TORONTO — Le journaliste d’expérience Peter Mansbridge estime que les médias devront «examiner très attentivement» la façon dont ils font leur travail, après une autre élection présidentielle américaine qui a pris de nombreuses salles de nouvelles au dépourvu.
L’ancien chef d’antenne et correspondant en chef à la retraite de CBC News relève un effritement de la confiance envers les médias, plus particulièrement depuis l’élection de 2016 aux États-Unis, que de nombreux organes de presse n’ont pas correctement prédite.
Il croit qu’un manque de compréhension et de couverture de la manière de penser des électeurs va encore nourrir cette tendance dans le cadre de la course actuelle entre le président Donald Trump et son rival démocrate Joe Biden.
M. Mansbridge note que la dernière élection a été «beaucoup plus serrée qu’on ne le pensait, et il semble y avoir eu, encore une fois, une mauvaise lecture fondamentale du public américain et de l’électeur américain».
Les organisations médiatiques devront être beaucoup plus transparentes afin de rétablir la foi et la confiance de ceux qui dépendent d’elles pour s’informer, selon M. Mansbridge.
Pour ce faire, il faudra expliquer aux téléspectateurs, auditeurs et lecteurs «comment nous faisons ce que nous faisons, pourquoi nous choisissons les histoires que nous choisissons, pourquoi nous choisissons les partenariats que nous choisissons», a-t-il déclaré en entrevue avec La Presse Canadienne, mercredi, en vue de la parution de son nouveau livre «Extraordinary Canadians: Stories from the Heart of Our Nation».
Le résultat de la course à la Maison-Blanche était toujours incertain en après-midi, car les scores demeuraient trop serrés dans plusieurs États clés.
L’influence des médias
Bien que les électeurs décident par eux-mêmes à qui ira leur appui, les médias ont une certaine influence sur leur décision avec le type d’informations qu’ils rapportent et d’histoires qu’ils racontent, rappelle M. Mansbridge.
«C’est ce que je veux dire quand je dis que nous devons vraiment réévaluer ce que nous faisons», a-t-il déclaré, en notant que de nombreux médias avaient fait piètre figure, il y a quatre ans, en partie parce qu’ils avaient négligé l’insatisfaction dans les régions rurales.
«Clairement, ces mêmes niveaux de mécontentement existent toujours», estime l’ancien présentateur primé de «The National», qui a quitté ses fonctions après près de trois décennies à la barre de l’émission, en juillet 2017.
Les grandes villes ont tendance à favoriser les démocrates, à l’instar du Canada où elles penchent souvent en faveur des libéraux, souligne-t-il.
«Et dans de grandes parties du reste du pays, dans les petites villes et les plus petites communautés, certainement dans les zones rurales, le vote est très différent. Ça s’explique en partie par le fait que les gens sont vraiment mécontents de la façon dont ils sont perçus, dont leurs préoccupations et leurs intérêts sont confrontés par les gouvernements et les médias, et par la façon dont leurs histoires sont racontées.»
M. Mansbridge se réjouit d’avoir vu certaines des principales organisations médiatiques aux États-Unis expliquer avec plus de transparence, au cours de la dernière semaine, comment elles couvriraient les élections et feraient leurs prédictions.
L’avance plus faible qu’anticipée de M. Biden a toutefois causé la surprise et cela pourrait selon lui éroder encore davantage la confiance du public. «Nous allons en payer le prix», prévient-il.
«Extraordinary Canadians: Stories from the Heart of Our Nation» (Simon et Schuster), qu’il signe avec Mark Bulgutch, sera en vente le 10 novembre.
Victoria Ahearn , La Presse Canadienne