Culture

Et si les musiciens de demain étaient… des avatars virtuels ?

L‘avatar virtuel de The Weeknd

En l’absence de concerts et tournées mondiales, l’industrie musicale s’évertue à réinventer le spectacle vivant dans le monde virtuel. Sa dernière lubie ? Créer des avatars virtuels, d’artistes connus ou non, pour les faire monter sur scène lors de performances en ligne. Décryptage.

Si cela fait des années que des grands noms de la musique comme Björk et Gorillaz ont perçu le potentiel des avatars, la pandémie a suscité un regain d’intérêt pour ces alter ego 2.0. La preuve avec le dernier concert virtuel de The Weeknd sur TikTok, durant lequel le chanteur canadien a interprété les morceaux de son dernier album sous la forme d’un avatar virtuel. Plus de 2 millions de fans se sont connectés pour assister à cette performance unique de l’interprète de Blinding Lights.

Face à l’engouement du public pour cette nouvelle forme de divertissement, Warner Music Group a conclu un partenariat avec Genies, «la plus grande société de technologie d’avatars au monde». Les deux entreprises développeront des personnages virtuels pour les artistes du label ainsi que des vêtements et accessoires numériques sous forme de NFT. Une initiative qui leur permettra de ne pas «être limités par les contraintes du monde réel» dans leurs interactions avec leurs fans, selon Akash Nigam, le PDG de Genies.

Oana Ruxandra voit, elle, dans ce partenariat une opportunité pour les artistes de Warner Music Group de diversifier leurs revenus à travers les produits dérivés, ou « merchandising ». Un marché encore inexploité, que l’organisme professionnel Licensing International avait estimé à 3,7 millions de dollars en 2019.

«Alors que les avatars et leur personnalisation deviennent une façon de plus en plus intéressante de s’exprimer [pour les artistes] et que les produits dérivés génèrent des sources de revenus diversifiées, le partenariat de WMG avec Genies permettra à nos talents de profiter d’une nouvelle forme d’expression personnelle et de toucher un nouveau public », affirme la directrice du numérique chez Warner Music Group.

FN Meka, la nouvelle star de TikTok

Si des artistes comme John Legend, Justin Bieber et Dillon Francis n’hésitent plus à se réinventer grâce aux avatars virtuels, certaines start-ups vont plus loin en affirmant que les stars de demain ne devront pas forcément exister en chair et en os pour percer dans l’industrie. C’est le cas du label Factory New, qui a fait le choix de ne représenter que des artistes non humains. Pour le moment, l’entreprise américaine ne compte qu’un seul et même talent : FN Meka. Ce rappeur virtuel, dont l’esthétique s’inspire du mouvement cyberpunk, s’inscrit dans la lignée des «soundcloud rappers» comme Lil Pump, Lil Uzi Vert et 6ix9ine.

Contrairement à eux, FN Meka n’a ni écrit ni composé ses morceaux INTERNET et SPEED DEMON, une intelligence artificielle s’en est chargée pour lui. «Nous avons mis au point une technologie d’IA propriétaire qui analyse certaines chansons populaires d’un genre spécifique et génère des recommandations pour les différents éléments de la construction d’une chanson : contenu des paroles, accords, mélodie, tempo, sons, etc. Nous combinons ensuite ces éléments pour créer un nouveau morceau», révèle Anthony Martini, cofondateur de Factory New, à Music Business Worldwide.

Bien que la qualité des chansons composées pour FN Meka soit discutable, le rappeur semble avoir trouvé son public… sur TikTok . Il comptabilise plus de 9 millions d’abonnés sur la plateforme, où il partage des vidéos de lui torse nu ou au volant d’une voiture de luxe. Plaire sur les réseaux sociaux, voici la véritable mission de FN Meka selon Anthony Martini. «Je ne veux pas être trop philosophe. Mais qu’est-ce qu’un «artiste» aujourd’hui ? Pensez aux plus grandes stars du monde. Combien d’entre elles ne sont que des vaisseaux pour des projets commerciaux ?», explique-t-il à la publication spécialisée.

@fnmeka

Ps5 SuperCar 🐸 Guess How Much it Cost #ps5 #supercar #speeddemon

♬ Speed Demon – FN Meka

La K-pop, pionnière en matière d’avatars virtuels

L’industrie de la K-pop a depuis longtemps perçu les possibilités marketing des artistes virtuels, et les exploite pour propulser de nouveaux groupes sur le devant de la scène. L’agence SM Entertainment avait usé de cette tactique en novembre dernier pour les débuts du dernier girls band de son écurie, aespa. Ce groupe est composé des chanteuses Karina, Giselle, Winter et NingNing, mais aussi de leurs homologues virtuels.

«Les membres ‘réels’ du groupe et ceux virtuels partagent un cerveau IA qui leur permettra de se rencontrer dans le monde numérique, de se parler et de s’entraider en partageant des informations sur leurs univers respectifs», avait déclaré Lee Soo-man, PGD de SM Entertainment, lors de la présentation officielle du girls band durant le Forum mondial de l’industrie culturelle.

L’agence pousse le concept à son paroxysme dans une vidéo promotionnelle du groupe, où la chanteuse sud-coréenne Karina raconte sa rencontre sur un réseau social avec son alter ego numérique, ae Karina. Si certains restent sceptiques face à la trame narrative, aespa bénéficie du soutien des fans de K-pop. La preuve : son dernier morceau, Black Mamba, cumule plus de 143 millions de vues sur YouTube. Un succès dont se réjouissent Karina, Giselle, Winter et NingNing ainsi que leurs avatars virtuels.

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