Frédéric Bérard veut vaincre l’apathie. Celle de notre société, qui «déconnerait» sur des enjeux de basse importance plutôt que de s’attaquer aux graves maux qui l’affligent. Pour ça, il fait part du phénomène de «l’homme de paille», qui constitue aussi le titre de son nouveau livre.
Comme le souligne Me Bérard, avocat constitutionnaliste et chroniqueur pour Métro, l’homme de paille est un sophisme. Il est constitué de groupes fictifs, la plupart du temps de gauche, auxquels on attribue certaines dérives. Les wokes en représentent un exemple flagrant. On leur reproche un jour d’avoir brûlé des bandes dessinées de Tintin, le lendemain, de se mêler du sexe de Monsieur Patate et, finalement, de pratiquer la discrimination positive dans les facultés de droit.
Pourtant, tous les individus responsables de ces actions n’appartiennent pas forcément à un groupe identifiable, mais constituent plutôt une cible facile. «On construit un homme de paille, et on en exagère grossièrement les traits pour taper dessus à qui mieux mieux», explique Me Bérard en entrevue avec Métro.
Par la bande, ce phénomène pousse la société à accorder une attention démesurée à des enjeux négligeables, continue-t-il. «Il y a une banalisation de choses extrêmement graves qui finissent par ne pas s’immiscer dans la sphère publique, déplore le chroniqueur de Métro. On ne parle à peu près pas de la montée de l’extrême droite, du populisme en général. Ça, c’est un sacré problème.»
Pendant qu’on s’attarde au sexe de Monsieur Patate ou au nouveau pronom inclus dans Le Robert, l’humanité est en train de crever. Il faut ramener les projecteurs sur ce qui est important.
Frédéric Bérard, chargé de cours à la Faculté de droit de l’Université de Montréal
Chute d’une démocratie
L’homme de paille de Frédéric Bérard, dont le lancement a lieu aujourd’hui, est donc un recueil de ses chroniques de la dernière année. Une sorte d’«album photo», image-t-il, qui retrace la «chute de nos démocraties».
Et comme dans tout album photo, on revoit nos plus beaux, comme nos moins beaux jours. Me Bérard ne s’en dédouane pas: lui-même est parfois tombé dans le piège de l’homme de paille au cours de la dernière année.
«Oui, je pense des fois tomber dans le piège en abordant certains enjeux. C’est difficile de ne pas le faire lorsqu’on nous amène certaines problématiques. Mais d’un autre côté, ce n’est pas vrai que toutes les opinions ont la même valeur. Quand on parle d’extrême gauche, de quel extrême parle-t-on au final? De qui on parle, d’inconnus de l’UQAM? Pendant ce temps, on oublie de parler d’acteurs de l’extrême droite, comme d’Éric Zemmour, qui souhaite déporter 2,5 millions de citoyens en France.»
Frédéric Bérard espère que tout le monde trouvera son compte dans son nouveau livre. «Je me fais un devoir de parler à tout le monde dans mes interventions médiatiques, souligne-t-il. C’est facile de parler entre nous à l’Université, mais la réalité, c’est que la démocratie ne passe pas par la fac de droit, mais par TVA», conclut-il.