Culture

Les nombreux univers de Queen Ka

Connue dans le monde de la poésie orale sous le nom de Queen Ka, Elkahna Talbi est une touche à tout artistique. Comédienne, écrivaine et animatrice d’ateliers d’écriture, cette Nord-Montréalaise aime jouer avec les mots et transmettre cette passion.

Elkahna Talbi est bien souvent entre deux choses. Entre deux projets, entre deux arts, entre deux personnages, entre deux cultures… C’est justement entre un atelier et une audition qu’elle a accepté de parler d’elle et de son parcours.

«J’aime ça faire plein d’affaires et j’ai beaucoup de difficultés à juste faire une seule chose», avoue la jeune femme.

Un agenda chargé pourrait en effrayer plus d’un, mais Elkahna se complaît dans la multiplicité. À l’aise avec ce qu’elle est et ce qu’elle fait, cette artiste s’intéresse surtout à où elle va, même si elle accepte fièrement de parler d’où elle vient. Née dans le quartier du marché Jean-Talon de parents tunisiens arrivés au Québec dans les années 70, Elkahna Talbi a vécu à Montréal-Nord de ses huit à ses vingt-deux ans. Passionnée de théâtre et de comédie, c’est dans ce quartier qu’elle a découvert la poésie par un «bel accident de parcours» lors d’une activité paroissiale.

«J’ai participé à cette activité et après cela j’ai commencé à écrire, mais j’écrivais vraiment pour moi. C’est plusieurs années plus tard qu’un ami a découvert mes textes et m’a incitée à les présenter sur scène, se souvient la slameuse. Les premières fois étaient hyper angoissantes, mais ça l’est encore aujourd’hui. Quand les gens ne me connaissent pas, j’ai toujours la même boule dans le ventre, je me demande s’ils vont me lancer des tomates, mais en même temps quand ça fonctionne, on est complètement exalté.»

En racontant sa vie, ses intérêts, ses origines et sa vision du monde, ElkahnaTalbi a créé le personnage de Queen Ka, son penchant scénique, et a réussi à se faire un nom dans le monde de la poésie orale.

«Quand le slam est arrivé dans ma vie, j’étais comédienne, mais je ne travaillais pas beaucoup. Je ne savais pas trop où je m’en allais, mais c’est cette épingle qui est sortie du jeu», rembobine l’artiste nord-montréalaise.

Influences
Désormais reconnue, Queen Ka n’a plus à chercher des scènes pour s’exprimer. Elle a plutôt du mal à refuser des projets et multiplie les prestations. Loin de la petite activité paroissiale qui l’a lancée dans ce milieu, l’artiste n’en oublie pour autant pas le quartier où elle a grandi.

«J’ai un côté un peu don’t f*** with me que j’ai développé à Montréal-Nord, j’ai aussi un rapport avec la diversité et un amour de ma ville qui viennent de là. Je suis un produit de tout ce que ce territoire offre à une famille, même si je n’ai jamais été du genre à m’associer à un seul lieu», explique-t-elle.

Elkahna Talbi aimerait néanmoins voir tomber les stéréotypes que l’on prête à son quartier. Elle a notamment participé au spectacle annuel la Foirée montréalaise consacré à Montréal-Nord l’an dernier pour aider à mettre en lumière tout le positif de l’arrondissement.

«On diabolise beaucoup ces endroits, mais quand j’allais pas bien, j’avais la chance de prendre mon vélo, de traverser Henri-Bourassa, de descendre Gouin, d’être en face de la rivière et de réfléchir en regardant l’eau. C’est pas tout le monde qui peut faire ça, j’étais à Montréal et c’était magnifique. On n’est pas condamnés à des circonstances qu’on a pas choisies», estime l’artiste.

Transmission
Elkahna Talbi poursuit la poésie orale en tant que Queen Ka, mais joue aussi la comédie, souvent au théâtre, et vient de se lancer dans l’écriture avec son premier recueil Moi, figuier sous la neige qui raconte en prose ses origines et son parcours de fille d’immigrants tunisiens élevée au Canada.
Cela ne suffit toutefois pas à combler cette hyperactive artistique qui anime chaque année une centaine d’ateliers dans des écoles ou des centres communautaires pour communiquer sa passion de la poésie.

«J’ai beaucoup de difficultés à être juste apaisée par mon rôle d’artiste. C’est pas assez concret pour moi, je ne le vois pas, je ne le ressens pas, alors que quand je vais dans des ateliers, que je donne des outils pour écrire, je vois que j’aide les jeunes et ça m’apaise. Je donne un peu ce que j’ai reçu», indique la Nord-Montréalaise.

Héritage royal
Elkahna Talbi porte un prénom inspiré de la Kahina, une reine guerrière berbère, ce qui a inspiré son surnom de scène Queen Ka.

«C’est mon alter ego. C’est une partie de moi. Au départ, ce nom m’a servi pour faire la différence entre la comédienne et l’artiste de spoken word. Je crois aussi qu’inconsciemment, c’était pour me donner un petit coup de pied au cul, j’ai pas le choix d’assumer une attitude un peu royale», explique-t-elle.

Si elle multiplie aujourd’hui les projets, Elkahna Talbi garde cette séparation en utilisant son nom de naissance lorsqu’elle est au théâtre ou dans ses travaux d’écriture. Dans les prochains mois, on pourra notamment la voir en tant que Queen Ka aux Francos de Montréal dans un spectacle collégial en hommage à Pauline Julien. Pour le reste, des projets d’écriture et de comédie sont en développement, mais seront signés Elkahna.

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