministres, il n’y a qu’un ministre qui décide. Et c’est le premier! Les autres, y suivent…» Vu le contexte, on ne saura donc jamais ce que la principale intéressée aurait voulu faire. Seul indice, on ne l’a jamais sentie à l’aise dans ce dossier. Ainsi, on est à même de penser ce qu’on veut.
La démission de Line Beauchamp et la nomination de Michelle Courchesne au ministère de l’Éducation placent maintenant une nouvelle charge de pression sur les épaules des leaders étudiants. Ceux-là mêmes qui, il y a à peine une dizaine de jours, signaient un projet d’entente avec le gouvernement, pour ensuite le voir battu à plate couture par leurs propres membres lors des assemblées générales subséquentes. Ce seront peut-être eux qui devront se poser tôt ou tard des questions sur leur efficacité et/ou sur leur représentativité dans le dossier. C’est habituellement le sort qui est réservé à ceux et celles qui sont renversés par leur propre base.
Hier, pendant le point de presse de l’ex-ministre, un journaliste a parlé de la reine qui venait de tomber sur l’échiquier. Si ce conflit s’est transformé en partie d’échecs, j’ai bien hâte de voir les prochains coups. Surtout du côté étudiant. Parce qu’aux échecs, le règlement est clair là-dessus, celui qui refuse de bouger ses pions ne peut gagner le match…
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Petite question aux indignés qui veulent reprendre leur activité de plein air au centre-ville encore une fois cette année : quelle garantie pouvez-vous offrir aux Montréalais que votre campement ne deviendra pas, comme l’an passé, un ramassis de bums qui n’ont rien à voir avec la cause que vous défendez? C’est bien beau, vouloir mettre en place un nouvel ordre mondial, mais quand on n’est même pas capable de gérer un coin de rue, disons que l’affaire commence bien mal…
Les opinions exprimées dans cette tribune ne sont pas nécessairement celles de Métro.